Wikijunior:Les civilisations anciennes/Les Anasazis

Les Anasazis étaient des Indiens d'Amérique qui habitaient le Sud-Ouest des États-Unis actuels entre le VIIIe et le XIIIe siècle de notre ère. Ils ont construit une brillante civilisation fondée sur l'irrigation et des villages énigmatiques.

Qui étaient les Anasazis ?

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Le mot Anasazi, qui veut dire "anciens", est utilisé par les Amérindiens pour désigner leurs lointains ancêtres. Les Espagnols ont baptisé leurs descendants les pueblos, terme signifiant villages. En effet, les pueblos, comme les Anasazis, vivaient dans des maisons à plusieurs étages, construites en dur et groupées. Aujourd'hui, les Indiens Hopis utilisent le mot "Hisatsinom" plutôt que celui d'"Anasazi". Enfin, les historiens regroupent parfois sous l'appellation "Anasazi" plusieurs cultures semblables et qui ont vécu dans la même région : les Hohokams, les Mogollons et les Patayans, des peuples qui ont tous disparu avant l'arrivée des Européens en Amérique.

Dans quelle région vivaient-ils ?

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La région des Anasazi (en vert). Elle s'étend sur quatre états du sud-ouest des États-Unis. Elle est voisine des cultures Hohokam (en violet) et Mogollon (en orange. Les trois sites archéologiques les plus importants sont Mesa Verde (1), Chaco Canyon (2) et Gila Cliff (3)

Les archéologues ont retrouvé des vestiges de cette culture dans quatre états américains : Arizona, Utah, Nouveau-Mexique et Colorado. Comme ces états se touchent par un coin, on désigne cette région sous le nom anglais de Four Corners (région des "Quatre Coins"). Si les paysages de ces contrées sont grandioses, les conditions naturelles rendent la vie difficile : la sécheresse marque la plupart des espaces, qui prennent un aspect désertique à certains endroits.

Cependant, les Anasazis savent utiliser les ressources naturelles et respecter l'équilibre de l'environnement. Ils cueillent par exemple les feuilles du yucca pour les tresser. Ils maîtrisent les techniques agricoles et se sont adaptés aux contraintes du milieu. Les produits qu'ils ne trouvent pas sur place sont importés d'autres régions. Ensuite, l'altitude est une autre contrainte. Les hivers sont froids et la neige peut recouvrir le sol. L'écart des températures entre l'hiver et l'été est important. À l'est, les Montagnes Rocheuses culminent à plus de 4 000 mètres au-dessus du niveau de la mer. L'aire de la culture anasazie s'étend sur de hauts plateaux, parcourus par des fleuves qui coulent dans des vallées encaissées. Les habitants se sont surtout installé sur les mesa, terme espagnol signifiant "table", des plateaux rocheux balayés par les vents.

À quoi ressemblaient leurs habitations ?

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Ruines anasazies, dans l'Arizona
  • Les plus anciennes habitations des Anasazies étaient bien modestes : il s'agissait de petites maisons, chacune assez grande pour loger une famille. Elles étaient aménagées dans des fondations peu profondes. Leur toit était recouvert de terre et de branchages. Elles se sont regroupées progressivement pour former des hameaux.
  • Par la suite, les villages des Anasazis pouvaient abriter plusieurs centaines d'habitants. Agriculteurs sédentaires, les Anasazis cultivaient leurs champs qui étaient proches des habitations. Les murs étaient faits d'une sorte de pisé appliqué sur un treillage. Les constructions les mieux conservées aujourd'hui comportait une structure de pierres sèches tenues ensemble par un mortier. Le toit était recouvert par des couches d'argile et de branchages maintenus sur des rondins de bois. Les maisons ne comptaient qu'un seul niveau au début, mais pouvaient s'agrandir par le haut, en ajoutant un ou deux étages supplémentaires. Plusieurs pièces étaient réservées au stockage de la nourriture.

Vers l'An Mille de notre ère, ce type de construction élaborée devient de plus en plus fréquent.

  • Dans les villages, les archéologues se sont beaucoup intéressé aux kivas : de forme carrée ou circulaire, ces pièces étaient dévolues au travail ou au repos dans les premiers temps. Puis, les grandes kivas semblent avoir servi de lieu de cérémonies religieuses pour la communauté.
  • Les Anasazis savaient choisir des sites naturels exceptionnels pour s'installer : plusieurs villages se sont ainsi abrités sous d'imposantes falaises au XIIIe siècle. Creusées dans les parois de gigantesques canyons, les habitations troglodytes attirent toujours la curiosité des touristes. Ce type d'habitat présentait l'avantage d'offrir une protection contre la pluie ou la neige. L'orientation des villages préservait la communauté du froid en hiver et de la canicule en été. De plus, de tels sites constituaient un rempart naturel contre d'éventuelles attaques. En revanche, les champs étaient plus éloignés des habitations et moins accessibles pour les habitants.

Que mangeaient-ils ?

