Pseudocopulation

La pseudocopulation ou mimétisme pouyannien (en hommage aux travaux de M. Pouyanne^[3]^,^[1]^,^[2]) désigne un simulacre d'accouplement au cours duquel le mâle n'introduit pas directement le sperme dans les voies génitales de la femelle, notamment lorsqu'il se fait leurrer par une fleur mimant sa partenaire sexuelle.

Entre fleurs et insectes

Cette sexualité animale non reproductive s'applique notamment au mimétisme entre certaines fleurs et des insectes femelles attirant les mâles pour une copulation grâce à laquelle les fleurs sont fécondées^[4]. De nombreuses orchidées (dont 21 espèces dans le genre Ophrys)^[5] favorisent la pseudocopulation, attirant chacune un insecte spécifique (généralement des abeilles, des guêpes ou des mouches) par l'odeur ou en mimant la morphologie du pollinisateur. Les pseudo-phéromones, produites par des osmophores et des glandes situées au sommet des pièces florales, ont une composition chimique proches des phéromones sexuelles émises par les femelles des insectes^[6]. Ces allomones attirent à distance le pollinisateur, bien avant que la vue du labelle mimétique^{[note 1]} (pétale modifié) n'intervienne à son tour^[7]. Les mâles, lors de la visite des fleurs, adoptent face à ce leurre sexuel (leurre visuel et olfactif) un comportement d’accouplement qui conduit à un dépôt de pollen sur leur corps. La pseudocopulation ne va généralement pas jusqu'à l'éjaculation, mais quelques cas sont reportés : du sperme de guêpes Ichneumonides a par exemple été détecté dans les fleurs de l'orchidée australienne Cryptostylis sp. (en)^[8]. L'insecte mâle « insatisfait » de sa partenaire végétale qui n'est pas dotée d'un orifice sexuel adéquat, va tenter sa chance auprès d'une autre fleur, assurant la pollinisation. Suivant les espèces, on a une pseudocopulation et pollinisation céphalique (le mâle emportant les pollinies collées sur la tête) ou une pollinisation abdominale quand la pseudocopulation se fait dans la position inverse (exceptionnellement en position latérale)^[9]. Cette interaction spécifique plante/pollinisateur est le résultat de processus de coévolution^[10].

Chez les vertébrés

La fécondation externe s'opère parfois par pseudocopulation. Chez la plupart des anoures (grenouilles, crapauds) et des urodèles (salamandres, tritons), cette fécondation est précédée d'un rapprochement des sexes, l'amplexus, pseudocopulation qui tient une place intermédiaire entre la fécondation à distance des poissons et la copulation des Vertébrés^[11].

La pseudocopulation est également évoquée dans les comportements homosexuels et hétérosexuels non reproductifs chez les oiseaux, poissons et mammifères, impliquant généralement des montes et d'autres formes de contacts génitaux^[12].

Galerie

Une guêpe chevauche le labelle de l'Ophrys mouche et tente de s'accoupler avec ce leurre sexuel
Les taches sombres sur les pétales de Gorteria diffusa (en) miment le corps de la mouche femelle Megapalpus capensis^[13]
La duperie sexuelle dont a été victime cette guêpe est efficace au vu du nombre de pollinies fixées sur sa tête
Amplexus chez l'amphibien Hymenochirus boettgeri

Notes et références

Notes

↑ Mimétisme avec la forme, parfois avec de fausses antennes et de fausses ailes, la couleur, parfois avec des motifs de faux yeux et la pilosité des insectes femelles

