Glose

commentaire linguistique pour expliquer un mot

Une glose est un commentaire linguistique ajouté dans les marges ou entre les lignes d'un texte ou d'un livre, pour expliquer un mot étranger ou dialectal, un terme rare.

Les Glosas Emilianenses sont les premières phrases connues écrites en castillan.

Linguistique

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Le terme vient du grec ancien γλῶσσα / glỗssa, littéralement « langue », qui désigne en fait le terme difficile à expliquer. L'explication elle-même est nommée γλώσσημα / glốssêma. Actuellement, « glose » renvoie à l'explication et non au mot à gloser.

Un glossaire est proprement une « collection de gloses », c'est-à-dire (au sens premier) une liste de définitions explicitant des termes obscurs ou anciens. Le terme glossaire est souvent confondu avec lexique (une indexation de lemmes).

Dans les textes anciens, du fait des altérations dues aux copies successives, il arrive parfois que certaines gloses deviennent indiscernables du texte original. L'analyse historique de ces textes essaie, entre autres, de détecter les gloses en s'appuyant sur la phylogénie des mots utilisés et de la grammaire, ces deux éléments, pour une langue donnée, ayant légèrement varié au cours du temps.

Les gloses sont également utilisées en philologie, lorsque la langue de l'auteur de gloses est mal connue. Leur étude permet alors de mieux connaitre cette langue.

Suivant sa position par rapport au texte principal, la glose peut être dite encadrante, intercalaire, interlinéaire, marginale, continue.

On identifie plusieurs corpus textuels majeurs ayant fait l'objet de gloses dans l'Antiquité et au Moyen-Âge : les gloses linguistiques et grammaticales (par exemple le Liber glossarum), les gloses bibliques : principalement la Glose ordinaire, les gloses théologiques et philosophiques (Gloses sur le corpus Platonicum, glose d'Oxford sur le corpus Aristotélicien, corpus dionysiacum, etc.) et les gloses juridiques (droit romain et droit canonique).

Historique

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Au Moyen Âge, la mise en page glosée se répand dans le contexte du développement des écoles. Elle s'applique principalement à la Bible. Anselme de Laon théologien du XIe siècle, et les maîtres des écoles de théologie du (XIIe siècle), mettent en circulation une version révisée des gloses bibliques antérieures qui prendra à la fin du XIIe siècle le nom de Glossa ordinaria[1]. La Glose biblique a fait l'objet de plusieurs versions et révisions successives, dont les mises en page ont beaucoup varié selon les époques et les choix des copistes, parmi lesquelles :

  • la Media glossatura de Gilbert de la Porrée sur les Psaumes et saint Paul,
  • la Magna glossatura de Pierre Lombard sur les Psaumes et les épîtres de saint Paul, mise au point après sa mort (1160) et diffusée à partir des écoles et bientôt de l'université de Paris,
  • les Postilles sur toute la Bible du dominicain Hugues de Saint-Cher (vers 1240),
  • les Postilles sur toute la Bible du franciscain Nicolas de Lyre (XIVe siècle) associé tardivement, dans les éditions imprimées, à la Glose ordinaire de la Bible.

D'un point de vue de l'histoire du livre, les gloses sont les ancêtres des notes que les imprimeurs ont disposées pendant longtemps dans les marges latérales des textes, avant de passer quasi exclusivement, à la fin de la période moderne seulement, au choix exclusif des notes de bas de page[2].

L'auteur d'une glose est un « glossateur ». Dans le langage courant, en référence à l'excès de gloses dans certains textes, le verbe « gloser » en est venu à signifier aujourd'hui : ajouter des commentaires superflus, voire malveillants. On parle alors d'un « gloseur ».

Forme poétique

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Une glose est aussi un poème qui parodie un autre poème très connu à raison d'un vers parodié par strophe. Elle fut introduite en France avec Anne d’Autriche et les Espagnols. Elle ne s’est jamais bien acclimatée en France. Il n’y en a guère qu’une qui soit bien connue, celle de Sarrazin sur le Sonnet de Job, de Benserade, voir querelle des jobelins et des uranistes. Il est en strophe de 4 vers et en contient autant qu’il y a de vers dans le poème glosé. Chacun de ces vers constitue, à son rang, le quatrième vers de chacune des strophes de la glose.

Un exemple de glose composée de la sorte peut se lire au chapitre 18 de Don Quichotte, tome 2[3]. Don Lorenzo de Miranda dit : "(...) mais maintenant, que Votre Grâce veuille bien écouter les vers glosés et la glose. Les voici : (...)". Suivent 4 vers glosés formés, chacun, du dernier vers de chacun de quatre quatrains.

D'autres auteurs, moins connus, se sont essayés à ce type de poème, tel Victoire Babois, dans La Retraite, à partir d'un quatrain dont l'auteur ne nous est pas communiqué.

Notes et références

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  1. C'est par erreur que les éditions imprimées ont attribué la rédaction de la Glose de la Bible au moine bénédictin Walafrid Strabon du IXe siècle dont les commentaires bibliques sont cités dans le Glose ordinaire
  2. Pour un essai d'interprétation historique de cette évolution, peu au fait de l'histoire médiévale de la Glose, voir Élisabeth Eisenstein, La Révolution de l’imprimé dans l’Europe des premiers temps modernes, Paris, Éditions La Découverte, 1991, p. 62 qui estime que la fonction du commentaire n’aurait plus été d’alimenter la réflexion sur le texte mais d’offrir des pistes d’élargissement de la lecture, évolution dans laquelle Diderot aurait joué un rôle central.
  3. Miguel de Cervantes (trad. Louis Viardot), Don Quichotte, France, Maxi-poche, Collection Classiques étrangers, Tome 2, , 698 p. (ISBN 2-87714- 317-1), p. 177

Bibliographie

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Textes avec gloses

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Études sur la glose

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  • Jacques Demarcq, « L’espace de la page, entre vide et plein », L’Aventure des écritures. La page, Anne Zali (dir.), Paris, BNF, 1999, p. 65-103 (ISBN 978-2717720723).

Voir aussi

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Articles connexes

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Liens externes

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