Le Louxor

cinéma français dans le 10e arrondissement de Paris

Le Louxor est une salle de cinéma située au no 170, boulevard de Magenta dans le 10e arrondissement de Paris (France), construite par l'architecte Henri Zipcy[1] et inaugurée le [2].

Le Louxor
Description de cette image, également commentée ci-après
Le Louxor en 2020.
Type Salle de cinéma
Lieu Paris 10e
Coordonnées 48° 53′ 01″ nord, 2° 20′ 59″ est
Architecte Henri Zipcy (1920)
Philippe Pumain (2008)
Inauguration
(réouverture)
Fermeture de à 2013
Nb. de salles 1 (1921)
3 (2013)
Capacité 1 195 places (1921)
342, 140 et 74 places (2013)
Catégorie Miniplexe
Réseau art et essai
Format de langue VOST
Format de projection CinemaScope
Format de son Dolby
Anciens noms Louxor-Palais du Cinéma (1921-1983)
La Dérobade (1984-1987)
Megatown (1987-1990)
Site web http://www.cinemalouxor.fr

Carte

Inscrite au titre des monuments historiques le (façades et toitures)[3], elle est transformée en boîte de nuit en 1983. Fermée en 1988 et laissée à l'abandon, elle rouvre finalement le [4], entièrement rénovée et dotée désormais de trois salles.

Historique

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Construction et inauguration

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Dans le 10e arrondissement de Paris, à l’angle du boulevard de la Chapelle et du boulevard de Magenta, le cinéma est édifié en 1921, à l’emplacement du grand magasin Sacré-Cœur Nouveautés[5], par l’architecte Henri Zipcy[6] pour le compte de l’investisseur Henry Silberberg[7] (comme en témoignent les plans d’origine).

Inauguré le [8], avec au programme[9] un film de science-fiction danois muet de 1918 À 400 millions de lieues de la Terre (Himmelskibet) réalisé par Holger-Madsen, accompagné de films courts et d’extraits de Métempsycose (The Star Rover) d'Edward Sloman (1920), Pour un corset (Betty’s Green-Eyed Monster) de Arvid E. Gillstrom et Lui… sur des roulettes (Don’t Shove / Poussez pas !) d’Alfred J. Goulding et Hal Roach, avec Harold Loyd (1919) et des actualités Gaumont.

Rare rescapé des cinémas d’avant-guerre, le Louxor est un remarquable exemple de l’architecture antique des années 1920. La façade néo-égyptienne — dont il tire son nom en référence à la ville de Louxor[8]  — et les toitures de ce bâtiment ont été inscrites à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques le . Les mosaïques multicolores de la façade (bleu cobalt, noir et or), œuvre du décorateur Amédée Tiberti[6], ont été réalisées par la fabrique de céramiques Gentil et Bourdet[10], implantée à Billancourt et très réputée dans les années 1920-1930. Aux motifs floraux s’ajoutent scarabées, cobras et, au-dessus de la petite terrasse, un grand disque ailé. La salle avec ses deux balcons offre alors 1 195 places.

Adoption du style néo-égyptien

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Pourquoi avoir choisi l’Égypte antique plutôt que Rome ou le règne de Louis XVI – alors fort en vogue dans les édifices de spectacle ? Il s'agissait de singulariser ce cinéma de ses concurrents, et le style égyptisant présentait une originalité forte. L'historien François Loyer, dans un article publié sur le site Action Barbès, a avancé l'hypothèse de l'influence d'un film sur Cléopâtre, avec Theda Bara, La Reine des Césars, tourné en 1917 pour la compagnie Fox par J. Gordon Edwards. Or rien ne prouve cette assertion, d'autant que l'origine du décor égyptien est plutôt à chercher dans le domaine architectural (Exposition universelle de 1900 et autres bâtiments égyptisants parisiens)[11]. L’investisseur Henry Silberberg a-t-il choisi lui-même le nom du Louxor et sa décoration néo-égyptienne, ou est-ce une initiative de l’architecte Zipcy et des décorateurs ?

