Chaque fois, au moment de la séparation, c’était une scène déchirante, car il voulait retourner avec sa tante à Beausite.
Pour Claire, elle ne cherchait pas à revoir l’enfant, ne se sentant pas assez forte pour cette épreuve, et la redoutant aussi pour lui. Dès la seconde semaine qui suivit le départ de Fernand, on remarqua qu’elle s’absentait régulièrement tous les deux jours à la nuit tombée, après avoir couché sa petite fille et elle restait absente une heure environ. Anna et madame Grandvaux crurent à des entrevues avec Camille, mais on sut plus tard que Claire courait seule ainsi jusqu’à Montbenon, où Louise venait lui rendre compte de tout ce que l’enfant avait fait, ou plutôt souffert, pendant ces deux jours. Les tortures que cette pauvre femme recueillait ainsi de la bouche étourdie de la jeune servante, elle seule eût pu les dire, et elle n’en parla jamais. Anna en devina la plus grande partie, par ce qu’elle tenait elle-même de Louise : c’étaient tous les détails d’un véritable martyre pour un enfant tel que Fernand. Sa belle-mère, impatiente, fantasque, le frappait quelquefois, lui que la douce main de sa mère n’avait touché de sa vie que pour lui apporter du bien-être, ou un témoignage de tendresse.
La petite Élisa le contrariait en toutes choses, le primait sur tout, lui arrachait ce qui était à lui, le pinçait parfois. On blâmait devant lui son éducation ; on riait de ses susceptibilités ; on contraignait ses répugnances. M. Desfayes était le premier à donner dans ce système, disant qu’on avait énervé cet enfant par trop de soins, et qu’il fallait le fortifier par un traitement tout différent. Cela ne pouvait avoir lieu sans un temps d’épreuve. C’est pourquoi on ne s’inquiéta pas trop de voir l’enfant pâlir,