Architecture ordonnancée
L'architecture ordonnancée est la disposition organisée et harmonieuse du front bâti d'une construction.
Elle est utilisée soit pour un édifice unique, dont la façade répond au principe de l'ordonnance, soit pour un ensemble de bâtiments, ayant plusieurs propriétaires différents, mais dont le dessin des façades est confié à un seul architecte (ou soumis à un code d'urbanisme), afin de préserver l'équilibre et l'harmonie générale[1]. Dans ce cas qu'on appelle aussi « architecture à programme », l'intérieur des édifices est laissé libre de contraintes et peut être réalisé par des architectes ou maître d’œuvre différents.
Origine du terme
modifierEn architecture, l'ordonnance, ou ordonnancement, désigne l'agencement régulier et harmonieux de l'extérieur d'une construction. Présent dès l'Antiquité grecque, sous le terme de taxis[2], elle fait partie des six principes fondamentaux de l'architecture selon Vitruve : ordonnance, disposition, eurythmie, proportion (symétrie), convenance (bienséance) et distribution[3].
Historique
modifierPrémices dès le Moyen Âge
modifierDes prémices d'architectures ordonnancées existent dès le Moyen Âge, avec notamment les places régulières des villes nouvelles et des bastides : places de Montauban (1144) ou de Monpazier (1284). Certaines règles d'implantation très précises devaient être respectées comme l'alignement de la façade avant par rapport aux autres maisons, un étage en plus du rez-de-chaussée, et la présence d'un couvert des arcades, de façon à assurer une unité d’ensemble.
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La place des couverts (aujourd'hui place du Maréchal Leclerc) de Mirepoix donne un aperçu de l'aspect initial de la place de Montauban de 1144, avant son remaniement au XVIIe siècle.
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Place des couverts de Mirepoix.
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Place des Cornières à Monpazier.
Les premières « places à programme » en Italie
modifierToutefois on ne parle pas encore de place à programme. Les premiers exemples en Europe viendront de l'Italie de la Renaissance à partir des XVe et XVIe siècles. La première place à programme étant la Piazza Ducale de Vigevano (1492)[4], puis la Place Saint-Marc de Venise, dont l’ordonnancement de l'urbanisme est réalisé au XVIe siècle. La création de ces places ayant obéi à un programme déterminé et planifié pour obtenir une uniformité architecturale.
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Piazza Ducale à Vigevano, première place à programme d'Italie.
L'archétype des « places royales » françaises
modifierEn France, ce procédé architectural et d'urbanisme s'est beaucoup développé à partir du XVIIe siècle, lors des grandes opérations d’embellissement[5] des villes, au sortir de la période médiévale où les villes étaient enfermées dans leurs remparts. Un soin particulier est apporté à la symétrie et l'uniformité des façades. Les exemples les plus aboutis se retrouvent en particulier dans les "places Royales". Selon l'historien de l'art Pascal Piéra elles peuvent être décrites ainsi : « création française originale née de l'alliance d'une place ordonnancée et de la statue du souverain, la place royale est le plus souvent une place enclose dans un ensemble de maisons ou d'hôtels, tous identiques, dits à programme »[6].
On trouve des places royales dans de nombreuses villes de France, dont certaines ont depuis changé de nom : Paris (place des Vosges), Bordeaux (place de la Bourse), Toulouse (place du Capitole), Nantes, Nancy (place Stanislas), Reims, Caen (place de la République[7]), Montauban (place Nationale), Dijon (place de la Libération), Rennes (place du Parlement-de-Bretagne)...
Exemples en France
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Place des Vosges (1605-1615) à Paris.
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Place Ducale de Charleville-Mézières.
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Façades ordonnancées dessinées par Victor Louis, sur la partie de l'îlot Louis orientée vers la Garonne, à Bordeaux.
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La Grand'Place d'Arras, avec des façades réalisées par des architectes différents, mais un code de l'urbanisme imposé.
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Place Royale à Nantes.
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Avenue du Maréchal Joffre à Mulhouse.
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Place de la Concorde à Paris, « le plus grand ensemble ordonnancé de l’architecture parisienne » selon Alexandre Gady[8].
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Façades de la place Gramont à Pau.
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Place Vendôme à Paris, dessinée par Jules-Hardouin Mansart et qui servira de modèle à la place de la Bourse de Bordeaux.
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Façades ordonnancées de la rue de la Liberté à Dijon, très semblable à celles de la place Gambetta à Bordeaux.
Exemples en Europe
modifierDes exemples d'architecture ordonnancée existent dans d'autres pays, et en particulier le modèle de la place Royale s'est répandu en Europe dans la seconde moitié du XVIIIe siècle.
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Le Royal Crescent, à Bath.
Exemples dans le monde
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Place Naghch-e Djahan (XVIIe siècle) en Iran.
Notes et références
modifier- « Toulouse et la brique », sur www.toulouse-brique.com (consulté le )
- « L’Encyclopédie/1re édition/TAXIS - Wikisource », sur fr.wikisource.org (consulté le )
- Mireille Courrént, « Illusion du réel et esthétique de la correction : mimesis et phantasia dans la théorie vitruvienne de l’architecture », Pallas. Revue d'études antiques, no 92, , p. 103–113 (ISSN 0031-0387, DOI 10.4000/pallas.163, lire en ligne, consulté le )
- Pierre Lavedan, Histoire de l'art (2). Moyen âge et temps modernes., Presses universitaires de France,
- Direction du patrimoine et de l'architecture, « La pierre dans le bâti ancien à Nantes »
- Centre France, « Des bijoux d’architecture classique dévoilés par Pascal Piéra », sur www.lamontagne.fr, (consulté le )
- « Architecture classique : les hôtels de l'ancienne Place Royale Calvados Tourisme », sur Calvados Tourisme (consulté le )
- Alexandre Maral et Alexandre Gady (dir.), L'hôtel de la Marine, Bibliothèque de l'école des chartes, (lire en ligne)