Olivier Christin
Olivier Christin, né le à Sannois (Val-d'Oise), est un historien moderniste français, spécialiste de l'histoire religieuse et politique. Il est professeur d'histoire moderne à l'université de Neuchâtel[1] et directeur d’études à l’École pratique des hautes études (EPHE)[2].
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Les Réformes : Luther, Calvin et les protestants (d) |
Biographie
modifierIl est le fils de Pierre Christin, écrivain et scénariste de bande dessinée, et de Rosine Christin, sociologue.
Ancien élève de l'École normale supérieure de Saint-Cloud (1980 L)[3], Olivier Christin est agrégé d'histoire en 1983.
En 1989, il soutient, à l'université Paris-X Nanterre, sous la direction de Marc Venard, sa thèse d'histoire intitulée "Iconoclasme et culte des images au XVIe siècle" (2 volumes)[4].
Il est maître de conférences à l'université Nancy-II, directeur adjoint de l'Institut historique français de Göttingen, puis membre de l'Institut universitaire de France de 1999 à 2004. Depuis octobre 2003, il est directeur d'études à l'École pratique des hautes études, section des Sciences religieuses.
Professeur des universités à l'université Lumière Lyon-II jusqu'en , et président de cette université de 2008 à 2009, il est nommé professeur ordinaire en histoire moderne à l'université de Neuchâtel en 2010.
Il a été directeur du Centre européen des études républicaines (CEDRE) de 2016 à 2021.
Domaines de recherche
modifierLes recherches d'Olivier Christin portent sur les enjeux tant religieux que politiques des affrontements confessionnels aux XVIe – XVIIe siècles, qu’il analyse en vue de montrer par quelles pratiques et suivant quels schémas de pensée les contemporains tentent de répondre à ce bouleversement du monde social. Soucieux de montrer la diversité des expériences et leur irréductibilité à un modèle unique, il travaille sur des objets issus aussi bien du royaume de France et de la Confédération suisse que du Saint-Empire romain germanique. Depuis quelques années, il s'intéresse aussi à l'histoire des républicanismes, aux doctrines républicaines et aux pratiques politiques qu'elles inspirent[5].
Accordant une place importante aux images comme source et objet d’histoire, Olivier Christin a étudié les manifestations de l’iconoclasme protestant dans lequel il voit une « révolution symbolique » qui, loin de n’être qu’une manifestation de vandalisme, participe de la constitution des identités confessionnelles, oblige les acteurs à produire de nouveaux discours de légitimation et transforme profondément l’art religieux[6]. Il s’est aussi intéressé à l’iconographie luthérienne des Dix commandements[7] et aux démonstrations savantes de l'efficacité des images miraculeuses par les auteurs de la Compagnie de Jésus. Avec Nicolas Balzamo et Fabrice Flückiger, il a proposé la première édition critique de la plus citée des topographies sacrées traitant des images de Marie, l’Atlas marianus du père jésuite Wilhelm Gumppenberg[8].
Dans son livre sur La paix de religion, prenant le contre-pied de l’interprétation des divergences confessionnelles comme longue suite d’affrontements sanglants, Olivier Christin a montré comment les acteurs s’efforcent de restaurer la paix en organisant la coexistence religieuse à travers l’invention de nouvelles formes d’appartenance à la communauté détachées de l’unité de la foi et fondées sur l’autonomisation de la raison politique[9]. Ses recherches portent aussi sur l’histoire du vote avant le suffrage universel, dont il a retracé les avatars au sein des conseils de villes, des universités et monastères ou lors de l’élection du Pape. Dans Vox Populi (2014), il décrit les modalités du vote lors de l'élection d'un magistrat vertueux ou pour choisir un prélat digne de sa fonction aux yeux de Dieu ; il dévoile aussi les stratégies de reproduction des élites dont le vote est souvent l'instrument[10]. Dans la continuité de cet ouvrage, il a initié un projet de recherche sur la transformation des pratiques de la décision collective engendrée par la division religieuse à l’époque moderne dans la Confédération suisse au XVIe siècle[11].
Proche de Pierre Bourdieu, avec qui il a travaillé de nombreuses années, Olivier Christin anime aussi un réseau de recherche consacré à l’historicisation réflexive des concepts historiques, en vue de sensibiliser chercheurs et chercheuses aux enjeux propres à la circulation des mots entre les disciplines et les traditions linguistiques. Les premiers résultats ont fait l’objet d’un Dictionnaire des concepts nomades en sciences humaines[12].