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Bighorns : les Anasazis chassaient parfois ces animaux dans les zones montagneuses
  • Les Anasazis cultivaient le maïs (qui était à la base de leur alimentation), les haricots, les courges, le tabac. Les champs se trouvaient sur les espaces plats (mesas, plaines ...) jusqu'à 2100 mètres au-dessus du niveau de la mer. Plus haut, les conditions climatiques étaient trop difficiles pour cultiver.
  • Les Anasazis ont progressivement adopté les techniques d'irrigation venues du Mexique : soit en puisant l'eau des fleuves (Rio Grande), soit en constituant des réserves d'eau de pluie. La construction de petits barrages, de canaux et de réservoirs nécessitait une certaine organisation de la communauté. Une partie des récoltes était entreposée en cas de mauvaises récoltes.
  • Malgré tout, les Anasazis n'ont jamais complètement abandonné la chasse et la cueillette pratiquée par leurs ancêtres nomades. Pignons, baies, fruits sauvages constituaient une nourriture d'appoint. Ils trouvaient du gibier dans les montagnes (biches, wapitis, antilopes, bigornes). Les animaux plus petits (lapins, écureuils, oiseaux ...) étaient capturé au moyen de pièges et de filets en yucca.
  • Le maïs et les courges étaient séchés et stockés. Les pommes de pin étaient détachées à l'aide de perches avant d'être chauffées pour qu'elles libèrent les pignons. Ces derniers étaient soit consommés directement, soit écrasés pour préparer de galettes. Les graines de tournesol devaient être écossées et entreposées dans des jarres. Les petits animaux (lapins ...) étaient la source principale de viande. Les animaux plus grands étaient débités sur le lieu de chasse. La viande était accommodée en ragouts ou bien hachée. On appréciait également la moelle des os et on gardait la peau pour d'autres usages. L'élevage des dindes ne servaient qu'à fournir des plumes. Leur viande n'était pas consommée. Comme les chiens, elles servaient plutôt d'animal de compagnie.
 
Céramique des Indiens Hopis. Les Hopis sont les descendants des Amasazis
  • Les céréales étaient gardées dans des récipients fermés, afin des les protéger des rongeurs et des insectes. Au VIe siècle apparaît une poterie décorée de figures (lignes, points) qui reprennent sans doute des décors simples de vannerie. Plus tard, le décor devient plus complexe : des représentations d'animaux ou d'êtres humains sont dessinées. Les couleurs utilisées sont différentes selon les régions : noir et blanc dans le Colorado, noir et rouge dans le nord de l'Arizona, rouge et chamois dans l'Utah.

La poterie était souvent richement décorée de motifs incrustés avant cuisson au moyen de divers objets (épis de céréales, tige de yucca ou coquillages).

  • On faisait du feu en frottant un bâton sur une plaque de bois. Il était ensuite entretenu dans un trou creusé à même sol. Pour cuisiner, on se servait d'ustensiles en terre cuite, en bois ou en os. Pour faire bouillir de l'eau, on ne devait pas allumer un feu sous une poterie : cela la détruirait ! Alors on déposait des pierres brûlantes au fond du récipient afin qu'elles chauffent le liquide.

Quelles étaient leurs croyances ?

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  • Les Anasazis ont laissé de nombreux pétroglyphes dans le désert américain sur des falaises en grès. Il s'agit de dessins plus ou moins stylisés, gravés dans la paroi des canyons. Ils peuvent être isolés ou couvrir plusieurs mètres carrés. Les archéologues ne peuvent faire que des suppositions quant à leur signification :
    • Ces dessins figurent souvent des animaux et témoignent de l'importance de la chasse.
    • D'autres signes seraient des cartes rudimentaires indiquant des sources ou des villages.
    • La figuration de céréales représentent une bonne récolte.
    • Certains motifs représentent une famille ou un groupe d'hommes.
    • Les spirales évoquent le mouvement du soleil ou le temps qui passe. Elles appartiennent peut-être à une sorte de calendrier rituel. Pour les Pueblos d'aujourd'hui, elles symbolisent les migrations des tribus.

Plusieurs sites de pétroglyphes sont en relation avec le solstice. Ceux de Hovenweep National Monument indiquent clairement ce moment de l'année. Les alignements de bâtiments du site archéologique de Chimney Rock prouvent que les Anasazis comprenaient et savaient prévoir les cycles lunaires.

  • Les historiens ignorent s'il existait un clergé structuré. On sait que certains personnages recherchaient occasionnellement à provoquer des visions en prenant des plantes hallucinogènes. Des graines de datura ont été retrouvées à Mesa Verde : cette plante toxique provoque des hallucinations. *Les anciens Anasazi rendaient un culte au dieu Kokopelli ainsi qu'aux kachinas, des esprits invisibles. Il existait des cérémonies collectives destinées à invoquer les esprits afin qu'ils protègent la communauté. Elles étaient sans doute organisées dans les kivas. Les kivas étaient des emplacements creusés dans le sol et recouverts d'un toit ; on y descendait par une petite échelle pour pratiquer le culte ou réunir le conseil. Des fêtes religieuses liées aux cycles agricoles devaient également être célébrées.

Comment étaient-ils organisés ?