Transfert aux cinémas Lutétia (1922-1929) puis à Pathé (1929-1983)

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L'investisseur Henry Silberberg, mis en faillite par une banque italienne, meurt en [12]. Le Louxor, mis en liquidation en [13], est acheté en par la Société des cinémas Lutétia dirigée par Paul Fournier[14].

Les cinémas Lutétia jouent, pendant les années 1920, un rôle de premier plan dans l’exploitation cinématographique avec les cinémas Aubert. Le réseau Lutétia dispose de treize salles à Paris en 1924, dont les très prestigieux Lutétia-Wagram (ouvert en 1913) et Royal-Wagram (ouvert en 1918). En 1929, la vingtaine d’établissements du groupe est reprise par la société Pathé qui l'adapte au cinéma sonore.

 
Le Louxor en 1930. À l’affiche : Monsieur le duc de Jean de Limur.

Le Louxor, comme tant de salles de quartier, subit les conséquences du déclin de fréquentation qui s’amorce dès la fin des années 1950, obligeant le cinéma à se renouveler et les exploitants à moderniser leurs salles. Couleur, CinemaScope, qualité du son, le Louxor suit le mouvement et s’adapte. S'il conserve au cours des années sa structure originelle et possède encore une vaste salle avec deux niveaux de balcon, il a subi plusieurs transformations, notamment en 1954 et 1964.

La programmation, elle aussi, doit s’adapter aux changements sociologiques et au goût du public qui le fréquente. Longtemps cinéma populaire qui passe aussi bien les succès français grand public que les films américains, le Louxor choisit de projeter à partir des années 1970 des films « exotiques » (indiens, égyptiens par exemple) en version originale, susceptibles d’attirer une population immigrée en nombre croissant dans le nord-est de Paris ainsi que du porno soft[15]. En 1976, la projection du film Chronique des années de braise devient un événement culturel et social pour le quartier.

Vente du Louxor et transformation éphémère en boîte de nuit dans les années 1980

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Le se tient la dernière séance du Louxor et Pathé vend le bâtiment à la société Tati qui souhaite y implanter un commerce et empêcher qu'un concurrent ne s’y installe[15]. Faute de pouvoir modifier la façade, le projet échoue et Tati cède la gérance à des projets d’exploitation de boîtes de nuit au milieu des années 1980 : d'abord boîte de nuit antillaise baptisée La Dérobade, il devient en la plus grande discothèque gay de la capitale sous le nom de Megatown. Elle ferme en 1988, peu avant la mort de son créateur David Girard en 1990, et le bâtiment est laissé à l'abandon. Le Louxor - Palais du cinéma connaît alors une longue éclipse.

Renouveau

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À partir de 2001, des associations de quartier — parmi lesquelles Action Barbès — se mobilisent pour sauver ce patrimoine de la ruine. Leur revendication est double : que la ville de Paris rachète le Louxor et le rende à sa vocation culturelle. Après deux ans de mobilisation, la municipalité parisienne parvient à trouver un accord avec la société Tati et rachète le bâtiment le . En 2008, l’architecte Philippe Pumain est désigné pour mener une opération de réhabilitation[16] dont les travaux commencent courant 2010, pour une ouverture prévue au printemps 2013.

Avec la restauration de sa façade, la restitution partielle de la grande salle (réduite), devant porter le nom de « salle Youssef-Chahine », et de ses décors, la création de deux nouvelles salles en sous-sol, le Louxor doit être rendu à sa vocation initiale de salle de cinéma. Le plafond de la plus petite salle est voûté en anse de panier, en référence aux tombeaux égyptiens de la vallée des Rois, et d'un ton sombre pour la décoration. La salle moyenne reprend le thème de la salle à colonnades et a un « plafond ciel », bleu égyptien, thème décoratif que l’on retrouve dans un certain nombre de tombeaux égyptiens.

