Kavadh Ier (ou Qobad, Kobad, Kabad, Kawad, Cavade[1]), né vers 449, et mort le , est un roi sassanide d'Iran ayant régné de 488 à 496 et de 499 à 531.

Kavadh Ier
Illustration.
Plat d'apparat du règne de Kavadh Ier.
Titre
Empereur sassanide

(8 ans)
Prédécesseur Valash
Successeur Zamasp

(32 ans)
Prédécesseur Zamasp
Successeur Khosro Ier
Biographie
Dynastie Sassanides
Date de décès
Père Péroz Ier
Conjoint Sœur-épouse, Niwandokht
Enfants Ka'us, Zamasp, Xerxès, Khosro Ier

Origine

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Premier règne

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Kavadh arrive sur le trône en 488, alors âgé de seulement quinze ans. Sa jeunesse est mise en exergue sur ses monnaies, qui le montrent avec une faible pilosité. Il doit composer avec une aristocratie et un clergé très influents, qui se comportent en faiseurs de rois, comme en témoigne la déposition de Valash. L'Empire sassanide traverse alors une période compliquée. Économiquement, il souffre de sécheresse et de famines, tandis qu'il subit la pression des Hephtalites sur ses frontières orientales. Les Sassanides doivent payer des tributs élevés pour se préserver de leurs raids, ce qui pèse sur les finances impériales. En outre, des rébellions éclatent dans les provinces occidentales, notamment en Arménie et en Ibérie.

Lors des cinq premières années de son règne, Kavadh vit sous la régence de Sukhra, qui est le véritable dirigeant de l'Empire. Al-Tabari écrit ainsi qu'il gère pleinement les affaires de l'Empire et que le peuple s'adresse à lui pour ses doléances, tandis que Kavadh est vu comme une personne de peu d'importance. Ainsi, les provinces paient leur tribut à Sukhra plutôt qu'à Kavadh et c'est le premier qui contrôle le trésor et l'armée. Cependant, en 493, Kavadh veut mettre un terme à cette prédominance et il le fait exiler dans la région de Chiraz, où il continue à exercer son influence. Il se vante notamment d'avoir mis Kavadh sur le trône.

Craignant une révolte de sa part, Kavadh décide de s'en débarrasser mais il manque de moyens. En effet, l'armée reste sous le contrôle de Sukhra. Pour le contourner, il fait appel à Chahpouhr de Reyy, membre de la maison de Mihran, l'une de sept maisons impériales des Sassanides. Farouche opposant à Sukhra, il se met à la tête d'une armée à sa solde et marche sur Chiraz où il défait les forces de Sukhra avant de le faire prisonnier et de le ramener sur Ctésiphon. Considéré comme trop puissant et dangereux pour être gardé en vie, il est finalement exécuté, ce qui est mal perçu par toute une partie de la noblesse. La maison de Karen-Pahlav est notamment exilée dans les régions du Tabaristan et du Zaboulistan en raison de leurs accointances avec le défunt régent.

Peu après l'exécution de Sukhra, un prêtre zoroastrien du nom de Mazdak attire l'attention du shah. Il est alors le principal représentant du mouvement religieux et philosophie du mazdakisme. Au-delà d'un programme spirituel, ce mouvement appelle à des réformes politiques et sociales avec un impact fort sur la noblesse et le clergé. Opposés à la violence, ses partisans demandent un meilleur partage des richesses et des propriétés. Selon les historiens Touraj Daryaee et Matthew Capena, le principe parfois souligné d'un plus grand partage des femmes est probablement une interprétation exagérée du fait qu'il soutient un décret facilitant le mariage des membres des couches plus pauvres. Cependant, les familles les plus puissantes estiment que l'affaiblissement des exigences pour la conclusion d'un mariage est surtout un moyen d'affaiblir leurs lignées. Pour Kavadh, c'est aussi une arme pour réduire l'influence des puissants. Les stocks des greniers royaux sont alors distribués, de même que des terres sont concédées aux paysans les plus pauvres.

L'historicité de Mazdak a parfois été mise en doute et il pourrait avoir été inventé pour détourner les critiques de Kavadh. Des historiens contemporains comme Procope de Césarée et Josué le Stylite n'en parlent pas du tout et font de Kavadh le chef de file du mouvement. Ce sont dans des textes ultérieurs d'auteurs zoroastriens que Mazdak apparaît, en particulier dans le Bundahishn ou le Denkard. Dans les sources islamiques, notamment al-Tabari, Mazdak est aussi mentionné mais ces textes pourraient avoir été influencés par la tradition orale iranienne, qui aurait fait de Mazdak le vrai coupable de ce mouvement déstabilisateur qui frappe la Perse à la fin du Ve siècle. D'autres figures historiques iraniennes sont blâmées pour cela, comme Gaumata sous Cyrus le Grand ou Wahnam dans l'inscription de Paikuli du shah Narseh (293-302). Quoi qu'il en soit, la noblesse réagit et dépose Kavadh en 496, pour mettre sur le trône son frère Zamasp. Kavadh, rendu aussi coupable de la mort de Sukhra, est enfermé dans la forteresse de l'Oubli.

