mon compatriote n’avait eu aucune de
ces raisons majeures qui justifient en
quelque façon un acte aussi contraire à
la nature. Il était peu fortuné ; arrivé
de l’Amérique où il avait recueilli des
lauriers et épuisé sa bourse, le défaut
d’argent l’avait arrêté à Rotterdam ; il
avait écrit plusieurs lettres à sa famille,
sans en avoir reçu de réponse. La douleur
que cette indifférence de ses parents
lui causa, jointe à l’impossibilité de
pouvoir satisfaire son hôte, peine bien
sensible pour une âme noble et fière,
avaient enflammé son âme ardente et
sensible, et dans un transport où le
jetait cet état fâcheux, il s’était ôté la
vie ; il y avait donc plus d’exaltation
dans sa tête, que de désespoir dans son
cœur : je n’en trouvai son sort que plus
déplorable.
J’étais dans cette situation, lorsqu’un matin je fus distraite de mes sombres contemplations par une voiture qui entra avec grand bruit dans la cour de l’auberge. Le tumulte qui s’ensuivit,