Le Petit Parisien

journal quotidien français publié du 15 octobre 1876 au 17 août 1944
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Le Petit Parisien est un journal quotidien français publié du au et qui fut l'un des principaux journaux sous la Troisième République. Il est l'un des quatre plus grands quotidiens français à la veille de la Première Guerre mondiale, avec Le Petit Journal, Le Matin, et Le Journal.

Le Petit Parisien
Image illustrative de l’article Le Petit Parisien

Pays Drapeau de la France France
Langue Français
Périodicité Quotidien
Genre Généraliste, journal d'opinion
Prix au numéro 5 centimes (avant 1917), 1 franc (1944)
Diffusion 3 millions ex. (12 novembre 1918)
Fondateur Louis Andrieux
Date de fondation
Date du dernier numéro
Ville d’édition Paris

Propriétaire Famille Dupuy
ISSN 0999-2707
OCLC 183354137

Le Petit Parisien est fondé par Louis Andrieux, député radical et procureur de la République, le [1] avec Jules Roche, un ancien confrère d'Andrieu au barreau, comme rédacteur en chef. Le Petit Parisien à ses débuts est plutôt de tendance anticléricale et radicale (gauche). Il devient assez rapidement populaire. En 1884, Jean Dupuy en devient le propriétaire[1]. Dès lors pendant plusieurs décennies, la famille Dupuy joue, à travers Le Petit Parisien, un rôle politique important en France.

Le journal, sous son impulsion et avec un positionnement politique plus modéré, atteint une très grande diffusion avec un million d'exemplaires vendus à travers la France dès 1900, puis plus de deux millions à la fin de la Première Guerre mondiale, alors le tirage le plus élevé au monde[1]. Durant l'entre-deux-guerres, il se positionne nettement à droite et connaît de nouveaux concurrents, les quotidiens du soir. En , le journal, qui avait été transformé pendant l'Occupation par le gouvernement militaire allemand en organe de propagande[1], est alors supprimé et le Parisien libéré le remplace dans les kiosques.

Par son histoire, Le Petit Parisien illustre la réalité de la puissance politique de la presse en France sous la Troisième République.

Historique

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1876-1918 : de la naissance à l'apogée d'un journal

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Les années 1876-1885 : la naissance d'un journal sous la IIIe République

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Le Petit Parisien du 18 mars 1883.

Le Petit Parisien est fondé par Louis Andrieux le , et Jules Roche en devient le rédacteur en chef, pour concurrencer le quotidien monarchiste Le Soleil, créé quelques mois auparavant[réf. nécessaire][Lequel ?], et surtout, considéré comme une copie du Petit Journal[2].

Quatre sénateurs, tous radicaux et anticléricaux, parmi lesquels Edmond Adam (dont l'épouse Juliette laissera d'intéressants mémoires), forment le conseil de direction politique. Le journal se présente comme un « journal politique du soir ». Il change plusieurs fois de propriétaires en 1877[1] : il est cédé une première fois à Eugène Schnerb le , puis à Hector Pessard en juin et enfin acquis par Paul Dalloz en août[1]. Jean Dupuy, un provincial d'origine paysanne, parti de rien, qui a fait fortune et plus tard est devenu sénateur, et Lucien Claude Lafontaine avancent des fonds au Petit Parisien. Le , Émile Cornuault, ingénieur civil et connaissance de Jean Dupuy, fonde la première société du Petit Parisien : La Société anonyme du journal Le Petit Parisien. Un de ses actionnaires les plus importants est Léon Audbourg, un ingénieur civil également. Jean Dupuy devient le principal commanditaire secret du Petit Parisien avec Louis Paul Piégu comme propriétaire et directeur officiel du journal, à partir du . Le journal a commencé à évoluer vers le radicalisme[1]. Le tirage double passant de 23 000 en à 40 000 en , grâce notamment à la place alors importante accordée aux feuilletons[1].

Charles-Ange Laisant, député, ancien polytechnicien et ami de Lafontaine, crée une nouvelle société en commandite L. P. Piégu et Cie le 1er octobre 1880 et la première est dissoute le même jour[3]. Laisant devient l'associé de Piégu. Dupuy en fait partie également. Cette nouvelle société exploite la publication du Petit Parisien, dont l'imprimerie est située à Paris, au 18 rue d'Enghien. L'immeuble du 18 appartient déjà presque entièrement à Jean Dupuy, dont les moyens financiers étaient alors accrus grâce à l'héritage de son beau-père qui venait de mourir.

