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JUDITH
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Puissance d’Arphaxad. Il est vaincu par Nabuchodonosor, qui veut ensuite se faire rendre hommage par les autres peuples voisins.


ARPHAXAD, roi des Mèdes, avait assujetti à son empire un grand nombre de nations, et il bâtit une ville très-forte, qu’il appela Ecbatane,

2. De pierres carrées et taillées ; il en fit les murailles de soixante-dix coudées de large et de trente coudées de haut ; et il en éleva les tours à la hauteur de cent coudées.

3. Et chacun de leurs côtés carrés s’étendait dans un espace de vingt pieds ; et il en fit les portes de la hauteur des tours ;

4. Et il se glorifiait comme étant invincible par la force de son armée et par la multitude de ses chariots de guerre.

5. Mais Nabuchodonosor, roi des Assyriens, qui régnait dans la grande ville de Ninive, fit la guerre, la douzième année de son règne, à Arphaxad, et le vainquit

6. Dans la grande plaine appelée Ragau, près de l’Euphrate, du Tigre, et de Jadason, dans la campagne d’Érioch, roi des Éliciens.

7. Alors le règne de Nabuchodonosor devint florissant, son cœur s’en éleva ; et il envoya à tous ceux qui habitaient dans la Cilicie, à Damas, sur le mont Liban,

8. Et aux peuples qui sont sur le Carmel, et en Cédar, et à ceux qui habitaient dans la Galilée, dans la grande campagne d’Esdrelon,

9. Et à tous ceux encore qui étaient en Samarie, et au-delà du fleuve du Jourdain jusqu’à Jérusalem, et dans toute la terre de Jessé jusqu’où l’on arrive aux confins de l’Ethiopie.

10. Nabuchodonosor, roi des Assyriens, envoya des ambassadeurs à tous ces peuples :

11. Mais tous d’un commun accord refusèrent ce qu’il demandait, renvoyèrent ceux qui étaient venus de sa part, sans qu’ils pussent rien obtenir, et les chassèrent avec mépris.

12. Alors le roi Nabuchodonosor irrité contre toute cette terre, jura par son trône et par son royaume qu’il se vengerait de toutes ces contrées.



Nabuchodonosor envoie Holoferne avec une puissante armée, pour s’assujettir tous les peuples voisins. Premiers exploits de ce capitaine. Il s’avance jusqu’à Damas.


1. L’an treizième du règne de Nabuchodonosor, le vingt-deuxième du premier mois, il fut décidé dans le palais de Nabuchodonosor, roi des Assyriens, qu’il se vengerait.

2. Il assembla tous les anciens, tous les généraux et ses guerriers, et il leur communiqua le secret de son dessein :

3. Il leur dit que sa pensée était d’assujettir à son empire toute la terre.

4. Ce qui ayant été approuvé de tous, le roi Nabuchodonosor fit venir Holoferne, général de ses troupes,

5. Et lui dit : Allez attaquer tous les royaumes d’Occident, et principalement ceux qui ont méprisé mes ordres.

6. Que votre œil n’épargne aucun royaume, et vous m’assujettirez toutes les villes fortifiées.

7. Alors Holoferne fit venir les chefs et les officiers des forces des Assyriens, et il compta pour se mettre en campagne, selon l’ordre qu’il en avait reçu du roi, cent vingt mille hommes de pied, et douze mille archers à cheval.

8. Il fit précéder son expédition d’une multitude innombrable de chameaux, avec les provisions qui entretenaient l’abondance dans l’armée, et des troupeaux de bœufs et de moutons qui étaient sans nombre.

9. Il commanda que dans toute la Syrie on tînt prêt du blé lorsqu’il passerait.

10. Il prit aussi de la maison du roi des sommes immenses d’or et d’argent.

11. Et il partit, lui et toutes ses troupes, avec ses chariots, sa cavalerie et ses archers, qui couvrirent la face de la terre comme des sauterelles.

12. Lorsqu’il eut dépassé les confins de l’Assyrie, il vint aux grandes montagnes d’Angé qui sont à gauche de la Cilicie ; il conquit tous les châteaux, et se rendit maître de toutes les places fortes.

13. Il prit d’assaut la célèbre ville de Mélothe, il pilla tous les habitants de Tharsis, et les enfants d’Ismaël, qui étaient vis-à-vis le désert et au midi de la terre de Cellon.

