Tabac à mâcher
Le tabac à mâcher et le tabac à chiquer sont des formes de tabac se consommant par la mastication, qui ont perdu leur popularité au début du XXe siècle au profit de certaines formes de tabac à fumer (notamment la cigarette), mais qui persistent dans certains pays ou régions (États-Unis, Maghreb, Madagascar, Scandinavie...).
Tabac à mâcher
modifierIl existe plusieurs formes de tabac à mâcher, soit sous forme de feuilles broyées ou de plaques ou rouleaux de tabac compact.
L'utilisateur prend une portion de tabac et la mastique sans l'avaler. Les portions peuvent être aromatisées ; le jus peut être recraché.
Tabac à chiquer
modifierIci, l'utilisateur place une portion de tabac entre sa lèvre inférieure et ses dents (portion qu'il garde entre 10 et 30 minutes), et en consomme le jus, tout en crachant régulièrement le surplus. Contrairement au tabac à mâcher à proprement parler, la portion n'est pas directement mâchée mais simplement laissée dans la bouche.
À Madagascar, il est nommé paraky en malgache ou pitsoky en langage rural. Au Maroc et en Algérie, ce genre de tabac est appelé chemma ; la portion est généralement placée sur la gencive, entre la lèvre supérieure et les dents.
Tabac à mâcher et baseball
modifierAlors que l'usage de tabac à mâcher est en forte baisse aux États-Unis, il demeure traditionnellement associé[1] au baseball professionnel en Amérique du Nord. Une étude de la faculté d'odontologie de l'Université de Californie à San Francisco estimait en 1998 que de 35 % à 40 % des joueurs professionnels de baseball utilisaient le tabac à mâcher[2]. Selon les données compilées par la Pro Baseball Athletic Trainers Society, 33 % des joueurs de la Ligue majeure de baseball en consommeraient en 2014, une diminution de 17 % en 20 ans, mais un nombre 10 fois plus élevé que dans la population en général aux États-Unis selon l'American Cancer Society[3],[4],[5].
Dès les premières années où ce sport est pratiqué, au XIXe siècle, les joueurs de baseball mâchent du tabac[6], habitude courante dans la société américaine de l'époque. Le joueur de baseball y trouvait certains aspects pratiques : l'avant-champ du terrain est poussiéreux et mâcher du tabac lubrifie la bouche[7] ; le cuir des gants de baseball est assoupli avec le crachat dans les années 1870 et 1880[8] ; les lanceurs utilisent le crachat caractéristique d'un mâcheur de tabac pour leur balle mouillée, technique aujourd'hui illégale mais répandue et permise jusqu'aux années 1920[6]. Alors que le tabac à mâcher perd en popularité au profit des cigarettes, le monde du baseball résiste et se montre méfiant à l'endroit du tabac à fumer, croyant qu'il peut causer de la fatigue ou même de la malchance[9]. Le tabac à mâcher connaît un regain de popularité dans la Ligue majeure de baseball dans les années 1970, alors que les risques de fumer sont mieux connus[7],[9]. Il n'est alors pas rare que les compagnies de tabac distribuent gratuitement des échantillons de leurs produits à chiquer aux équipes des ligues majeures et mineures, voire dans les collèges[9]. Cette pratique est interdite par plusieurs équipes de la Ligue majeure de baseball dans les années 1980[7],[10].
Plusieurs voix se sont élevées contre l'usage du tabac à mâcher au baseball et en faveur de son interdiction. L'ancien joueur Bill Tuttle (en) meurt en 1998 après une longue bataille contre un cancer de la bouche. Dans les cinq années précédant son décès, il prononce devant les joueurs professionnels des conférences les mettant en garde contre l'usage du tabac à mâcher, et milite pour que les jeunes ne soient pas exposés à cette habitude à la télévision[11]. L'ancien joueur et commentateur sportif Joe Garagiola fait chaque année la tournée des camps d'entraînement pour parler des dangers du tabac à mâcher, qu'il a abandonné à la fin des années 1950[12]. En 2003, Sammy Sosa est porte-parole d'une campagne contre le tabac dans les sports[13]. Le joueur étoile Tony Gwynn s'est publiquement prononcé contre cette habitude qui, selon lui[14] (mais pas selon l'opinion des spécialistes[15],[16]), est responsable de la tumeur des glandes salivaires qui l'emporte en 2014[17].