Emprisonnement, fuite et retour sur le trône

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Les notables de l'Empire se réunissent rapidement pour décider quoi faire de Khavad. Gushnaspdad, membre d'une importante famille de propriétaires terriens, propose de le faire exécuter. Toutefois, c'est finalement l'emprisonnement qui l'emporte, ce qui explique qu'il soit enfermé dans la prison de l'Oubli dans le Khouzestan. Selon Procope, la femme de Khavad approche le chef de cette prison et ils parviennent à un accord pour qu'elle puisse voir son époux en échange d'une nuit avec lui. Siyawush, l'un des proches de Khavad, planifie rapidement son évasion en préparant des chevaux près de la prison. Khavad change ses vêtements avec ceux de sa femme et parvient à s'échapper.

Le récit d'Al-Tabari diffère. Il affirme que c'est la sœur de Khavad qui l'aide à s'enfuir en le roulant dans un tapis dont elle fait croire ensuite au gardien qu'il est tâché de ses menstruations. Il la croit et se dispense de le contrôler. Pour l'historien John Martindale, cette femme serait en réalité Sambice, la femme-sœur de Khavad et la mère de son fils aîné, Kawus. Quoi qu'il en soit, Khavad parvient effectivement à s'échapper et rejoint la cour des Hephtalites. Toujours selon les sources d'Al-Tabari, il aurait rencontré sur son chemin une paysanne de Nishapur, nommée Niwandukht, qui aurait ensuite donné naissance au futur Khosro Ier. Toutefois, les historiens reconnaissent généralement cette histoire comme une fable et la mère de Khosro serait une noble de la Maison des Ispahbodhan. Parmi les Hephtalites, Khavad gagne rapidement le soutien de leur roi pour récupérer son trône.

Quand il réside chez les Hephtalites, il assiste à la montée en puissance de ces derniers face à leurs rivaux, les Kidarites. La région de Qubodiyon (Kavadian), près de Balkh, pourrait avoir été concédée à Kavadh qui l'aurait développée. En 498 ou 499, Kavadh revient en Iran avec une armée hephtalite. Sur son chemin, il rencontre Adhurgunbadh, qui accepte de l'aider, de même que Zarmir Karen, un des fils de Sukhra.

Rapidement, Jamasp et la haute aristocratie, ainsi que le clergé, préfèrent ne pas résister. Ils conviennent d'un accord qui leur assure de ne pas subir de représailles. Jamasp pourrait malgré tout avoir été aveuglé et certains dignitaires, comme Gushnaspad, sont exécutés. Adhurgunbadh est nommé à la tête du Kanarangiyan tandis que Siyawush devient le général en chef de l'armée. Un autre fils de Sukhra, Bozorgmehr, est fait ministre de Kavadh (Wuzurg framadar).

Politique intérieure

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pièce de monnaie de Kavadh Ier pendant son deuxième règne

Durant son deuxième règne, Kavadh se distingue par ses réformes intérieures, qu'il peut mener grâce à l'affaiblissement de la noblesse et de la caste des mages. Complétées par son fils, Khosro Ier, elles visent à renforcer un Empire affaibli. Une réforme fiscale est conduite avec la mise en place d'un impôt type poll tax ainsi qu'un recensement des propriétés pour rendre plus juste le prélèvement fiscal. L'Empire est divisé en quatre régions chacune dotée d'une commandement militaire (spahbed) tandis qu'une administration est dédiée à l'équipement militaire. Ce système remplace celui de l'ehran-spahbed, le général en chef de l'armée qui tendait à être trop influent. Un nouvel office est aussi créé, celui d'avocat et juge des pauvres (driyōšān jādag-gōw ud dādwar) dont la fonction est de soutenir le clergé dans sa mission d'assistance aux plus démunis, souvent laissée de côté.

Sous le règne de Kavadh, la classe des dehqan, les petits propriétaires terriens, gagne en influence. Ils en viennent à former un corps de cavalerie spécifique, dirigé par le shah en personne et doté d'une solde régulière. L'objectif est alors d'affaiblir la traditionnelle cavalerie parthe. Des régiments étrangers sont aussi enrôlés, notamment des Hephtalites, des Arabes et des Daylamites. L'armée sassanide sort renforcée de ces évolutions, avec des résultats substantiels à venir sur la frontière occidentale, face à l'Empire byzantin mais aussi en Orient face aux Hephtalites.

L'effet pervers de ces réformes est de distendre les liens entre la couronne impériale et les plus puissantes maisons aristocratiques, soutiens traditionnels du régime sassanide. Sous les règnes à venir d'Hormizd IV et de Khosro II, cela se traduit par une contestation grandissante du pouvoir impérial par des membres de ces grandes familles, en particulier Bahram Chobin, qui vont jusqu'à revendiquer le trône.

Politique extérieure

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Après le refus en 502 des Grecs de payer leur contribution annuelle destinée à la défense des « Portes de la Caspienne » et l'édification près de Nisibis d'une nouvelle cité nommée Dara, la première campagne de Kavadh Ier contre l'Empire byzantin à partir de 503-505 met fin au traité de paix de 50 ans conclu entre Yazdgard Ier et Théodose II en 440.

Il obtient quelques succès contre l’empereur Anastase en Arménie en s'emparant de Théodosiopolis () et en Mésopotamie en prenant Amida le , reprise par les Byzantins dès 504.

Mais son empire doit subir les attaques des Khazars, implantés entre le Don et la Volga, qui passent le Caucase et ravagent l'Ibérie, le nord de l'Arménie et l'Albanie du Caucase ; Kavadh Ier doit conclure dès 506 une trêve de 7 ans[2]. Au cours d'une seconde campagne contre les Byzantins en 527/531, il est battu par Bélisaire, général de Justinien lors de la bataille de Dara. Les Grecs vaincus à Callinicum le ne peuvent prendre Nisibis mais obligent Kavadh Ier à demander la paix[3].

Il meurt le [4], âgé d'environ 82 ans. Sur son lit de mort, il convoque sa famille, les nobles et les modeds (dignitaires religieux) et désigne en leur présence comme successeur son troisième fils Khosro au détriment des deux aînés.

Union et postérité

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La première sœur-épouse anonyme de Kavadh Ier l'aida, en séduisant le gardien, à s'échapper de la prison de l’« Oubli » où les nobles l'avaient emprisonné lors de sa déposition[5]. Elle fut sans doute la mère de trois de ses fils : Ka'us, Zamasp († 532) et Xerxès. Pendant son exil chez les Hephtalites, Kavadh épouse sa nièce Niwandokht, fille de leur roi et de la princesse Pérôzdokht[6].

Enfin, son successeur Khosro serait selon Tabari le fils d'une paysanne[7], ou plus vraisemblablement selon Parvanneh Pourshariati le fils d'une sœur anonyme de l'aspebedes[8] Bawi ou Bāu (?) († vers 532), un membre de la famille féodale parthe des Ispahbudhān qui règne de facto sur le Khorassan[9].

Le fils ainé de Kavadh Ier, Ka'us († vers 530/537), est le grand-père de Bâv ou Baun, prince d'une partie du Mazandaran (655-679) à l'origine de la dynastie locale des Bawandides qui, après avoir adopté l’islam, règne de 665 à 1349[10].

Voir aussi

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Notes et références

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  1. Procope de Césarée, « Histoire de la guerre contre les Perses, Livre I. (IX, 6 et X, 4) ».
  2. René Grousset, L'Empire du Levant : Histoire de la Question d'Orient, Paris, Payot, coll. « Bibliothèque historique », (réimpr. 1979), 648 p. (ISBN 978-2-228-12530-7), p. 80.
  3. Huart et Delaporte 1952, p. 352-354.
  4. Grumel 1958, p. 376.
  5. Tabari, Chronique, volume II, chapitre XXIX, p. 150-151.
  6. Huart et Delaporte 1952, p. 353.
  7. Tabari, Chronique, volume II, chapitre XXVII, p. 145-146.
  8. « Généralissime », antique titre de commandant en chef des armées parthes déjà utilisé à la cour des rois arsacides.
  9. (en) Parvaneh Pourshariati, Decline and fall of the Sasanian Empire, I. B. Tauris & Co Ltd, New York, 2011 (ISBN 9781845116453), « Genealogical tree », p. 471.
  10. Anthony Stokvis, Manuel d'histoire, de généalogie et de chronologie de tous les États du globe, depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, préf. H. F. Wijnman, éditions Brill Leyde, réédition Israël, 1966, chapitre VIII, tableau généalogique no 3, « Généalogie des Sassanides », p. 112.

Bibliographie

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Liens externes

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