Engagement politique
modifierEn 2016, il a fondé le Centre européen des études républicaines (CEDRE), qu'il a dirigé jusqu'en 2021. Rattaché à l'université Paris Sciences et Lettres, ce centre de recherche avait pour vocation d'étudier « les théories de la République, l’histoire des idées et des doctrines républicaines, les pratiques politiques spécifiques à l’œuvre dans les systèmes républicains, l’histoire des expériences politiques républicaines »[13]. Revendiquant une approche résolument interdisciplinaire et transnationale, le CEDRE a servi de plate-forme d'échange aux chercheurs et chercheuses issus de divers pays et traditions académiques afin de décloisonner l'approche de l'histoire des républicanismes et sortir du seul modèle français.
Le 3 mai 2022, une enquête conjointe du quotidien suisse ArcInfo et du journal en ligne Mediapart fait état de soupçons de fraude à l’encontre d’Olivier Christin[14],[15]. Celui-ci aurait utilisé de l'argent public suisse destiné à la recherche pour financer des activités politiques en France, notamment dans les milieux proches du Parti socialiste. L'université de Neuchâtel avait alors ouvert une enquête pour déterminer si les faits reprochés à Olivier Christin étaient avérés[16].
Le 18 novembre 2022, le quotidien d'information 20 minutes[17]et le site d'information Bluewin[18] annoncent qu'au terme d’un audit externe approfondi, qui a permis l’analyse d’une centaine de factures et de notes de frais, de 150 documents et du contenu de 27 auditions, Olivier Christin est lavé de tout soupçon. «Il ressort que soit les allégations sont fausses, soit elles relèvent d’interprétations manifestement exagérées», affirme le communiqué publié vendredi par l’UniNE[19]. L'audit souligne aussi que les faits décrits dans des témoignages anonymes recueillis par les deux médias n’ont pas été confirmés.
Distinctions
modifier- Prix Anthony Rowley 2023 avec Guillaume Alonge pour le livre Adam, Eve, le Paradis, les légumes et la viande, Anacharsis, 2023[20].
- Prix Montyon de l'Académie française 2024 avec Guillaume Alonge pour le livre Adam, Eve, le Paradis, les légumes et la viande, Anacharsis, 2023[21].
Principales publications
modifier- Une révolution symbolique : l'iconoclasme huguenot et la reconstruction catholique, Paris, Minuit, .
- Les Réformes : Luther, Calvin et les protestants, Paris, Éditions Gallimard, coll. « Découvertes Gallimard / Religions » (no 237), , 160 p. (ISBN 978-2-0705-3228-5), trad. italienne, japonaise, russe, sud-coréenne et chinoise simplifiée.
- La paix de religion : l'autonomisation de la raison politique au XVIe siècle, Paris, Éditions du Seuil, .
- Les yeux pour le croire : les Dix commandements en image (XVe – XVIIe siècles), Paris, Éditions du Seuil, .
- (avec Patrick Champagne) Pierre Bourdieu : mouvements d'une pensée, avec Patrick Champagne, Paris, Bordas, 2004 (rééd. Lyon, PUL, 2012).
- Le Roi-Providence : trois études sur l'iconographie gallicane, Lyon, Chrétiens et Sociétés, 2007.
- Confesser sa foi : conflits confessionnels et identités religieuses dans l'Europe moderne (XVIe – XVIIe siècles), Seyssel, Champ Vallon, 2009.
- (Dir.) Un nouveau monde : naissance de la Lorraine moderne. Catalogue d'exposition, Paris, Somogy, 2013.
- Vox populi : une histoire du vote avant le suffrage universel, Paris, Seuil, 2014.
- (Dir. avec Fabrice Flückiger et Naïma Ghermani) Marie mondialisée : l'Atlas Marianus de Wilhelm Gumppenberg et les topographies sacrées de l'époque moderne, Neuchâtel, Alphil, 2014.
- (Dir.) Dictionnaire des concepts nomades en sciences humaines, 2 tomes, Paris, Métailié, 2010 et 2016.
- (Dir.) Demain, la République, Lormont, Le Bord de l'eau, 2018.