Encouragée par des politiciens membres du Congrès des États-Unis[18],[19], la Ligue majeure de baseball (MLB) dit envisager de bannir le tabac à mâcher des terrains et des stades, mais doit négocier une telle interdiction avec l'Association des joueurs. Dans la convention collective signée en entre la Ligue et le syndicat des joueurs, certaines mesures sont approuvées, mais l'usage du tabac à mâcher ou à priser reste permis durant les matchs, sur le terrain ou dans l'abri des joueurs[19]. Il est toutefois désormais interdit aux joueurs et entraîneurs de garder ces produits dans la poche de leur uniforme, de les laisser où ils pourraient être filmés par les caméras de télévision, ou encore d'en consommer lors des interviews avant et après les matchs[19].
La National Collegiate Athletic Association interdit en 1990 l'usage du tabac à mâcher durant les matchs de baseball[7]. Les ligues mineures de baseball ont quant à elles strictement interdit le tabac à mâcher en 1993 pour tout le personnel associé aux clubs, que ce soit dans les stades ou les déplacements[18].
En 1980, la Wrigley Company commence à produire un produit, depuis 2010 distribué par Ford Gum (en)[20], appelé Big League Chew (littéralement : « chique des grandes ligues »). Il s'agit d'un chewing-gum ayant l'apparence de tabac à chiquer et proposée comme alternative par son créateur, l'ancien joueur de ligues mineures Rob Nelson, et son partenaire d'affaires, l'ancien joueur Jim Bouton[21]. Elle est également controversée pour sa ressemblance avec le produit qu'elle souhaite remplacer[21].
Notes et références
modifier- (en) Players find tobacco habit hard to shake, Peter Abraham, The Boston Globe, 7 mars 2014.
- (en) Prevalence of spit tobacco use across studies of professional baseball players, Greene JC, Walsh MM, Letendre MA, 26 mai 1998.
- (en) As baseball ponders tobacco issue, Tony Gwynn to get his say, Jorge L. Ortiz, USA Today, 20 juin 2014.
- (en) Smokeless Tobacco: Why Is It Still Part of Major League Baseball?, Mike Gilleran, Université de Santa Clara, 2 juillet 2014.
- (en) Saunders: Bud Selig hopes to put a stop to smokeless tobacco, Patrick Saunders, The Denver Post, 16 juillet 2014.
- (en) Why Do So Many Baseball Players Chew Tobacco?, Brian Palmer, Slate, novembre 2011.
- (en) Murray R. Nelson, American Sports: A History of Icons, Idols, and Ideas: A History of Icons, Idols, and Ideas, ABC-CLIO, 2013, p. 351. (ISBN 9780313397530).
- (en) Good Question: Why Do Baseball Players Still Spit So Much?, Heather Brown, WCCO-CBS, 30 juillet 2013.
- (en) Baseball and Chewing Tobacco: A Strange History, Glenn McDonald, Discovery, 9 avril 2013.
- (en) For Major Leaguers, Tobacco Road May Be Dangerous, Jay Searcy, The Philadelphia Inquirer, 16 mai 1988.
- (en) Bill Tuttle, 69, an Opponent Of Use of Chewing Tobacco, Richard Goldstein, The New York Times, 30 juillet 1998.
- (en) Garagiola, Who Quit, Warns About Chewing Tobacco, George Vecsey, The New York Times, 29 mai 2010.
- (en) Sammy Sosa makes pitch against spit tobacco, John Morgan & Stephen A. Shoop, M. D., USA Today, 28 octobre 2003.
- (en) [sports.espn.go.com/mlb/news/story?id=5665646 Tony Gwynn diagnosed with cancer], ESPN, 10 octobre 2010.
- (en) Tony Gwynn battled rare cancer, Deborah Sullivan Brennan, The San Diego Union-Tribune, 16 juin 2014.
- (en) Did Chewing Tobacco Kill Tony Gwynn?, Matt McCarthy, Deadspin, 20 juin 2014.
- Tony Gwynn est mort, Radio-Canada, 16 juin 2014.
- (en) MLB, players to discuss tobacco in CBA, Alden Gonzalez / MLB.com, 14 avril 2010.
- (en) MLB players, owners sign agreement, ESPN, 23 novembre 2011.
- (en) Matt Kemp image on gum pouch, Darren Rovell, ESPN, 6 mars 2013.
- (en) After 30 years, Big League Chew's bubble hasn't burst, Dan Simmons, Chicago Tribune, 9 juillet 2010.
Voir aussi
modifierArticles connexes
modifierLiens externes
modifier- Ressource relative à la santé :
- (en) PatientLikeMe
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :