Jean-Louis Loubère
Jean-Louis Loubère, né le à Riguepeu dans le Gers et mort le dans le 8e arrondissement de Paris, est un officier et administrateur colonial français, gouverneur de la Guyane française de 1870 à 1877. Il est surtout connu pour les nombreuses améliorations qu'il a apportées à cette colonie, notamment par l'exploitation de la main-d'œuvre bagnarde.
Gouverneur de Guyane | |
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- | |
Naissance | |
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Décès | |
Sépulture | |
Surnom |
« Colonel Loubère » « Gouverneur Loubère » |
Nationalité |
Français |
Allégeance | |
Activité |
Administrateur colonial Militaire Président de la Société de géographie de Tours Président de l'Union Géographique du Centre |
Famille |
Loubère (de Longpré) |
Conjoint |
Marie Masson de Longpré |
Enfants |
Religion | |
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Arme | |
Grade militaire | |
Conflit | |
Distinctions |
Biographie
modifierFamille et origines
modifierJean-Louis Loubère est né le à Riguepeu[1], de l'union de Pierre Barthélémy Loubère et d'Anne Lajus Laplantades. Son père, chevalier de la Légion d'Honneur, est gendarme à la compagnie de gendarmerie des Hautes-Pyrénées[2] puis officier pendant les Cent-Jours.
Il épouse Marie Masson de Longpré[3] en 1860 à Paris, mariage dont il a quatre enfants. Son aînée, Louise (1862-1939), épouse Antoine Léonor de Perier[3], colonel d'infanterie, dont le général Pierre-Étienne de Perier. Paul (1865-1891), sous-lieutenant est tué en 1891 près de Lang Son, au Tonkin[4],[5]. Eugène (1867-1914), capitaine d'infanterie, chevalier de la Légion d'honneur et Croix de guerre 14-18 avec palme, est tué en 1914 dans les Ardennes. Sa cadette, Berthe-Charlotte (née en 1881), épouse James Saint John Platford-Raby en 1910[6]. Elle et son mari deviennent collectionneurs d'art[7].
Le , il obtient l'autorisation d'ajouter le nom de sa femme « Masson de Longpré » à son patronyme, qui devient donc « Loubère Masson de Longpré » à l'état civil[8].
Le colonel Loubère habite le château d'Azay-sur-Indre[9].
Carrière militaire (1820-1870)
modifierLa carrière militaire de Jean-Louis Loubère se déroule dans l'infanterie de marine, arme pour laquelle il témoignera d'un attachement tout particulier[10].
Enrôlé dans l'armée en 1841, il est promu sous-lieutenant en 1844, lieutenant en 1846, capitaine en 1853 et chef de bataillon en 1857.
Le colonel Loubère est fait chevalier de la Légion d'honneur en 1854, officier en 1859[11].
Il accomplit l'essentiel de sa carrière outre-mer, en Indochine et en Guyane française.
Après avoir participé à la colonisation de la Cochinchine, il sert comme officier d'ordonnance du gouverneur de la Guyane[12], puis devient directeur des pénitenciers de la colonie en 1860[13].
Promu lieutenant-colonel, Loubère retourne en Cochinchine de 1862 à 1866 en tant que commandant de la province de Bien-Hoa[14]. En décembre 1862, Loubère et les autres commandants locaux répriment une insurrection menée par le mandarin Quan-Dinh qui s'étend à travers toute la Cochinchine[15]. En 1864 il s'y distingue à nouveau en repoussant des brigands et insurgés contestataires de la domination française[16] tout en faisant un millier de prisonniers[17].
Alors qu'il se trouve toujours en Cochinchine, Loubère aide Biên Hòa à obtenir des pierres pour la construction de l'orphelinat de Saigon[18].
Le , Loubère se voit confier le commandement du 1er RIMa en Martinique sous le gouverneur Charles Bertier[19].
Nommé colonel le 1er janvier 1869, il devient chef de corps du 2e RIMa, fonction qu'il occupe de 1869 à 1870[19].