Laisant et Dupuy veulent alors faire du journal, jusque-là une mauvaise affaire, une entreprise rentable. Avec un capital augmenté et un avenir assuré, Le Petit Parisien est alors en mesure de moderniser son matériel et d'organiser sa vente en province. Il fait plus de place à l'information. N'ayant pas les moyens de passer par l'agence Havas (qui existe en France depuis 1835), il se dote donc de correspondants à Londres et à Alger.

Le , la société du Petit Parisien lance une revue, La Vie populaire, avec des romans et des nouvelles signés Zola, Maupassant, Catulle Mendès et Alphonse Daudet. C'est un hebdomadaire à deux sous et seize pages, qui connait rapidement le succès. Cette même année, Le Petit Parisien s'attire les foudres de la justice. Sous le pseudonyme de Jean Frollo, Laisant attaque le général de Cissey, bonapartiste, qu'il accuse d'avoir une maîtresse à la solde de l'Allemagne. Il en résultera 8 000 francs d'amende pour le journal. Le , une loi donne entière liberté à la presse, tout en la réglementant afin d'éviter des procès qui, en fait, font plus de publicité que de torts aux journaux concernés. Le Petit Parisien profite alors de cette liberté pour lutter contre Jules Ferry. Le journal, entièrement ligué contre lui, contribue à sa chute : c'est le fameux gouvernement de 73 jours, le « Grand Ministère », mené par Gambetta, qui fait l'objet de railleries au sein du Petit Parisien et dans d'autres journaux. Mais Jean Dupuy admire Jules Ferry, même s'il n'est pas toujours d'accord avec lui, et il n'apprécie pas le ton partisan de ses collaborateurs. De plus, trois amis de jeunesse de Dupuy font partie du gouvernement : Alexandre Ribot, Maurice Rouvier et René Waldeck-Rousseau. Au milieu des années 1880, le journal s'intéresse plus aux gazettes, aux potins, aux scandales et au scabreux, afin de vendre plus. L'avenir s'annonce bien : le journal dispose alors de 2 800 dépositaires en province et enregistre beaucoup de nouveaux abonnements. L'un des premiers à se soucier du sort des ouvriers en usine, Waldeck-Rousseau fait voter une loi sur les syndicats en 1884. Le journal, subjectivement, en parle longuement. Il ne se fait plus à ce moment-là le champion de l'anticléricalisme. Il ne fait non plus aucune allusion à l'antisémitisme émergeant à cette époque, qu'incarne par exemple L'Antijuif, le journal de Panchioni fondé en 1881 et prélude au livre du journaliste Édouard Drumont, La France juive.

Les années 1885-1918 : vers la Première Guerre mondiale

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Le Petit Parisien, Supplément littéraire illustré du 29 septembre 1889.
 
Immeuble de l'ancien siège du Petit parisien rue d'Enghien

Une nouvelle amélioration du matériel d'imprimerie en 1885 permet d'augmenter le tirage à 150 000 exemplaires. Les feuilletons de Maupassant, qui demande une rémunération double de celle de Jules Verne, avaient déjà aidé au succès de La Vie populaire. On rapporte cette anecdote : le plan du parcours à suivre le jour des obsèques de Victor Hugo, inclus dans le journal, augmente aussi son chiffre de vente ce jour-là. Piégu meurt en . La société devient alors Le Petit Parisien, Dupuy et Cie, et Jean Dupuy en devient le directeur officiel. Le temps de la hargne partisane est révolue. Le but est alors d'informer mieux et plus rapidement. La modernité se fait jour. En 1889, lancement de la formule dominicale, Le Petit Parisien illustré[2].

Jean Dupuy devient sénateur des Hautes-Pyrénées le . Un hebdomadaire issu du groupe Dupuy & Cie est lancé le de cette même année : L'Agriculture nouvelle. Le , les actions du Petit Parisien sont cotées à la bourse de Paris. Le tirage vient d'atteindre 400 000 exemplaires mais reste encore loin derrière Le Petit Journal (900 000 exemplaires).

