Fusion de communes en Suisse

Dans l'État fédéral qu'est la Suisse, la fusion des communes est un phénomène qui s'inscrit dans une historicité différenciée selon les cantons.

Après avoir connu un quadrillage communal stable durant 150 ans, la dynamique des fusions de communes dans le pays, d'abord inégale et confidentielle jusqu'à la fin du XXe siècle, est devenue particulièrement active depuis deux décennies. Alors qu'il comptait 3203 communes en 1848, ce nombre est passé à 2 136 au .

Les fusions suscitent des débats nombreux et variés : capacités financières, considérations identitaires, institutions démocratiques, toponymie de la nouvelle commune….

Principalement motivée par les dispositifs financiers[1] et constitutionnels incitatifs que certains cantons ont mis en place[2], la fusion trouve ses arguments dans la mise en cohérence des politiques publique sur le modèle de la Nouvelle Gestion Publique (NGP), l'inadéquation des territoires[3], la concurrence économique entre les régions, la professionnalisation nécessaire de l'administration communale[4], la lutte contre la crise des vocations politiques municipales[5], ou encore, les économies d'échelle visées par une taille critique à obtenir ou par la mutualisation des moyens techniques[6].

Ces arguments, soutenus par le volontarisme actif des autorités, sont régulièrement contestés par les oppositions locales qui se manifestent plus ou moins ouvertement[7],[8],[9]. Celles-ci répondent en mettant en avant des fusions « imposées d'en-haut »[10], outils favorisant un pouvoir de plus en plus éloigné des citoyens, ou le leurre financier[11] qu'elles représentent et l'imposition d'un modèle de société de plus en plus urbanisé[12].

Il existe trois types de fusions :

  • la fusion simple : deux ou plusieurs communes se dissolvent pour former une nouvelle entité.
  • l'absorption : une commune en assimile une autre qui cesse de fait d'exister.
  • l'absorption partielle : dissolution ou démembrement d'une commune et répartition de l'ancien territoire communal sur deux voire plusieurs communes voisines (ces cas sont toutefois très rares).

Évolution des fusions en Suisse romande

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Au départ autoritaire, mais encore ponctuelle, l'obligation à la fusion de communes a très vite fait place à l'encouragement par la mise en place de lois et d'incitations financières[13] dont le canton de Fribourg a été l'un des pionniers par l'action de son conseiller d'État, Pascal Corminboeuf[14]. Ces incitations sont devenues une constante des politiques cantonales en matière institutionnelle.

Par cantons[15]

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Berne (Jura bernois)

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Dans le canton de Berne, la loi sur l'encouragement des fusions de communes (LFCo) du 25.11.2004 encourage les fusions volontaires de communes municipales et de communes mixtes ainsi que de paroisses par l'octroi d'une aide financière.

En 1952, Tramelan-Dessus et Tramelan-Dessous ont fusionné en Tramelan.

À la suite d'un projet de fusion des six communes de La Heutte, Orvin, Péry, Plagne, Romont et Vauffelin, le nom de Rondchâtel avait été proposé comme nom pour la nouvelle commune, dû à la position géographiquement centrale du village. Le projet a été annulé après le refus en votation populaire de deux des six communes, Orvin et Péry, le .

Toutefois, en février 2013, Vauffelin et Plagne votent pour former Sauge dès le .

Le , les électeurs des communes de Diesse, Lamboing et Prêles votent la fusion de leurs trois communes afin de former la nouvelle commune de Plateau de Diesse dès le également.

Le 9 février 2014, les communes de Loveresse, Reconvilier, Saicourt, Tavannes et Tramelan ont décidé de ne pas créer la nouvelle commune de Trois-Rivières, seul Saicourt avait accepté[16].

Le , les habitants des communes de Péry et La Heutte acceptent la fusion de leurs communes, appelée Péry-La Heutte, effective depuis le .

Fin 2011, six communes du bas de la vallée de Tavannes démarrent une étude sur un projet de fusion : Malleray, Bévilard, Court, Champoz, Pontenet et Sorvilier. Après le retrait de Champoz en 2013, le projet de fusion entre les communes restantes est refusé à la suite du rejet de Court le . Les discussions se poursuivent malgré tout et le , la commune de Sorvilier annonce son retrait du projet de fusion. Un nouveau vote de fusion avec les trois communes restantes (Malleray, Bévilard et Pontenet) est accepté le et la commune de Valbirse devient effective le .

La commune de Petit-Val voit le jour le à la suite de la fusion des anciennes communes de Châtelat, Monible, Sornetan et Souboz.