- (Dir.) Républiques et républicanismes : les cheminements de la liberté, Lormont, Le Bord de l'Eau, 2019.
- (Dir. avec Marion Deschamp) Critique de la langue politique : les concepts nomades et l'histoire des idées, Lormont, Le Bord de l'eau, 2019.
- La Cause des autres. Une histoire du dévouement politique, PUF, 316 p., 2021[22].
- (avec Guillaume Alonge), Adam, Eve, le Paradis, les légumes et la viande, Anacharsis, 2023[23].
Notes et références
modifier- « Olivier Christin sur le site de l'Université de Neuchâtel », sur Université de Neuchâtel (consulté le ).
- « Olivier Christin », sur ephe.fr (consulté le ).
- « Alumni ENS de Lyon - La communauté des anciens des ENS de Lyon, LSH, Fontenay-aux-Roses et Saint-Cloud », sur Alumni ENS de Lyon (consulté le )
- « Catalogue SUDOC », sur www.sudoc.abes.fr (consulté le )
- Olivier Thomas, « Olivier Christin : L’œil de la Réforme », sur lhistoire.fr, L'Histoire, (consulté le ).
- Nicole Lemaître, « Compte-rendu: Olivier Christin, Une révolution symbolique. L'iconoclasme huguenot et la reconstruction catholique », Revue d'histoire moderne et contemporaine, vol. 41-1, , p. 161-163 (lire en ligne).
- Matthieu Arnold, « Compte-rendu: Olivier Christin, Les yeux pour le croire. Les Dix Commandements en images (XVe – XVIIe siècle) », Revue d'histoire et de philosophie religieuses, vol. 83-3, , p. 371-372 (lire en ligne).
- Mariel Mazzocco, « Compte-rendu: L’Atlas Marianus de Wilhelm Gumppenberg, édition et traduction par Nicolas Balzamo, Olivier Christin et Fabrice Flückiger, avec la collaboration de Laurent Auberson, Naïma Ghermani et Anton Serdeczny », Revue de l'histoire des religions, vol. 3, , p. 570-571 (lire en ligne).
- Alain Tallon, « Compte-rendu: Olivier Christin, La paix de religion. L'autonomisation de la raison politique au XVIe siècle », Annales. Histoire, Sciences Sociales, vol. 55-2, , p. 484-486 (www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_2000_num_55_2_279855_t1_0484_0000_2).
- Rémy Caveng, « Compte-rendu: Olivier Christin, Vox populi. Une histoire du vote avant le suffrage universel », Lectures, (consulté le ).
- « Réformation et votations », sur p3.snf.ch, (consulté le ).
- Serge Audier, « Dictionnaire des concepts nomades en sciences humaines : l'internationale des concepts », sur lemonde.fr, (consulté le ).
- « La vocation du CEDRE », sur cedre.univ-psl.fr (consulté le ).
- « Neuchâtel: le prof d’Uni, ses amis socialistes et l’argent suisse », sur ArcInfo, 3 mai 2022 (consulté le )
- Antton Rouget, Anabelle Bourquin (ArcInfo), « En Suisse, les financements douteux d’un centre de recherche… », sur Mediapart (consulté le )
- « L’Université de Neuchâtel à nouveau dans la tourmente », Le Temps, (ISSN 1423-3967, lire en ligne, consulté le )
- « Neuchâtel: Prof de l’Uni lavé de tout soupçon par un audit », sur 20 minutes, (consulté le )
- « Fausses factures: l'Université de Neuchâtel hors de cause », sur blue News (consulté le )
- « L’Université présente les résultats d’une enquête externe après la mise en cause d’un professeur et du système de contrôle interne », sur www.unine.ch (consulté le )
- « Guillaume Alonge et Olivier Christin, lauréats du prix Anthony Rowley 2023 », sur Livres Hebdo (consulté le )
- « Prix Montyon. Prix de littérature et de philosophie »
- Roger Chartier, « « La Cause des autres », d’Olivier Christin : dévoués héros du bien commun », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le ).
- « Adam et Ève, le paradis, la viande et les légumes », sur editions-anacharsis.com (consulté le )
Liens externes
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- Ressources relatives à la recherche :
- Ressource relative à plusieurs domaines :
- Page d'Olivier Christin sur le site de l'université de Neuchâtel
- Centre européen des études républicaines (Cedre)
- Liste de publications sur Cairn.Info