Avec l'affaire Dreyfus, les journaux antisémites se déchainent (et en premier lieu La Libre Parole d'Édouard Drumont, le ). Le Petit Parisien suit d'abord l'opinion générale en titrant le 1er novembre 1894 « un crime de haute trahison » puis jusqu'au procès en 1895, il intitulera ses chroniques « le traître Dreyfus ». Ensuite le journal commencera à émettre des doutes sur le déroulement de la procédure judiciaire et se contentera de titres plus neutres comme « l'ex-capitaine Dreyfus » à partir des nouveaux rebondissements de l'affaire en 1897. Pendant toute la période de l'affaire Dreyfus, le journal choisit délibérément de ne pas prendre parti mais veut rendre compte minutieusement de la procédure judiciaire et des flous juridiques qui l'entourent. Le Petit Parisien critique ouvertement le principe de huis clos, le principe de révision, le rôle des juges et le peu d'éléments dans le dossier. À partir de 1899[4], Jean Dupuy dénonce les manipulations politiques, par exemple dans un article du 11 septembre 1899 : « (...) L'affaire Dreyfus sert de drapeau à des ambitions et des haines politiques ». Il milite désormais pour le droit de grâce d'Alfred Dreyfus[5] et ensuite pour une seconde révision du procès qui n'aboutira qu'en 1906.

Entretemps, en 1895, les locaux du journal s'étendent du 18 au 20 de la rue d'Enghien. Dupuy devient ministre de l'Agriculture le .

En 1900, Le Petit Parisien dépasse Le Petit Journal avec 1 million d'exemplaires vendus par jour. Dupuy est réélu sénateur le . En 1901, le journal fait 6 pages et coûte toujours 5 centimes. Le , le journal atteint 1 103 195 exemplaires.

Lors des élections législatives de 1902, Le Petit Parisien est favorable à Adolphe Carnot, frère de Sadi Carnot, le président de la République assassiné le , et à son Alliance républicaine démocratique, ni socialiste, ni radicale, mais plutôt modérée. Pierre Dupuy, fils de Jean, est candidat dans l'arrondissement de Blaye en Gironde. Il est élu au premier tour, et fait partie du groupe de Gauche démocratique, dont il est le secrétaire jusqu'en 1906.

Jean Dupuy envoie son fils Paul étudier le marché et l'industrie de la presse aux États-Unis : il y découvre des machines modernes. Jean Dupuy est ainsi le premier à adosser à un journal sa propre papeterie en 1904, usine de fabrication de papier qui devient officiellement en 1917 la Société des papeteries de la Seine, dite aussi Papeterie du Petit Parisien[6]. Propriété du groupe multinational papetier Smurfit Kappa, la papeterie, située à Nanterre, ferme en 2011[7].

 
« Le plus fort tirage des journaux du monde entier » : c'est ce que le journal annonce dans son sous-titre du 18 avril 1912.

À partir du , Le Petit Parisien paraît avec un sous-titre : « Le plus fort tirage des journaux du monde entier ». En , un supplément dominical est lancé, Nos loisirs, puis en 1910, en partenariat avec Félix Juven, c'est Le Miroir qui vient s'ajouter, ciblant ainsi de plus en plus les lecteurs de fin de semaine à coup d'éditions illustrés, notamment à partir de clichés photographiques.

L’épisode de 45 jours de la crue de la Seine amène pour la première fois en , des photographies qui documentent les reportages. Les photos sont de qualité médiocre mais les textes sont riches en détails de toutes sortes. Le supplément littéraire illustré du comporte exceptionnellement 12 pages[8].

Le journal milite depuis le début pour la séparation de l'Église et de l'État, séparation qui interviendra en 1905. Le journal contribue, en 1913, avec Jean Dupuy, à faire accepter un projet de loi controversé : l'allongement de la durée du service militaire à trois ans, votée le et ratifiée le .

Le , Élie-Joseph Bois, 36 ans, devient rédacteur en chef du journal. Il y fait plus de place au sport et à l'actualité internationale. Une rubrique cinéma est créée. Apparaissent aussi des chroniques signées par de grands écrivains tel Anatole France.

Au cours de la Première Guerre mondiale, la société du journal crée Le Poilu du Petit Parisien, un bulletin avec des nouvelles des uns et des autres, des petites histoires amusantes. C'est une sorte de lettre collective pour les combattants de la rue d'Enghien. Fin 1916, le tirage du Petit Parisien dépasse les 2 millions d'exemplaires. Le lendemain de la Victoire (), le journal dépasse les 3 millions d'exemplaires.