Le , la commune de Crémines s'est prononcé contre la fusion avec Grandval, Eschert et de Corcelles (fusion acceptée dans ces trois dernières). Aussi, la fusion devant créer la commune Le Grand-Val est rejetée.

Les communes de Cormoret, Courtelary, Renan, Saint-Imier et Sonvilier ont voté le pour former la commune d'Erguël. Saint-Imier, Sonvilier et Cormoret ont voté contre cette fusion et donc la nouvelle commune ne verra pas le jour[17].

Fribourg

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Au sortir des trente glorieuses, le territoire cantonal est atomisé en un chapelet de micro-communes « aux ressources trop modestes pour financer leurs investissements »[18]. Après le rejet par le peuple d'une loi sur les fusions obligatoires, le gouvernement cantonal opte pour les fusions volontaires et intègre des dispositions dans ce sens dans la loi sur les communes en 1980. Encouragé par de premiers succès, le Grand Conseil adopte en 2010 la loi relative à l’Encouragement des Fusions de Communes (LEFC) qui lance véritablement les fusions par l'obligation faite à tous les Préfets de présenter un plan de fusion pour les communes de leur district. Après une vague importante, les candidatures se concentrent aujourd'hui autour de deux pôles, le « Grand-Fribourg » et la Gruyère. La première a été largement refusée en votation populaire le 26 septembre 2021.

Genève

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Historiquement, Genève est le canton ayant connu le plus de scissions de communes, durant le XIXe siècle[19]. À Genève, le processus de fusions n'a pas encore démarré. Une loi sur les fusions a été créée en 2016, mais les incitations contenues dans cette loi sont insuffisantes pour que les communes puissent l'utiliser efficacement[20].

Entré en souveraineté en 1979, le canton du Jura a d'emblée mentionné l’encouragement de la fusion de communes dans sa constitution[21], mais après quelques échecs retentissants (Franches-Montagnes notamment)[22], le processus a plus de peine à se concrétiser que dans d’autres cantons.

En 1882, Ocourt a absorbé Montvoie (à l'époque appartenant encore au canton de Berne).

En 2009, Buix, Courtemaîche et Montignez ont fusionné en Basse-Allaine.

Épauvillers, Épiquerez, Montenol, Montmelon, Ocourt, Saint-Ursanne et Seleute ont fusionné en Clos du Doubs.

Chevenez, Damvant, Réclère et Roche-d'Or ont fusionné en Haute-Ajoie. Rocourt les rejoindra en 2018.

Asuel, Charmoille, Fregiécourt, Miécourt et Pleujouse ont fusionné en La Baroche.

Montfaucon a absorbé Montfavergier.

Muriaux a absorbé Le Peuchapatte.

Saignlégier a absorbé Goumois et Les Pommerats.

En 2013, Fontenais a absorbé Bressaucourt.

Bassecourt, Courfaivre, Glovelier, Soulce et Undervelier ont fusionné en Haute-Sorne.

Montsevelier, Vermes et Vicques ont fusionnée en Val Terbi. Corban les rejoindra en 2018.

En 2019, Courrendlin a absorbé Rebeuvelier et Vellerat.

Neuchâtel

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En matière de fusions de communes, le canton de Neuchâtel est le canton des records. Par le nombre de communes fusionnées (15), Val-de-Ruz détient le record romand de toutes les fusions. Par l'ambition affichée par les autorités en 2013 de diminuer le nombre de communes à 10, Neuchâtel se montre le plus déterminé sur ce point.

Entre 2008 et 2016, le canton de Neuchâtel est passé de 62 communes à 32 communes. En novembre 2016, ce sont les communes de Bevaix, de Saint-Aubin-Sauges, de Gorgier, de Vaumarcus, de Montalchez et Fresens qui ont voté pour fusionner dans une nouvelle commune appelée La Grande Béroche[23]. Cette fusion est entrée en vigueur le . Cela fait suite aux fusions réussies qui ont donné naissance aux communes de Val-de-Travers, de Val-de-Ruz et de Milvignes[23].

Pas moins de 25 projets de fusions ont abouti depuis 2003 dans le canton de Vaud. Il comptait alors 382 communes contre 309 au 1.1.2017. Mais plusieurs décisions négatives sont tombées ces dernières années. On pourrait y voir une volonté de mettre un terme à ce que certains nomment la « fusionite ». Mais après ce coup d'arrêt, les autorités cantonales parlent de relancer les fusions de communes en augmentant l'incitation financière destinée aux candidates[24].