14. Et il passa l’Euphrate, et vint en Mésopotamie ; il força toutes les grandes villes qui étaient là, depuis le torrent de Mambré jusqu’où l’on arrive à la mer.

15. Et il s’empara du pays depuis la Cilicie jusqu’aux confins de Japheth qui sont au midi.

16. Il emmena avec lui tous les enfants de Madian, pilla toutes leurs richesses, et fit passer au fil de l’épée tous ceux qui lui résistaient.

17. Il descendit ensuite dans les champs de Damas au temps de la moisson, brûla tous les blés, et fit couper tous les arbres et toutes les vignes :

18. Et la terreur de ses armes se répandit sur tous les habitants de la terre.



Divers peuples envoient vers Holoferne pour lui promettre obéissance. Il descend des montagnes vers eux, détruit leurs villes et coupe leurs bois sacrés, afin que Nabuchodonosor soit seul adoré.


1. Alors les rois et les princes de toutes les villes et de toutes les provinces de la Syrie de Mésopotamie, de la Syrie-Sobal, de la Libye et de la Cilicie, envoyèrent leurs ambassadeurs vers Holoferne, pour lui dire :

2. Que votre colère cesse envers nous ; car il vaut mieux que nous vivions en servant le grand roi Nabuchodonosor, et que nous vous soyons soumis, que de nous voir exposés à périr malheureusement soit par la mort ou par la misère de la servitude.

3. Toutes nos villes et toutes nos terres, toutes nos montagnes, nos collines, nos champs, nos troupeaux de bœufs, de moutons et de chèvres, tous nos chevaux, nos chameaux, toutes nos richesses et nos familles, sont à votre disposition.

4. Que tout ce que nous avons dépende de vous.

5. Nous serons vos esclaves, nous et nos enfants.

6. Venez à nous comme un maître pacifique, et tirez de nous tous les services qu’il vous plaira.

7. Alors il descendit des montagnes avec sa cavalerie très-nombreuse, se rendit maître de toutes les villes et de tous les peuples du pays.

8. Il prit de toutes les villes pour troupes auxiliaires les hommes les plus braves et les plus propres à la guerre.

9. Toutes ces provinces furent saisies d’une telle frayeur, que les princes et les personnes les plus honorables de toutes les villes sortaient au-devant de lui avec les peuples,

10. Et le recevaient avec des couronnes et des lampes, en dansant au son des tambours et des flûtes.

11. Et néanmoins, quoiqu’ils fissent toutes ces choses, ils ne purent adoucir la férocité de son cœur ;

12. Car il détruisit leurs villes, et coupa leurs bois sacrés ;

13. Parce que le roi Nabuchodonosor lui avait commandé d’exterminer tous les dieux de la terre, afin qu’il fût seul appelé Dieu par les nations qu’Holoferne aurait pu assujettir à sa puissance.

14. Et traversant la Syrie-Sobal, toute l’Apamée, et toute la Mésopotamie, il vint au pays d’Idumée en la terre de Gabaa,

15. Et il devint maître de toutes leurs villes, et il demeura là trente jours, pendant lesquels il commanda qu’on rassemblât toutes les troupes de son armée.



Terreur des Israélites à l’approche d’Holoferne. Le grand-prêtre Eliachim donne les ordres nécessaires, et exhorte le peuple à implorer le secours du Seigneur.


1. Les enfants d’Israël qui demeuraient dans la terre de Juda ayant alors appris toutes ces choses, craignirent beaucoup Holoferne.

2. La crainte et l’horreur saisirent leurs esprits, appréhendant qu’il ne fît à Jérusalem et au temple du Seigneur ce qu’il avait fait aux autres villes et à leurs temples.

3. Et ils envoyèrent dans toute la Samarie à l'entour jusqu’à Jéricho, et occupèrent tous les sommets des montagnes ;

4. Et ils environnèrent leurs bourgs de murailles, et amassèrent des blés pour se préparer à cette guerre.

5. Le grand-prêtre Éliachim écrivit aussi à tous ceux qui demeuraient vers Esdrelon, vis-à-vis de la grande plaine qui est près de Dothaïn, et à tous ceux dont le pays pouvait offrir un passage,

6. Qu’ils occupassent les montées des montagnes par où l’on pouvait aller à Jérusalem, et qu’ils gardassent les défilés par où l’on pouvait passer entre les montagnes.

7. Et les enfants d’Israël firent comme leur avait commandé Éliachim, grand-prêtre du Seigneur.

8. Et tout le peuple cria vers le Seigneur avec grande instance, et ils humilièrent leurs âmes dans les jeûnes et les prières, eux et leurs femmes.

9. Les prêtres se revêtirent de cilices, et les enfants se prosternèrent devant le temple du Seigneur, et l’on couvrit d’un cilice l’autel du Seigneur ;

10. Puis ils crièrent tous unanimement vers le Seigneur Dieu d’Israël, afin qu’il ne permît pas que leurs enfants fussent donnés en proie, leurs femmes distribuées aux vainqueurs, leurs villes détruites, leur sanctuaire profané, ni qu’eux-mêmes devinssent l’opprobre des nations.

11. Alors Éliachim, le grand-prêtre du Seigneur, alla dans tout le pays d’Israël, et parla au peuple,

12. Disant : Sachez que le Seigneur exaucera vos prières si vous persévérez toujours dans le jeûne et dans la prière devant le Seigneur.

13. Souvenez-vous de Moïse, serviteur de Dieu, qui en combattant, non par le fer, mais par de saintes prières, défit Amalec qui se confiait en sa force, en sa puissance, en son armée, en ses boucliers, en ses chariots, et en ses cavaliers.

14. C’est ainsi que seront tous les ennemis d’Israël, si vous persévérez dans cette œuvre que vous avez commencée.

15. Le peuple étant donc touché de cette exhortation, priait le Seigneur, et demeurait toujours devant Dieu,

16. En sorte que ceux mêmes qui offraient des holocaustes au Seigneur lui présentaient les victimes étant revêtus de cilices, et ayant la tête couverte de cendre.

17. Et tous priaient Dieu de tout leur cœur, qu’il lui plût de visiter son peuple d’Israël.



Holoferne, averti que les enfants d’Israël vont lui résister, veut savoir qui ils sont. Achior les lui fait connaitre, et lui déclare que s’ils n’ont pas offensé leur Dieu, ils seront invincibles. Ce discours irrite son armée.


1. On donna avis à Holoferne, général de l’armée des Assyriens, que les enfants d’Israël se disposaient à lui résister, et qu’ils avaient fermé les passages des montagnes ;

2. Et il fut transporté de colère et tout embrasé de fureur, et il manda tous les princes de Moab et les chefs des Ammonites,

3. Et leur dit : Dites-moi qui est ce peuple qui occupe les montagnes, quelles sont leurs villes, et quelle en est la force et le nombre ; quelle est aussi la puissance de ce peuple, leur multitude, et le général de leur armée ;

4. Et pourquoi entre tous les peuples d’Orient ils sont les seuls qui nous ont méprisés, et ne sont point venus au-devant de nous pour nous recevoir en paix ?

5. Alors Achior, chef de tous les enfants d’Ammon, lui répondit : Seigneur, si vous daignez m’écouter, je vous dirai la vérité touchant ce peuple qui habite dans les montagnes, et nulle parole fausse ne sortira de ma bouche.

6. Ce peuple est de la race des Chaldéens.

7. Il habita premièrement en Mésopotamie, parce qu’ils ne voulaient pas suivre les dieux de leurs pères qui demeuraient dans le pays des Chaldéens.

8. Ayant donc abandonné les cérémonies de leurs ancêtres qui se rapportaient à la pluralité des dieux,

9. Ils adorèrent un seul Dieu du ciel, lequel leur commanda de sortir de ce pays-là, et d’aller demeurer à Chanan. Mais une famine ayant couvert tout le pays, ils descendirent en Égypte, où ils se multiplièrent de telle sorte, pendant l’espace de quatre cents ans, que leur armée ne put être comptée.

10. Comme le roi d’Égypte les traitait avec dureté, et les accablait de travail en des ouvrages de terre et de brique, qu’il les obligeait de faire pour bâtir ses villes, ils crièrent à leur Dieu, qui frappa de différentes plaies toute la terre d’Égypte.