 
L'équipe du Petit Parisien en 1910

En 1917, Paul Dupuy rachète à Pierre Lafitte le quotidien l’Excelsior, puis fonde la société Excelsior Publications, faisant partie de la holding de presse contrôlée par la famille Dupuy.

1919-1944 : de l'apogée au déshonneur

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Les années 1919-1936 : un journal qui se diversifie

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En 1919, Le Petit Parisien donne son avis sur le bolchevisme : le , le journaliste Claude Anet écrit « Bolchévisme et tsarisme, c'est tout un ». En résumé, Lénine remplace le tsar, mais ce n'est pas mieux. Le , jour du premier anniversaire de l'Armistice, commence alors, au sein du personnel des journaux, une grève qui durera 3 semaines. Les ouvriers imprimeurs réclament une augmentation de salaire de cinq francs par jour. La Presse de Paris, imprimée rue d'Enghien, est le seul journal à paraître.

Le , Jean Dupuy meurt. L'évènement est d'importance : le président de la République Poincaré assiste aux obsèques et Clemenceau envoie un télégramme. C'est dire l'influence des Dupuy et du journal, comme de la presse en général, en France à cette époque. Ses deux fils, Pierre et Paul, restent les gérants statutaires. Paul Dupuy dirige alors La Science et La Vie (l'actuel Science et Vie), une revue de la société du Petit Parisien. Il succède à son père aux commandes du journal. Pierre en est le codirecteur.

Paul Deschanel est élu président de la République le , en battant Clemenceau. Le journal évoquera les moments de démence du président Deschanel, retrouvé dans la nuit du pieds nus et en pyjama sur une voie ferrée. Le journal exprime aussi à cette période sa révulsion pour le bolchévisme.

À partir de 1921, sous l’impulsion des rédacteurs en chef, Léon Touchard puis Élie Bois, l'aspect du Petit Parisien se modernise. Il se met aux grands reportages internationaux accompagnés de photos et signés par Louis Roubaud, Albert Londres ou Henri Béraud, par exemple le reportage de ce dernier sur l'indépendance de la République irlandaise en 1920, ou les vingt-sept reportages d'Albert Londres sur la situation des Juifs en Europe en 1930, réunis ensuite sous le titre Le Juif errant est arrivé. Le journal annonce la mort de Lénine le , année également de l'élection de Gaston Doumergue à l'Élysée.

Paul Dupuy s’intéresse aussi à la radiodiffusion et lance le Poste du Petit Parisien le , la radio du quotidien éponyme dont les studios et l’antenne sont installés dans l’immeuble du journal, rue d’Enghien. Maurice Bourdet en est le rédacteur en chef du Journal parlé.

Paul Dupuy meurt d'une fièvre typhoïde contractée lors d'un voyage en Afrique du Nord, le . Son frère Pierre reste seul aux commandes. Il crée en 1928, la Société du Petit Parisien et d'éditions (SPPE), une société en commandite par actions.

Le Petit Parisien s'intéresse aussi au cinéma et à la télévision, alors dans ses balbutiements. Le , Pierre Dupuy rencontre une première fois Mussolini, qui l'impressionne mais dont il se méfie. Il souhaite que cette entrevue ne soit pas ébruitée[réf. nécessaire], et glisse politiquement vers la droite avec un anticommunisme de plus en plus virulent[1]. En 1932, on enregistre une baisse sensible du tirage du journal, qui se poursuit les années suivantes : est-ce du fait de son nouveau positionnement ou bien encore de la concurrence de Paris-Soir de Jean Prouvost[1] ?

Le journal interviewe Gandhi grâce à la journaliste Andrée Viollis. Lors de l'accession d'Hitler au pouvoir en Allemagne le , le journal se montre au départ assez neutre. Mais en mai, il commence à s'en méfier et dénonce son caractère dangereux. Le , un article de Lucien Bourgès est titré « Mais où va l'Allemagne ? ».

Concernant Mussolini, la méfiance est moindre, Pierre Dupuy est l'artisan d'un rapprochement franco-italien, et est reçu « chaleureusement » par Mussolini, selon Le Nouveau Cri du . Le , Dupuy est même nommé grand officier de l'Ordre de la Couronne d'Italie et écrit une lettre de remerciement à Mussolini.