Gouverneur de la Guyane française (1870-1877)
modifierEn avril 1870, le gouverneur de Guyane Agathon Hennique est emporté par une crise d'apoplexie. De ce fait, le 30 avril Loubère accède aux fonctions de gouverneur de la Guyane française, d'abord en tant qu'intérimaire puis en tant que gouverneur en titre à compter du mois de mai 1871[20].
Dans la mesure où, contrairement à l'Océanie et en Cochinchine, les problèmes de pacification ne se posent pas, le nouveau gouverneur peut se consacrer entièrement au rôle d'administrateur colonial[21].
Rapidement, il se positionne donc en grand bâtisseur, en dotant Cayenne de routes empierrées, de ponts, d'édifices publics, d'égouts ou encore d'une caserne en pierre[22]. Tant de constructions qui étaient encore intactes à la fin de la Seconde Guerre mondiale[22]. On lui doit aussi les travaux d'adduction d'eaux qui alimentent la ville[23].
Simultanément, les premiers moyens de transmission radio y apparaissent avec la pose d'un câble télégraphique[24].
Parmi ses accomplissements guyanais on compte la création d'écoles, l'amélioration des cultures locales, l'optimisation des rendements du bétail par la sélection et l'introduction de l'eucalyptus[22],[25]. Pour encourager l'agriculture, Loubère décide notamment la reprise des concours agricoles[26]. Aussi, il fait venir de métropole divers espèces d'animaux pouvant résister au climat : poules, canards, oies et faisans[27].
Face à un important manque de main d'oeuvre[28], le gouverneur utilise les bagnards transportés en Guyane pour œuvrer à l'amélioration des communications routières de la colonie. Jugeant un jour l'avancement d'une route trop lent à son goût, Loubère ordonne au directeur de la pénitentiaire d'envoyer le lendemain cent condamnés : « Je serai là, lui dit-il, à sept heures du matin et s'il manque un condamné, vous ferez le centième »[21].
Il améliore ainsi la route de Rémire menant à l'estuaire du Mahury par la côte et la route de la Madeleine menant au Mahury par la montagne du Tigre, qui n'étaient jusqu'alors que des chemins poussiéreux. Il construit par ailleurs des routes allant de Cayenne à l'Oyapock, à Kaw et à l'Approuague, et le long de la côte ; de Cayenne au Maroni[29].
En 1873, il est fait commandeur de la Légion d'honneur[1]. Le de cette même année, Loubère rouvre les portes de l'École des Arts et Métiers de Cayenne[30].
À ce titre, Jules Crevaux parle de Loubère en ces termes[31] :
Le colonel Loubère, en effet, n'était pas seulement un militaire. Il savait s'attacher à tout ce qui constitue l'instruction et il aidait avec passion à la développer.
Par arrêté du , Loubère est nommé officier de l'Instruction publique[32],[33].
L'écrivain Paul Bonnetain qui sert à ce moment sous les ordres du colonel parvient à entrer au Figaro grâce à sa recommandation[34].
Le , le gouverneur Loubère part en convalescence pour la France[30]. Jacques Eugène Barnabè Ruillier assure son intérim du au . Le , alors qu'il est encore gouverneur titulaire, Loubère accorde la gratuité de l'enseignement pour toutes les écoles primaires de Guyane[30]. Par la suite, Alexandre Eugène Bouët est gouverneur par intérim du au , date à laquelle Loubère est officiellement remplacé en sa qualité de titulaire par Marie Alfred-Armand Huart[35].
À son départ, il laisse la colonie avec plus de 1 600 000 francs de recettes au lieu des 800 000 francs qu'elle réalisait en 1870, sous Agathon Hennique[30].
Bien que très autoritaire, Loubère laisse en Guyane le souvenir d'un grand bâtisseur[36] et son administration aura coïncidé avec une période de ferveur religieuse importante[37].
Dernières années (1877-1893)
modifierDe retour en France métropolitaine, Loubère commande le 4e RIMa de Toulon en 1880[10].
Le , il est nommé président de la Société de Géographie de Tours et de l'Union Géographique du Centre[9].