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La société devait probablement ressembler à celle des Pueblos actuels. Elle est matrilinéaire. Le mari doit intégrer le clan de sa femme. La terre et la maison appartiennent à la mère. La femme peut divorcer. Les archéologues ne sont pas certains que les Anasazis vivaient en clans. Ils penchent plutôt pour une organisation égalitaire, sans groupes sociaux hiérarchisés.

Quels objets fabriquaient-ils ?

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Turquoises
  • Les hommes tissaient le coton pour en faire des couvertures et des chemises. Ils utilisaient d'autres fibres végétales (yucca) ou animales (fourrures) pour leurs vêtements. Ils portaient des sandales et des mocassins, et probablement des chaussures adaptées à la neige pour l'hiver.
  • Les bijoux étaient courants : colliers, boucles d'oreilles, bracelets, broches, peignes étaient faits en bois, en os, en corail, en jais et en pierres diverses (turquoise ...).
  • Les Anasazis faisaient venir des coquillages de Californie, des perles de cuivre du Mexique, du coton du sud... Les marchands empruntaient des sentiers qui formaient un réseau assez vaste. Mais il n'y avait pas de véritables routes aménagées pour le commerce, contrairement aux voies de l'empire inca. Pueblo Bonito est attesté comme l'un des grands centres de commerce des Anasazis. On ne payait pas avec de l'argent mais en donnant quelque chose en échange : c'est le système du troc.
  • Les artisans réalisaient toutes sortes d'objets en terre cuite : jarres, bols, pichets, cuillères, petites figurines ...
  • Dans la vie quotidienne, les Anasazis se servaient de différents objets :
    • Paniers, corbeilles faits en osier, yucca, sumac étaient destinés à de multiples usages. Ils étaient par exemple utilisés comme sac-à-dos pour transporter des outils, des branchages ou de la nourriture.
    • Outils et armes en pierre (flèches, couteaux en obsidienne).
    • Objets pour le tissage du coton, pour coudre le cuir (aiguilles en os).
    • Fil (parfois en cheveux), ficelle et cordages (fibres de yucca)

  Guide du petit archéologue

  • Que nous enseignent les objets ?

Alors qu'autrefois les archéologues ne s'intéressaient qu'aux objets précieux et aux monuments, ils étudient aujourd'hui tous les restes de l'activité humaine passée (os, dépôts d'ordures, traces de feu ...). La conservation des objets anciens dépend des conditions climatiques et des matériaux utilisés : un objet en métal ou en pierre se conserve mieux qu'un objet en bois. Un climat désertique ou un milieu très humide (tourbe) garde mieux les matériaux. La glace est également un milieu propice à la sauvegarde des vestiges. Les objets retrouvés par les archéologues sont une bonne source d'information lorsqu'on ne dispose d'aucun document écrit. Ils nous éclairent sur la vie quotidienne, les techniques, l'organisation sociale ou les croyances. En classant et en comparant ces vestiges, il est possible de reconstituer une partie de l'histoire de civilisations disparues.


Pourquoi ont-ils disparu ?

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À partir de 1300, les Anasazis se réfugient dans la vallée du Rio Grande et au centre de l'Arizona. On finit par perdre leur trace avant l'arrivée des Européens. Les causes de cette disparition sont difficiles à établir avec certitude :

  • Un changement climatique a-t-il menacé les récoltes ?
  • L'environnement s'est-il soudainement dégradé ? (déforestation, manque de terres cultivables ?)
  • La pression démographique est-elle devenue trop forte ?
  • Des problèmes d'ordre politique sont-ils apparus ? Des guerres ont-elles ruiné la région ?

En l'absence de documents écrits et en l'état des connaissances actuelles, il est difficile de répondre à ces questions.

Où peut-on voir les restes de cette civilisation ?

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Le site anasazi de Mesa Verde

Il existe des centaines de sites archéologiques aux États-Unis ; certains sont ouverts au public :

  • Mesa Verde
  • Chaco Canyon (Nouveau-Mexique)
  • Dolores Valley (500 / 1000)
  • Escalante Pueblo
  • Chimney Rock, près de Pagosa Springs (Colorado)
  • Hovenweep National Monument
  • Mancos (Colorado)
  • Tin Cup Mesa (Utah)
  • Canyon of the Ancients National Monument
  • Aztec Ruins National Monument
  • Casa Grande Ruins National Monument
  • Gila Cliff Dwellings National Monument
  • Bandelier National Monument
  • Montezuma Castle National Monument
  • Tuzigoot National Monument
  • Wupatki National Monument

Que lire sur les Anasazis ?

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Livres pour la jeunesse

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  • Gilbert Legay, Dictionnaire des Indiens d'Amérique du Nord, Paris, Casterman, 2005.
  • Bill Asikinack, Kate Scarborough, L'Amérique du Nord, Paris, Bayard, 1996.
  • Yves Cohat, L'Amérique précolombienne [...], Paris, Hachette, 2004.
  • "Les Anasazis", magazine Géo, n°265, 2001, page 136

Voir aussi l'article de wikipédia

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