Trois mois s’étaient écoulés pendant l’absence de mon maître. Darmancourt qui avait laissé sous le bistouris les deux tiers et demi de son… modèle, était devenu d’une dévotion exemplaire. Il revint à la maison. La perte de ce qu’il avait de plus cher le rendit plus tranquille, et nous y gagnâmes tous les deux par les progrès que nous faisions, moi dans la peinture et lui dans l’embonpoint.
Devenu dévot, mon peintre écourté fut l’apôtre dont le ciel se servit pour me placer dans le droit chemin. La froideur de son sang avait fait pour lui ce que la fermentation du mien avait fait pour moi. Tous les deux nous aimions Dieu par des causes opposées. M’apercevant dans ces bonnes dispositions (il avait déjà soustrait de mon portefeuille toutes les nudités) il ne me donna plus à copier que des sujets de sainteté. Une vierge de Rubens succéda à une Vénus de Le Brun, St-Pierre à un Priape, l’ange Gabriel à Ganymède, etc. Enfin si je n’ap-