Son fils aîné, le sous-lieutenant Paul Loubère meurt dans la région du Yenthe, au Tonkin, en fin 1890[10].
Affaibli par la maladie[9], le gouverneur Loubère meurt le dans son appartement rue du Havre (Paris 8e)[38]. Il est inhumé dans la chapelle du château d'Azay-sur-Indre.
En 1895, deux ans après son décès, la Société de Géographie de Tours dit de lui[39] :
Nous avons tous gardé un vif souvenir de notre Président, le colonel Loubère, ancien gouverneur de la Guyane. Le colonel a laissé une trace profonde de son passage dans cette colonie d'Amérique trop négligée par la France.
Postérité
modifier- En 1820 est construite à Cayenne celle qui prendra le nom de « caserne Loubère »[40], du nom du colonel Jean-Louis Loubère[41], gouverneur de la Guyane pendant 7 ans. Elle est un temps le collège et l'école communale des garçons[42], puis le siège du 9e RIMa[43]. Sous le régime de Vichy, cette caserne est rebaptisée « Quartier Maréchal Pétain »[44].
- Construit sur les chantiers navals de Bordeaux, un bateau à vapeur chargé du remorquage sur les côtes de Guyane a été nommé « Colonel Loubère » par le gouvernement français, en hommage à ce personnage[39].
Grades militaires
modifier- Sergent (1842)
- Sous-lieutenant (10 novembre 1844)
- Lieutenant (10 novembre 1846)
- Capitaine (2 juillet 1853)
- Chef de bataillon (17 octobre 1857)
- Lieutenant-colonel (25 juin 1862)
- Colonel (1er janvier 1869)
Distinctions et décorations
modifierDécorations françaises
modifier- Commandeur de la Légion d'honneur (1873)[1]
- Officier de l'ordre des Palmes académiques (31 mai 1874)[33]
Décorations étrangères
modifierGalerie
modifierQuelques portraits du colonel Jean-Louis Loubère.
Notes et références
modifier- Ministère de la Culture, « Dossier : LH/1663/3 », sur Base Léonore (consulté le )
- Bulletin des lois de la République Française: Partie Principale, (lire en ligne), p. 716
- M. Borel d'Hauterive, Annuaire de la noblesse de France et des maisons souveraines de l'Europe, vol. 43, Paris, Typographie de E. Plon, (lire en ligne), p. 248
- Revue historique de l'Armée, vol. 23, Ministère des Armées, (lire en ligne), p. 160
- Indre-et-Loire, France (Department). Archives départementales. Service éducatif, La Touraine et les Tourangeaux de Louis XV à Napoléon III, (lire en ligne), p. 21
- « Avis mondains », Le Figaro, no 26, (lire en ligne)
- Grande semaine de Tours, A la gloire du vin : reconstitution de caves en Touraine, exposition d'oeuvres et objets d'art, de documents sur la vigne et le vin... / Grande semaine de Tours (10-18 mai 1930), exposition rétrospective et moderne, Tours, (lire en ligne)
- M. Borel d'Hauterive, Annuaire de la noblesse de France et des maisons souveraines de l'Europe, volume 19, (lire en ligne), p. 310
- Société géographique de Tours, Revue, volumes 2-4, (lire en ligne), p. 38 et 117
- Service historique des armées : volume 23, Revue historique de l'armée, Ministère des armées, (lire en ligne), p. 160
- Bulletin officiel de l'Algérie et des colonies, 1860, volume 2, p.286.
- Almanach impérial, 1858, p.881.
- Annuaire de la marine, 1860, p.168.
- Henry de Poyen-Bellisle, Notice sur l'artillerie de la marine en Cochinchine, (lire en ligne), p. 103
- Boüinais, Albert Marie Aristide; Paulus, A., La Cochinchine contemporaine, Challamel Ainé, (lire en ligne), p. 26
- Notices sur les colonies françaises, 1866, p.548.