Un espace d’exposition et un café-club doivent compléter cet ensemble[17].

Le projet est néanmoins critiqué par l'association Action Barbès, contestant ainsi les choix de la ville de Paris, tant en matière de programmation culturelle que de défense du patrimoine, estimant en particulier que le projet d'un cinéma d'art et d'essai n'est pas adapté au quartier et que les réalisations prévues en sous-sol (création de salles et mise aux normes) sont destructrices d’une partie du patrimoine encore intact (décors, scène et fosse d'orchestre par exemple)[18].

L'association Les Amis du Louxor, créée en par des anciens membres d’Action Barbès favorables au projet, se propose quant à elle de garder le contact avec les intervenants au projet (architecte, responsables de la ville et de la mission Cinéma, élus locaux) afin de recueillir et diffuser des informations sur l’avancement des travaux et de participer à une future concertation sur la programmation lorsque celle-ci sera lancée.

En , une nouvelle association, « Paris-Louxor, vivre ensemble le cinéma »[19], voit le jour, avec pour but d'accompagner le projet, présent et à venir autour du cinéma Le Louxor, « de favoriser, développer et promouvoir des actions et des activités autour et avec le cinéma Le Louxor dans les champs d'interventions culturels, artistiques, patrimoniaux, éducatifs et sociaux » selon leur site Internet. Elle organise nombre de manifestations (rencontres, expositions, visites de quartier, interventions dans la ville, soirées-projection...) afin de mettre en relation les différents acteurs du projet[20] — habitants, représentants culturels locaux, élus et ville de Paris — et participe au suivi du chantier[21] et à la reconstitution de l'histoire du Louxor au moyen de son site internet participatif.

Le , le conseil de Paris examine la proposition de délégation de service public pour l'exploitation de la salle puis l'octroie à la société CinéLouxor, constituée de la holding « Haut et court », de la société Xanthie Films et d'Emmanuel Papillon, lequel va diriger le Louxor avec Carole Scotta et Martin Bidou.

La salle principale, reconstruction à l'identique de la salle no 1 de 1921, conçue dans un style néoégyptien, a été baptisée du nom du réalisateur égyptien Youssef Chahine[22].

La salle no 2, baptisée « Juliet-Berto - Jean-Henri-Roger[23] » le [24], évoque avec son plafond étoilé les tombes de la vallée des Rois.

La salle no 3 a une voûte en anse de panier dans les tons rouges ; un bar avec des luminaires Art déco a également été installé[25].

La date de l'inauguration est finalement fixée au [8],[26] et l'ouverture le avec au programme les films The Grandmaster de Wong Kar-wai, No de Pablo Larraín, Free Angela de Shola Lynn et Le Repenti de Merzak Allouache.

Un an après[27] son ouverture, le , dans une interview au site Paris-Louxor.fr, les dirigeants du Louxor annoncent avoir réalisé 265 000 entrées pour un objectif initial de 170 000 à 180 000 entrées. En , le Louxor enregistre sa millionième entrée depuis sa réouverture quatre ans plus tôt[28].

Galerie

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Wikimedia Commons présente d’autres illustrations sur Le Louxor.