Un des derniers cantons à avoir pris en main sa réforme institutionnelle, le Valais connaît également, depuis la réussite de la fusion des communes du val d'Anniviers, une vague de candidatures à la fusion[25] qui a notamment déjà vu la création de la commune de Crans-Montana[26].

Notes et références

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  1. « Encore 2294 communes en Suisse », sur avenir-suisse.ch, (consulté le ).
  2. Bernard Dafflon (1998), « Les fusions de communes dans le canton de Fribourg. Analyse socio-économique », Annuaire des collectivités locales. Tome 18, pp. 125-166 (en ligne).
  3. Frédéric Giraut, « La refonte du territoire suisse, un particularisme? », Le Temps,‎ (lire en ligne)
  4. « Administration communale », sur andreasladner.ch, 2009 ? (consulté le ).
  5. Yelmarc Roulet, « Crise de vocations politiques (2). Casse-tête à Moudon: personne ne brigue le septième siège de la municipalité », Le Temps,‎ (lire en ligne)
  6. « Réaliser des économies et gagner en efficacité », sur fusion-communes.ch, (consulté le ).
  7. « J'aime Cheserex, la fusion c'est non ! », sur fusion-non.ch, (consulté le ).
  8. Patrick Ferrari, « Un flyer anonyme mais pas de vrai débat sur la fusion entre Veyras, Venthône et Miège », Le Nouvelliste,‎ (lire en ligne)
  9. Bernhard Hugo, « Les fusions de communes ça suffit ! », sur fusionite.ch, (consulté le ).
  10. Bernhard Hugo, Fusion de communes - Le hold-up "parfait", Domdidier, L'Ermitage, , 434 p. (ISBN 978-2-8399-1873-2, lire en ligne), p.93
  11. Samuel Jordan, « L’heure des hausses d’impôts a sonné », La Liberté,‎ (lire en ligne)
  12. Bernhard Hugo, Fusion de communes - Le hold-up "parfait", Domdidier, L'ermitage, , 434 p. (ISBN 978-2-8399-1873-2, lire en ligne), p.161 - 172
  13. Canton de Fribourg - Loi relative à l'encouragement des fusions de communes
  14. François Mauron, « Pascal Corminboeuf, conseiller d'Etat: « En cinq ans, le canton de Fribourg a perdu 77 communes » », Le Temps,‎ (lire en ligne)
  15. « Communes mutées - recherche | Application des communes suisses »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur agvchapp.bfs.admin.ch (consulté le ).
  16. « Bienvenue sur le site de la fusion de Trois-Rivières », sur web.archive.org, (consulté le ).
  17. « Haut-Vallon: il n’y aura pas de commune d’Erguël autour de Saint-Imier ».
  18. Bernhard Hugo, Fusion de communes - Le hold-up "parfait", Domdidier, L'ermitage, , 434 p. (ISBN 978-2-8399-1873-2, lire en ligne), p.51
  19. Jean-François Mabut, « Fusion des communes genevoises: Longchamp consulte », Tribune de Genève,‎ (lire en ligne)
  20. Sami Kanaan, « Les communes genevoises, de la naphtaline ? », sur blogs.letemps.ch, .
  21. Constitution jurassienne Art.112 al.2
  22. « Non massif à la commune unique dans les Franches-Montagnes », sur rts.ch, (consulté le ).
  23. a et b Nouvelle fusion aboutie: à Neuchâtel, La Grande-Béroche marie six communes, Le Temps, 27 novembre 2017
  24. « Le canton de Vaud veut redonner une impulsion aux fusions entre communes », sur rts.ch, (consulté le ).
  25. « Fusion de communes en Valais: une mode ou des mariages de raisons? », sur canal9.ch, (consulté le ).
  26. « Les autorités sont élues », sur fusion-communes.ch, (consulté le ).

Bibliographie

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  • Destrem Lucas, Un état des lieux des noms de communes fusionnées en Suisse, Blog Néotoponymie, 2016 : https://neotopo.hypotheses.org/473
  • Werner Haug, Martin Schuler et Dominik Ullmann (2002), Recensement fédéral de la population 2000. Évolution de la population des communes 1850-2000, Office fédéral de la statistique, Neuchâtel, 145 p.
  • Bernhard Hugo, Fusion de communes – Le hold-up « parfait », Ed. de l’Ermitage, Domdidier (2016), 434 p. (ISBN 978-2-8399-1873-2)

Voir aussi

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Articles connexes

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Liens externes

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