- Victor Nicolas, Le livre d'or de l'infanterie de marine : Volume 2, H. Charles-Lavauzelle, (lire en ligne), Page 71
- Miche, Vicaire apost., Cochinchine Occidentale, Annales de l'Oeuvre de la Sainte Enfance, (lire en ligne)
- Jean-Claude Degras, De la monarchie à la France libre : Destins d'officiers et de soldats Français de la Caraïbe, Iggybook, , 374 p. (lire en ligne)
- Paul Mury, Les Jésuites à Cayenne, (lire en ligne), p. 239
- Académie des sciences d'outre-mer, Hommes et destins, dictionnaire biographique d'outre-mer : volumes 7-8, Académie des sciences d'outre-mer, (lire en ligne), p. 265 et suivantes
- Serge Psalmon, Hélices, Tuyères et Palétuviers (lire en ligne), p. 197
- Patrice Mouren-Lascaux, La Guyane, Karthala, , 208 p. (lire en ligne)
- Jean Mercier, L'armée française et la Guyane, Ibis Rouge, (lire en ligne), p. 269
- Société d'Acclimatation, Société d'Acclimatation, Volume 1, (lire en ligne)
- Bernard Quris, Fascinante Guyane, , 520 p. (lire en ligne)
- La Terre et la vie, Société nationale de protection de la nature et d'acclimatation de France, (lire en ligne), p. 130
- Serge Mam-Lam-Fouck, Histoire de la société guyanaise : Les Années cruciales (1848-1946), Éditions Caribéennes, , 240 p. (lire en ligne)
- Richard Henry, Notice Historique sur La Guyane Francaise, Paris, Union des Arts Graphiques,
- Michel Lohier, Les grandes étapes de l'histoire de la Guyane française : aperçu chronologique 1498-1968, (lire en ligne)
- Raoul-Blaise de Saint-Arroman, Les missions françaises: causeries géographiques, (lire en ligne), p. 214
- Institut pédagogique national, Belletin bibliographique volume 17, , Page 352 (lire en ligne), Page 352
- Recueil des lois et actes de l'instruction publique, Delalain (lire en ligne), p. 207
- Paul Bonnetain, Au Tonkin, L'Harmattan, (lire en ligne)
- (en) Ben Cahoun, « Frenc Guiana », sur World Statesmen (consulté le )
- La Revue Scientifique : Volume 33, Paris, (lire en ligne), Page 757 notamment
- Société d'histoire de la Guadeloupe, Bulletin de la Société d'histoire de la Guadeloupe : numéros 132 - 136, Archives départementales, (lire en ligne), p. 39
- Archives de Paris, État-civil numérisé du 8e arrondissement de Paris, année 1893, acte de décès no 2171.
- Union géographique du centre, Revue : deuxième semestre 1895, Société de géographie de Tours, (lire en ligne), p. 4
- Ministère de la culture, « Caserne Loubère », sur POP : La plateforme ouverte du patrimoine, (consulté le )
- France-Guyane, « La caserne Loubère ouvre ses portes », France-Guyane, (lire en ligne)
- Rodolphe Alexandre, La révolte des tirailleurs sénégalais, L'Harmattan, , 160 p. (lire en ligne), p. 18
- Qui fait quoi, (lire en ligne), p. 20
- Rodolphe Alexandre, De Pétain à de Gaulle: la Guyane sous Vichy, 1940-1943, ANNE. C, , p. 39
- Annuaire de la Guyane française, Cayenne, (lire en ligne), p. 83
- Almanach national, (lire en ligne), p. 514
Bibliographie
modifierPrincipaux ouvrages
modifier- Hommes et destins, dictionnaire biographique d'outre-mer : Volumes 7-8, Académie des sciences d'outre-mer, (lire en ligne), p. 265 et suivantes.
- Union géographique du centre, Revue : deuxième semestre 1895, Société de géographie de Tours, 1895, Page 4
- La Revue Scientifique : Volume 33, Paris, 1884, Page 757 notamment
Principaux articles
modifierVoir Aussi
modifierArticles connexes
modifierLiens externes
modifier
- Ressource relative à la vie publique :
- Dossier de Légion d'honneur du colonel Loubère dans la base Léonore