Références

↑ ^{a et b} H. Correvon, M. Pouyanne, « Un curieux cas de mimétisme chez les Ophrydées », Journal de la Société Nationale d'Horticulture de France, n^o 17,‎ 1916, p. 29–47 (lire en ligne).
↑ ^{a et b} H. CORREVON & M.-A. Pouyanne, « Nouvelles observations sur le mimétisme et la fécondation chez les Ophrys speculum et lutea », Journal de la Société Nationale d’Horticulture de France, vol. 4,‎ 1923, p. 372–377 (lire en ligne).
↑ (en) G Pasteur, « A Classificatory Review of Mimicry Systems », Annual Review of Ecology and Systematics, Annual Reviews, vol. 13, n^o 1,‎ novembre 1982, p. 169-199 (ISSN 0066-4162, DOI 10.1146/annurev.es.13.110182.001125, lire en ligne).
↑ (en) Bertil Kullenberg, « Field experiments with chemical sexual attractants in Aculeate Hymenoptera males », Zoologiska Bidrag Uppsala, vol. I, n^o 31,‎ 1956, p. 253–354.
↑ Jean-Marie Pelt, Les plantes : amours et civilisations végétales, Fayard, 1981, p. 121.
↑ Christophe Bouget, Secrets d'insectes : 1001 curiosités du peuple à 6 pattes, Quae, 2016, p. 66.
↑ (en) S. Cozzolino, A. Widmer, « Visual discrimination between two sexually deceptive Ophrys species by a bee pollinator », Arthropod Plant Interact, vol. 4, n^o 3,‎ septembre 2010, p. 141–148 (DOI 10.1007/s11829-010-9093-4).
↑ (en) Gaskett AC, Winnick CG, Herberstein ME, « Orchid sexual deceit provokes ejaculation », The American Naturalist, vol. 171, n^o 6,‎ juin 2008, p. 206-212 (DOI 10.1086/587532).
↑ Sébastien Lesné, Les orchidées sauvages de Paris, Editions Quae, 2009, p. 38-39.
↑ (en) S. Cozzolino, A. Widmer, « Orchid diversity: an evolutionary consequence of deception ? », Trends Ecol Evol, vol. 20, n^o 9,‎ septembre 2005, p. 487-494 (DOI 10.1016/j.tree.2005.06.004).
↑ Jean Guibé, Les Batraciens, Presses universitaires de France, 1965, p. 58.
↑ (en) Edward M. Barrows, Animal behavior desk reference : A Dictionary of Animal Behavior, Ecology, and Evolution, CRC Press, 2011, p. 123.
↑ (en) S. Johnson, J. Midgley, « Fly pollination of Gorteria diffusa (Asteraceae), and a possible mimetic function for dark spots on the capitulum », Am J Bot., vol. 84, n^o 4,‎ avril 1997, p. 429-436.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

[vidéo] « Le leurre olfactif de l'orchidée est tel qu'un mâle chevauche un autre mâle, simulant un comportement homosexuel », sur YouTube

(en) Hannes F. Paulus, C. Gack, « Pollinators as prepollinating isolation factors: evolution and speciation in Ophrys (Orchidaceae) », Israel Journal of Botany, vol. 39, n^o 1,‎ janvier 1990, p. 43-79 (lire en ligne)

[7] Mimétisme avec la forme, parfois avec de fausses antennes et de fausses ailes, la couleur, parfois avec des motifs de faux yeux et la pilosité des insectes femelles

[Pouyanne1916-1] {a et b} H. Correvon, M. Pouyanne, « Un curieux cas de mimétisme chez les Ophrydées », Journal de la Société Nationale d'Horticulture de France, n^o 17,‎ 1916, p. 29–47 (lire en ligne).

[Pouyanne1923-2] {a et b} H. CORREVON & M.-A. Pouyanne, « Nouvelles observations sur le mimétisme et la fécondation chez les Ophrys speculum et lutea », Journal de la Société Nationale d’Horticulture de France, vol. 4,‎ 1923, p. 372–377 (lire en ligne).

[3] (en) G Pasteur, « A Classificatory Review of Mimicry Systems », Annual Review of Ecology and Systematics, Annual Reviews, vol. 13, n^o 1,‎ novembre 1982, p. 169-199 (ISSN 0066-4162, DOI 10.1146/annurev.es.13.110182.001125, lire en ligne).

[4] (en) Bertil Kullenberg, « Field experiments with chemical sexual attractants in Aculeate Hymenoptera males », Zoologiska Bidrag Uppsala, vol. I, n^o 31,‎ 1956, p. 253–354.

[5] Jean-Marie Pelt, Les plantes : amours et civilisations végétales, Fayard, 1981, p. 121.

[6] Christophe Bouget, Secrets d'insectes : 1001 curiosités du peuple à 6 pattes, Quae, 2016, p. 66.

[8] (en) S. Cozzolino, A. Widmer, « Visual discrimination between two sexually deceptive Ophrys species by a bee pollinator », Arthropod Plant Interact, vol. 4, n^o 3,‎ septembre 2010, p. 141–148 (DOI 10.1007/s11829-010-9093-4).

[9] (en) Gaskett AC, Winnick CG, Herberstein ME, « Orchid sexual deceit provokes ejaculation », The American Naturalist, vol. 171, n^o 6,‎ juin 2008, p. 206-212 (DOI 10.1086/587532).

[10] Sébastien Lesné, Les orchidées sauvages de Paris, Editions Quae, 2009, p. 38-39.

[11] (en) S. Cozzolino, A. Widmer, « Orchid diversity: an evolutionary consequence of deception ? », Trends Ecol Evol, vol. 20, n^o 9,‎ septembre 2005, p. 487-494 (DOI 10.1016/j.tree.2005.06.004).

[12] Jean Guibé, Les Batraciens, Presses universitaires de France, 1965, p. 58.

[13] (en) Edward M. Barrows, Animal behavior desk reference : A Dictionary of Animal Behavior, Ecology, and Evolution, CRC Press, 2011, p. 123.

[14] (en) S. Johnson, J. Midgley, « Fly pollination of Gorteria diffusa (Asteraceae), and a possible mimetic function for dark spots on the capitulum », Am J Bot., vol. 84, n^o 4,‎ avril 1997, p. 429-436.

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