11. Et lorsque les Égyptiens les eurent chassés de leur pays, et que la plaie eut cessé, et qu’ils voulurent s’en rendre maîtres de nouveau, et les remettre sous leur esclavage,

12. Le Dieu du ciel leur ouvrit la mer lorsqu’ils fuyaient, de manière que les eaux s’affermirent de côté et d’autre comme une muraille, et ils passèrent à pied sec au travers du fond de la mer.

13. Et l’armée des Égyptiens, qui était innombrable, les ayant poursuivis dans ce lieu, fut tellement ensevelie dans les eaux, qu’il n’en demeura pas un seul qui pût apprendre cet événement à leurs descendants.

14. Après qu’ils furent sortis de la mer Rouge, ils campèrent dans les déserts de la montagne de Sina, dans lesquels personne n’avait jamais pu habiter, et où nul homme n’avait jamais pu demeurer.

15. Là les fontaines qui étaient amères devinrent douces pour eux, afin qu’ils pussent en boire, et durant l’espace de quarante ans ils reçurent du ciel la nourriture qui leur était nécessaire.

16. Partout où ils entraient sans arc et sans flèche, sans bouclier et sans épée, leur Dieu combattait pour eux, et demeurait toujours vainqueur.

17. Et il n’y eut personne qui s’élevât contre ce peuple, sinon lorsqu’il s’est retiré du service du Seigneur son Dieu.

18. Car toutes les fois qu’ils ont adoré un autre Dieu que le leur, ils ont été livrés en proie au glaive et à l’opprobre.

19. Et toutes les fois qu’ils se sont repentis d’avoir abandonné le culte de leur Dieu, le Dieu du ciel leur a donné la force pour se défendre.

20. Enfin ils ont vaincu les rois des Chananéens, des Jébuséens, des Phérézéens, des Héthéens, des Hévéens, des Amorrhéens, et les plus puissants d’Hésébon, et ils ont pris possession de leurs terres et de toutes leurs villes ;

21. Et ils ont été heureux tant qu’ils n’ont point péché contre leur Dieu, parce que leur Dieu hait l’iniquité.

22. Aussi il y a quelques années que, s’étant retirés de la voie que leur Dieu leur avait marquée pour y marcher, ils ont été taillés en pièces par diverses nations ; et plusieurs d’entre eux ont été emmenés captifs dans une terre étrangère.

23. Mais depuis peu, étant retournés vers le Seigneur leur Dieu, ils furent réunis de cette dispersion ; ils ont repeuplé ces montagnes, et ils possèdent de nouveau Jérusalem, où est leur sanctuaire.

24. Maintenant donc, mon seigneur, informez-vous si ce peuple a commis quelque chose contre son Dieu : et, si cela est, allons les attaquer, parce que leur Dieu vous les livrera, et ils seront assujettis à votre puissance.

25. Mais si ce peuple n’a point offensé son Dieu, nous ne pourrons leur résister, parce que leur Dieu prendra leur défense, et nous deviendrons l’opprobre de toute la terre.

26. Or il arriva que lorsque Achior eut cessé de parler, tous les grands du camp d’Holoferne furent émus de colère contre lui, et pensaient à le tuer, se disant l’un à l’autre :

27. Qui est celui-ci, qui ose dire que les enfants d’Israël peuvent résister au roi Nabuchodonosor et à ses troupes, eux qui sont sans armes et sans force, et qui ne savent ce que c’est que l’art de combattre ?

28. Pour faire donc voir à Achior qu’il nous trompe, allons à ces montagnes ; et lorsque nous aurons pris les plus forts d’entre eux, on le percera de l’épée avec eux,

29. Afin que toute nation sache que Nabuchodonosor est le dieu de la terre, et qu’il n’y en a point d’autre que lui.



Holoferne fait de terribles menaces à Achior. Il ordonne qu’on le conduise vers Béthulie, et qu’on le livre aux enfants d’Israël. Achior leur est livré, et leur raconte ce qui lui est arrivé.


1. Or il arriva que lorsqu’ils eurent cessé de parler, Holoferne, transporté de fureur, dit à Achior :

2. Parce que vous avez fait le prophète en nous disant que le Dieu d’Israël sera le défenseur de son peuple, pour vous faire voir qu’il n’y a point de dieu que Nabuchodonosor,

3. Lorsque nous les aurons tous tués comme un seul homme, vous tomberez vous-même sous le fer des Assyriens, et tout le peuple d’Israël périra avec vous.