Notes et références

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  1. Chronologie sur Les Amis du Louxor, consulté le 12 juillet 2009.
  2. « INAUGURATION DU LOUXOR. DEMANDEZ LE PROGRAMME ! Exclusif », sur Paris-Louxor.fr
  3. Notice no PA00086484, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture.
  4. « INAUGURATION DU LOUXOR » (consulté le )
  5. (es) Pep Bras, La niña que hacía hablar a las muñecas, Siruela, (lire en ligne), p. 155
  6. a et b Le nom de l’architecte Henry Zipcy fut longtemps déformé en Ripey, tout comme celui d’Amédée Tiberti, le peintre qui réalisa la décoration intérieure du Louxor, le fut en Amédée Tibéri.
  7. Henry Silberberg est un homme d’affaires qui a racheté l'immeuble haussmannien pour faire construire à sa place un luxueux bâtiment, conçu pour être une salle de cinéma, qu’il avait l’intention de gérer lui-même.
  8. a b et c Le Louxor : renaissance d'un palais du cinéma, dans À Paris no 46, printemps 2013, p. 26
  9. « Inauguration du Louxor. Films et actualités » (consulté le )
  10. Site officiel de l'entreprise
  11. Cf. l'ouvrage réalisé par Les Amis du Louxor sous la direction de Jean-Marcel Humbert et Philippe Pumain, Le Louxor - Palais du Cinéma, éditions AAM-Bruxelles, 2013.
  12. Nicole Jacques-Lefèvre, « Un certain Henri Silberberg… », sur Les Amis du Louxor
  13. (en) « Film business poor », Variety,‎ (lire en ligne)
  14. Nicole Jacques-Lefèvre, « 1922 : Madame Silberberg vend le Louxor », sur Les Amis du Louxor
  15. a et b Alain Riou, « Le Louxor, la renaissance », sur Nouvelobs.com,
  16. Vues du projet sur le site officiel de l'architecte
  17. Entretien avec Philippe Pumain sur Les Amis du Louxor
  18. Entretien avec Agnès Cailliau, François Loyer et Stéphane Ricout sur Action Barbès
  19. « « Vivre ensemble le cinéma »: le Louxor en son quartier », sur www.salles-cinema.com
  20. « Le cinéma du boulevard », Le Dossiers Canard Enchaîné n°140, Le cinéma pique sa crise,‎
  21. « Le Louxor en chantier, visite guidée »
  22. « Chahine, encore et toujours. Rencontre avec la nièce du cinéaste, Marianne Khoury. »
  23. « Interview de Jean-Henri Roger. Le tournage de Neige, Barbès, le Louxor, les salles du quartier et le cinéma »
  24. « Inauguration salle Juliet Berto/Jean-Henri Roger »
  25. Lena Lutaud, « La résurrection du cinéma Le Louxor », Le Figaro, mercredi 17 avril 2013, p. 13.
  26. Court-métrage d'animation projeté à l'inauguration
  27. « L’an 1 du nouveau Louxor »
  28. Benoît Hasse, « Paris : le Louxor de Barbès, « millionnaire » en 4 ans », sur leparisien.fr, (consulté le )

Annexes

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Bibliographie

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  • Aurélie Pinto, « Le Louxor : un “Palais du cinéma” à Barbès : Le projet d'un “établissement cinématographique de la Ville de Paris” », Théorème, no 22,‎ , p. 25–36 (présentation en ligne).
  • Emmanuelle Lallement, « Le Louxor-Palais du cinéma 1921-2013 : Une observation au temps de la fantasmagorie urbaine », Théorème, no 21,‎ , p. 67–74 (présentation en ligne).
  • Jean-Marcel Humbert (dir.) et Philippe Pumain (dir.) (préf. Costa-Gavras, photogr. Luc Boegly), Le Louxor : Palais du cinéma, Bruxelles, AAM, , 202 p. (ISBN 978-2-87143-274-6).
  • Jean-Marcel Humbert (dir.), Le Louxor : Palais du cinéma, Paris, Les Amis du Louxor, , 31 p. (ISBN 978-2-9557052-0-9).
  • Stéphane Delorme, « Le Louxor et les cinémas à l’égyptienne, rescapés ou disparus », Cahiers du cinéma, no 658,‎ , p. 86–93.
  • Amandine d'Azevedo, « Le Louxor, un pèlerinage cinéphile ? », Cahiers du cinéma, no 692,‎ , p. 88 (lire en ligne).
  • Renaud Olivero, « Le Louxor », dans Jean-Michel Frodon (dir.) et Dina Iordanova (dir.), Cinémas de Paris, Paris, CNRS Éditions, , 365 p. (ISBN 978-2-271-11480-8, présentation en ligne), p. 318–323.

Article connexe

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Liens externes

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