Le Petit Parisien couvre largement tous les évènements de l'époque. En 1934, il envoie Ella Maillart au Mandchoukouo, nouvel État fondé par les Japonais en 1932. S'il critique l'« organisation » et la « désinformation » des Jeux olympiques de Berlin, il reste relativement neutre. Il couvre également la guerre d'Espagne, de à , l'instauration des congés payés en 1936. Ainsi le , le journal décrit-il Paris comme déserte, exception faite des touristes étrangers. Il parle également du scandale royal en Angleterre avec l'abdication d'Édouard VIII qui souhaite se marier avec une divorcée. C'est cette année-là également que le journal commence à comprendre son erreur vis-à-vis de Mussolini.

En 1937, le prix du journal est augmenté, suivant ainsi le coût du prix du papier, ce qui fait craindre à Pierre Dupuy un impact négatif sur les ventes.

Les années 1939-1957 : guerre, déshonneur et volonté de réhabilitation

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Le Petit Parisien, .

En 1938, le journal soutient les accords de Munich signés entre Chamberlain, Daladier, Mussolini et Hitler.

Le , Lucien Bourgès couvre la mort du pape Pie XI et la nomination de Pie XII.

À partir de 1939, le rôle politique du Petit Parisien et de la presse en général s'estompe. Le journal informe, simplement. Mais les ventes baissent. Les grandes heures du journal semblent passées. Le Petit Parisien connaît alors des moments difficiles, avec des tensions au sein de la rédaction. Élie-Joseph Bois est attaqué au conseil de surveillance. Il a le soutien de Pierre Dupuy, malgré des divergences entre les deux hommes.

Le , Le Petit Parisien, le « vrai », celui des Dupuy, est imprimé pour la dernière fois à Paris. Depuis le , il ne paraît plus que sur deux, voire une seule feuille. Ce dernier numéro titre « L'Italie déclare la guerre à la France. On s'y attendait ». Dans la journée du 11, le journal plie bagages, et va, pour moitié à Rennes, pour autre moitié à Bordeaux, tiré sur les presses de La France de Bordeaux. Aucun exemplaire ne semble avoir été imprimé avant le . Élie-Joseph Bois, ravagé par la demande d'armistice, démissionne et part pour Londres le . Dupuy le regrette, mais estime ne pouvoir faire de même.

Le , le dernier numéro paraît à Bordeaux. Le journal quitte Bordeaux. Jean Dupuy Junior, fils de feu Paul Dupuy, paraît plus pro-allemand que pro-alliés. Son oncle le renvoie. Entre-temps, Pierre Laval annonce à Charles Maurice qu'il est disposé à laisser imprimer Le Petit Parisien dans les ateliers de son journal, Le Moniteur, à Clermont-Ferrand. Pierre Dupuy accepte à contrecœur. Puis, dès le , on demande à Pierre Dupuy de faire revenir son journal à Paris et de collaborer. Mais Dupuy refuse. De plus, paraître à Aurillac, Clermont et Lyon lui suffit. Mais le personnel s'agite, croyant ne pas être payé au mois d'août à cause des problèmes intérieurs et du manque d'argent. Le , Dupuy justifie dans son éditorial sa position antérieure concernant Mussolini et dénonce les carences militaires de la France. Il préconise « patience et courage » pour la cohabitation imposée avec les Allemands. Mais il ne croit pas en une victoire de De Gaulle. En faisant un sondage auprès de son personnel, il se rend compte que celui-ci souhaite rentrer à Paris. Ce qui se fait finalement, le . Drieu La Rochelle, fasciste convaincu, participe au journal. Marcel Lemonon conserve son poste de Directeur administratif, Jean Edmond Decharme, ancien reporteur au Poste Parisien et chef de Cabinet d' Adrien Marquet, devient rédacteur en chef [9], Gilbert Cesbron est responsable du service des informations et de la propagande du journal.

Le Petit Parisien se déclare « pour le Maréchal », comme beaucoup à l'époque, pour pouvoir survivre, par défaitisme et par lâcheté, plus que par réelle conviction, selon la fille de Pierre Dupuy, Micheline Dupuy[10].[réf. nécessaire] Mais Pierre Dupuy, lui, n'a pas regagné Paris. Les Allemands lui demandent de revenir et de vendre le journal à Bunau-Varilla. Dupuy rentre à Paris, mais refuse leur proposition. Les Allemands et les autorités françaises accusent alors Le Petit Parisien d'être sous « influence juive », du fait des origines de l'épouse de Paul Dupuy, Helen, qui s'empresse de faire parvenir des papiers d'Amérique prouvant le contraire.