4. Et vous éprouverez que Nabuchodonosor est le maître de toute la terre ; et alors l’épée de mes soldats déchirera vos flancs, et vous tomberez percé de coups parmi les blessés d’Israël, et vous ne respirerez plus que pour périr avec eux.

5. Si vous croyez que votre prophétie soit véritable, que votre visage ne s’abatte point ; et qu’on n’y voie plus cette pâleur dont il est couvert, si vous vous imaginez que ce que je dis ne peut s’accomplir.

6. Et pour que vous connaissiez que vous éprouverez ces choses avec eux, vous serez joint dès à présent à ce peuple, afin que, lorsque mes armes leur feront souffrir la juste peine qu’ils ont méritée, vous soyez aussi vous-même puni avec eux.

7. Alors Holoferne commanda à ses gens de prendre Achior, de le mener à Béthulie, et de le mettre entre les mains des enfants d’Israël.

8. Les gens d’Holoferne s’étant saisis de lui, s’en allèrent le long de la campagne ; mais comme ils approchaient des montagnes, les frondeurs sortirent contre eux.

9. Et eux, en se détournant du côté de la montagne, lièrent Achior à un arbre par les pieds et par les mains ; et l’ayant ainsi attaché avec des cordes ils le laissèrent là, et retournèrent vers leur maître.

10. Or les Israélites étant descendus de Béthulie, vinrent au lieu où il était : ils le délièrent et le conduisirent dans la ville, et l’ayant amené au milieu du peuple, ils lui demandèrent pourquoi les Assyriens l’avaient abandonné lié de la sorte.

11. En ce temps-là Ozias, fils de Micha, de la tribu de Siméon, et Charmi, qui s’appeloit aussi Gothoniel, commandaient dans le pays.

12. Ainsi Achior dit au milieu des anciens, et en présence de tout le peuple, ce qu’il avait répondu aux demandes d’Holoferne ; comment les gens d’Holoferne l’avaient voulu tuer pour avoir parlé de la sorte ;

13. Et comment Holoferne même, transporté de colère, avait commandé qu’on le mît entre les mains des Israélites, afin qu’après qu’il aurait vaincu les enfants d’Israël il fît aussi mourir Achior dans les supplices, parce qu’il avait dit que le Dieu du ciel était leur défenseur.

14. Quand Achior eut raconté toutes ces choses, tout le peuple se prosterna le visage contre terre, en adorant le Seigneur, et mêlant ensemble leurs cris et leurs pleurs, ils offrirent d’un même cœur leurs prières à Dieu,

15. Disant : Seigneur Dieu du ciel et de la terre, regardez leur orgueil, et voyez notre abaissement, et considérez l’état où sont réduits vos saints ; faites voir que vous n’abandonnez point ceux qui présument de votre bonté, et que vous humiliez ceux qui présument d’eux-mêmes, et se glorifient de leurs propres forces.

16. Après ces pleurs, le peuple étant demeuré en prières durant tout le jour, ils consolèrent Achior,

17. Disant : Le Dieu de nos pères, dont vous avez annoncé la puissance, vous en récompensera, et vous fera voir à vous-même leur perte.

18. Et lorsque le Seigneur notre Dieu aura mis ainsi ses serviteurs en liberté, qu’il soit aussi votre Dieu au milieu de nous, afin que, selon qu’il vous plaira, vous viviez avec nous, vous et tous ceux qui vous appartiennent.

19. L’assemblée étant finie, Ozias le reçut en sa maison, et lui donna un grand souper.

20. Et y ayant invité tous les anciens, le jeûne étant fini, ils prirent ensemble leur nourriture.

21. On fit ensuite assembler tout le peuple, qui passa la nuit en prière dans le lieu où il s’était assemblé, demandant au Dieu d’Israël qu’il lui plût de venir à leur secours.



Holoferne assiège Béthulie ; les Israélites en sont effrayés. Holoferne s’empare de toutes les sources. Les habitants de Béthulie, pressés par la soif, veulent se rendre. Ozias promet de rendre la ville dans cinq jours.


