En d'autres termes, ce sont les conditions à ajouter à la différentiabilité au sens réel pour obtenir la différentiabilité au sens complexe.
Lorsque la fonction est différentiable au sens réel en tout point d'un ouvert, ces équations expriment une condition nécessaire et suffisante pour qu'elle soit holomorphe sur cet ouvert.
On considère une fonction d'une variable complexe, définie sur un ouvertU du plan complexe ℂ. On utilise ici les notations suivantes :
la variable complexe z est notée x + i y, où x, y sont réels ;
les parties réelle et imaginaire de f(z) = f(x + i y) sont notées respectivement P(x , y) et Q(x , y), c'est-à-dire : f(z) = P(x , y) + i Q(x , y), où P, Q sont deux fonctions réelles de deux variables réelles.
Une fonction est dite différentiable au sens complexe, ℂ-différentiable ou encore dérivable, en un point s'il existe un voisinageV de z0 tel que et tel que la fonction:
admet une limite au point . Cette limite est alors notée et est appelée dérivée de f en z0.
Il est important de remarquer que la condition de ℂ-différentiabilité pour les fonctions de variable complexe est bien plus contraignante que la condition analogue pour les fonctions de variable réelle. La différence est la suivante :
dans ℝ, il y a essentiellement deux manières de s'approcher d'un point : à droite, ou à gauche. Une fonction de variable réelle est dérivable en un point si et seulement si le « taux d'accroissement » admet en ce point une limite à droite et une limite à gauche ayant la même valeur (finie) ;
dans ℂ, il y a une infinité de manières de s'approcher d'un point ; chacune d'elles doit donner lieu à une limite (finie) du « taux d'accroissement », ces limites étant de plus toutes égales.
la différentielle de f au point z0 est l'application ;
où l'opérateur différentiel est, par définition, égal à .
Démonstration du théorème
On garde les notations précédentes ; en particulier, on note r un réel strictmeent positif tel que , et h un nombre complexe tel que .
On suppose que f soit ℂ-différentiable en : alors lorsque (on note A la dérivée ).
On définit (fonction d'une variable complexe):
si (*). Alors (par définition de A): lorsque
(*) peut s'écrire : (pour , et aussi pour ),
ou encore : , où (**)
Il est clair que l'application est ℝ-linéaire (et même ℂ-linéaire, propriété plus forte). Par conséquent :
est ℝ-différentiable en z0
, , ou : .
Réciproque : on suppose que f soit ℝ-différentiable en et que , autrement dit : , où (contrairement à ce qu'on affirme souvent, on n'utilise ici aucune hypothèse de continuité des dérivées partielles : l'hypothèse précédente concerne un seul point ; il se pourrait que f ne soit ℝ-différentiable qu'en ce point).
Par hypothèse, en notant L la ℝ-différentielle de f en z0, on peut écrire :
, où lorsque
Si h = u + i v (u, v réels), alors, par ℝ-linéarité de L,
Ainsi : , et lorsque
Si , on en déduit que : lorsque . L'existence de cette limite établit que est ℂ-différentiable en z0 (c'est-à-dire : existe), et que .
Ceci prouve aussi que lorsque f est ℂ-différentiable en z0 :
La caractérisation suivante des fonctions holomorphes est une conséquence immédiate du théorème précédent, appliqué en chaque point.
Théorème — Une fonction est holomorphe sur l'ouvert U de ℂ si et seulement si :
elle est ℝ-différentiable en tout point de U ;
et elle vérifie les équations de Cauchy-Riemann en tout point de U.
Remarque sur la continuité des dérivées partielles : on peut montrer (c'est un résultat important de la théorie de Cauchy) que toute fonction holomorphe sur un ouvert de ℂ y est analytique : cela signifie qu'au voisinage de chaque point, elle est développable en série entière ; donc, toute fonction holomorphe est indéfiniment dérivable, et a fortiori elle admet des dérivées partielles continues sur l'ouvert.
La fonction est de classe C1 sur ℂ, donc elle y est ℝ-différentiable ; mais elle n'est ℂ-différentiable en aucun point parce qu'elle ne vérifie nulle part les équations de Cauchy-Riemann. En effet, comme f(z) = x – i y :
et
ainsi, pour tout , .
La fonction est de classe C1 sur ℂ, donc elle y est ℝ-différentiable ; elle est ℂ-différentiable en 0 et seulement en ce point (elle n'est holomorphe sur aucun ouvert, son ensemble de ℂ-différentiabilité étant d'intérieur vide).
La fonction est holomorphe sur ℂ et pour tout , . En effet, si et , lorsque . On a , donc :
(équations de Cauchy-Riemann au point z)
Le caractère contraignant de la condition d'holomorphie est particulièrement saisissant quand on applique les conditions de Cauchy-Riemann à une fonction à valeurs réelles définie sur un ouvert de ℂ : les deux dérivées partielles par rapport à x et à y doivent alors être nulles et la fonction doit être localement constante. En d'autres termes, une fonction holomorphe à valeurs réelles sur un ouvert connexe de ℂ se réduit nécessairement à une constante.
Par exemple, la fonction argument de z (réelle et non constante) n'est pas holomorphe. On vérifie d'ailleurs facilement que les équations de Cauchy-Riemann ne sont pas satisfaites, car ses dérivées partielles sont celles de arctan (y/x). Il en est évidemment de même de la fonction module de z (réelle et non constante).