Dupuy cherche le moyen de sauver Le Petit Parisien. En acceptant de refaire paraître le journal à Paris, il ne sait pas encore qu'il causera la mort de celui-ci et le déshonneur de sa famille. De plus, il écrit à Mussolini le , naïvement, le suppliant de l'aider, ce qui ne donnera rien. Cette lettre sera utilisée contre lui en 1949 lors de son procès pour faits de collaboration. Dupuy se justifiera plus tard de cette lettre dans une note, note qui, si elle « n'excuse pas, explique beaucoup de choses »[11].

Le , Pierre Dupuy est congédié et les locaux du journal sont confisqués par les Allemands. Le Petit Parisien continue de paraître, mais n'a rien à voir avec ce qu'il était auparavant. Il devient un journal de propagande nazie, et est géré par d'autres journalistes, venus de différents journaux. Un ancien collaborateur du Petit Parisien dira : « Ce n'était plus le Petit Parisien, mais le Petit Berlinois ! ». Son tirage est encore de 505 000 exemplaires en [12]. On « conseille » à Dupuy de faire une cure à Vichy; en somme on l'écarte. Il accepte, mais ne désespère pas de faire renaître le journal, plus tard, sous un autre nom, celui-ci étant désormais synonyme de honte. Son fils, Francis Dupuy, entre dans la Résistance en 1942. Cette même année, Pierre Dupuy est convoqué afin de donner son accord sur le fait de céder Le Petit Parisien aux Allemands même après la guerre (qu'ils pensent alors encore gagner), mais Dupuy refuse. Il quitte Vichy en 1943 et s’installe à Nice, alors en zone d’occupation italienne. Quand Nice est occupée par les Allemands, il retourne à Vichy, où il avait pris ses habitudes et des amis. Il y reste jusqu’au , date de son retour à Paris.

Le , tous voient partir avec joie les gérants et les collaborateurs du « Petit Parisien collabo ». Ils espèrent faire renaître le journal, mais le , les nouvelles autorités gouvernementales installent L’Humanité et Le Parisien libéré (actuel Le Parisien) dans les locaux de la rue d’Enghien. On demande à Francis Dupuy de quitter les lieux. Malgré les efforts de celui-ci pour réhabiliter le journal, rien n'y fait : Le Parisien libéré prend la place vacante laissée par le Petit Parisien. Le , des FFI veulent arrêter « ce collabo de Pierre Dupuy qui avait dirigé cet affreux Petit Parisien pendant l'Occupation. » Son fils, Francis Dupuy, obtient sur le moment des excuses pour son père, mais c'est trop tard : Pierre Dupuy est inculpé pour faits de collaboration.

La Société du Petit Parisien est alors dévolue à la Société nationale des entreprises de presse (SNEP), société qui a été créée en mai 1946 dans le but de gérer les biens des entreprises de presse et d’informations qui ont été placés en gérance sous la tutelle du gouvernement[1].

Le procès de Pierre Dupuy s’ouvre en 1949 devant un tribunal militaire. Ce dernier est alors malade, atteint par un zona ophtalmique avec des lésions qui lui défigurent le visage et l’empêchent de hocher la tête. Ses anciens salariés au journal prennent sa défense. De nouveaux témoignages en sa faveur arrivent, bien que certaines personnes se volatilisent. Il est acquitté le . Mais il lui faut attendre le pour redevenir le propriétaire du titre Le Petit Parisien. Dupuy essaie alors de faire reparaître le journal, mais il trop tard. Le nom du Petit Parisien est sali et le Parisien libéré a fait sa place parmi les lecteurs. En 1957, les neveux de Pierre Dupuy revendent la Société du Petit Parisien à Marcel Boussac[1], qui la revend trois ans plus tard, en 1960, à Émilien Amaury, propriétaire-fondateur du Parisien libéré et du futur Parisien[1],[13].

Durant l'escapade du Parti populaire français et de son chef, Jacques Doriot, le Petit Parisien fut également le nom du journal du parti réfugié en Allemagne. Il parut durant tout l'hiver 1944-1945, étant imprimé à Constance : il fut donc lu par tous les proches de Pétain en exil, mais aussi dans les Stalags par les prisonniers français.

Disparition du Petit Parisien

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Le Petit Parisien aura été l'un des journaux les plus importants et les plus puissants de la Troisième République. Il est une démonstration frappante du mélange des genres entre politique et journalisme, avec le rôle de Jean Dupuy, à la fois propriétaire de journal, puis d'un groupe de presse, et homme politique. Ce journal est resté dans les mémoires comme l'image d'une certaine versatilité journalistique, changeant d'opinion politique au fil des modes même s'il est resté principalement à gauche. Malgré l'acquittement de Pierre Dupuy, la réputation et le nom du journal sont salis sous l'Occupation. Le Petit Parisien, malgré une tentative de relance ne pourra s'en relever et disparaît. Le Parisien libéré, avec d'autres journaux issus ou reparus après la Libération, tel L'Humanité, prendront alors la place laissée vacante.

Organisation

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Dirigeants

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Directeurs
  • Louis Andrieux : -
  • Eugène Schnerb : -
  • Hector Pessard :
  • Louis Paul Piégu : -
  • Jean Dupuy : -
  • Paul Dupuy : -
  • Pierre Dupuy : -
  • Jacques Roujon : 1940-1944
Rédacteurs en chef
  • Jules Roche : -
  • Élie-Joseph Bois : -
  • Paul Edmond Decharme : -
  • Claude Jeantet : - 1944
Illustrateurs récurrents identifiés[14],[2]

Groupe de presse Le Petit Parisien

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Après 1888, la famille Dupuy passe à la tête d'un important groupe de presse appelé « Les éditions du Petit Parisien » qui développent de nombreux produits dérivés, et dont le principal concurrent est le groupe formé autour du Petit Journal. Constitué en holding, ses ramifications donnent la mesure et l'étendue de son développement sur le marché très concentré de la presse et des médias en France avant 1940[15] :

Notes et références

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  1. a b c d e f g h i j k l et m Fonds du Petit Parisien, Archives nationales.
  2. a b et c Gérard Solo, Plus de 5000 illustrateurs de presse, Vichy, AEDIS, 2004, p. 667-668.
  3. Archives commerciales de la France : journal hebdomadaire, (lire en ligne), Page 1346
  4. Jean Dupuy, « Le Petit Parisien du 20 aout 1899 », sur Gallica, (consulté le )
  5. Jean Dupuy, « Le Petit Parisien du 21 septembre 1899 », sur Gallica, (consulté le )
  6. Papeteries de la Seine, Nanterre
  7. « Les salariés des Papeteries de la Seine trouvent portes closes », sur Le Parisien,
  8. « Crue de Janvier 1910 dans la presse (Le Petit Parisien) », sur lefildutemps.free.fr (consulté le )
  9. Hubert Bonin et Françoise Taliano-des Garets, Adrien Marquet : les dérives d'une ambition, Bordeaux, Paris, Vichy, 1924-1955, Bordeaux, Confluences, , 383 p. (ISBN 978-2-35527-005-5, OCLC 173162717, lire en ligne)
  10. Dans le livre Le Petit Parisien, 1989, éditions Plon, Paris
  11. Cité par Micheline Dupuy.
  12. D'après les Archives de la Préfecture de police, citées par Pascal Ory, Les collaborateurs 1940-1945, Points Histoire, Seuil, 1976, p. 283.
  13. Ce qui explique que l’on puisse acheter, aujourd’hui, en ligne, des archives du Petit Parisien sur le site du journal Le Parisien.
  14. [PDF] Justine Trocherie, « Seconde partie des annexes du Mémoire de Master portant sur les usages des images dans les Suppléments illustrés du Petit Journal et du Petit Parisien », Lyon, ENSSIB, décembre 2018.
  15. Jean-Pierre Bacot, La Presse illustrée au XIXe siècle : une histoire oubliée, Limoges, Presses universitaires de Limoges, 2005, p. 162.
  16. Notice du Catalogue général, BNF, en ligne.
  17. Notice du Catalogue général, BNF, périodiques.

Voir aussi

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Sources

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  • Francine Amaury, Histoire du plus grand quotidien de la IIIe République. Le Petit Parisien (1876-1944), Paris, Presses universitaires de France, 1972, deux volumes.
  • Micheline Dupuy, Le Petit Parisien : le plus fort tirage des journaux du monde entier, éditions Plon, Paris, 1989 (ISBN 2259020976)
  • Le parisien.fr et Boutique.leparisien.com
  • Universalis.fr
  • Les papiers du journal sont conservés aux Archives nationales sous la cote 11 AR.

Liens externes

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Articles connexes

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