1. Le lendemain Holoferne commanda à ses troupes de marcher contre Béthulie.

2. Or il y avait cent vingt mille hommes de pied, et vingt-deux mille cavaliers, sans compter ceux qu’il avait pris dans sa marche, et les jeunes hommes qu’il avait amenés des provinces et des villes dont il s’était rendu maître.

3. Ils se disposèrent tous à combattre les enfants d’Israël, et ils vinrent le long de la montagne jusqu’au sommet qui regarde Dothaïn, depuis le lieu appelé Belma, jusqu’à Chelmon, qui est vis-à-vis Esdrelon.

4. Les Israélites , voyant cette multitude, se prosternèrent en terre ; et se couvrant la tête de cendres, ils prièrent d’un même cœur le Dieu d’Israël, afin qu’il lui plût de faire éclater sa miséricorde sur son peuple.

5. Et prenant leurs armes, ils se mirent dans les lieux qui mènent au passage du chemin étroit entre les montagnes, et ils y faisaient la garde pendant tout le jour et toute la nuit.

6. Holoferne, parcourant les lieux d’alentour de la montagne, trouva que la fontaine qui coulait dans la ville, avait du côté du midi un aqueduc qui était hors des murailles ; et il commanda qu’on coupât l’aqueduc.

7. Il y avait néanmoins des fontaines qui n’étaient pas loin des murs de la ville, où l’on voyait les assièges aller puiser de l’eau furtivement, pour soulager plutôt leur soif que pour l’apaiser.

8. Mais les fils d’Ammon et les fils de Moab s’approchèrent d’Holoferne, disant : Les Israélites n’espèrent ni en leurs lances, ni en leurs flèches ; mais les montagnes les défendent, et ces collines entourées de précipices font toute leur force.

9. Afin donc que vous puissiez les vaincre sans combat, mettez des gardes près des fontaines, pour les empêcher d’y puiser de l’eau ; et vous les ferez périr sans l’épée ; ou, se lassant de souffrir la soif, ils rendront leur ville, qu’ils croient imprenable parce qu’elle est sur le haut d’une montagne.

10. Ce conseil plut à Holoferne et à ses officiers, et il plaça des centeniers près de chaque fontaine, tout alentour.

11. Cette garde ayant été faite pendant vingt jours, toutes les citernes et les réservoirs d’eau qui étaient dans la ville de Béthulie furent mis à sec : et il ne restait pas dans toute la ville de quoi donner à boire un seul jour aux habitants, car on distribuait chaque jour au peuple l’eau par mesure.

12. Alors les hommes, les femmes , les jeunes gens et les petits enfants, vinrent en foule trouver Ozias, et lui dirent tout d’une voix :

13. Que Dieu soit juge entre vous et nous ; car vous nous avez attiré ces maux, n’ayant pas voulu parler de paix avec les Assyriens ; et c’est pour cela que Dieu nous a livrés entre leurs mains.

14. Ainsi nous demeurons sans secours, et la soif nous fait périr malheureusement devant leurs yeux.

15. C’est pourquoi assemblez maintenant tous ceux qui sont dans la ville, afin que nous nous rendions tous volontairement au peuple d’Holoferne.

16. Car il vaut mieux qu’étant captifs nous vivions au moins, et bénissions le Seigneur, que de mourir, et être en opprobre à tous les hommes, en voyant nos femmes et nos enfants périr ainsi devant nos yeux.

17. Nous vous conjurons aujourd’hui devant le ciel et la terre, et devant le Dieu de nos pères, qui se venge de nous selon la grandeur de nos péchés, de livrer incessamment la ville entre les mains d’Holoferne, et de nous faire trouver une mort prompte par l’épée, au lieu de cette mort lente que la soif qui nous brûle nous fait souffrir.

18. Après qu’ils lui eurent parlé de la sorte, il se fit de grands cris et de grandes lamentations dans toute l’assemblée ; et pendant plusieurs heures ils crièrent tout d’une voix à Dieu en disant :

19. Nous avons péché avec nos pères, nous avons agi injustement, nous avons commis l’iniquité.

20. Ayez pitié de nous, parce que vous êtes bon, ou vengez nos crimes, en nous châtiant vous-même ; et n’abandonnez pas ceux qui vous confessent, à un peuple qui ne vous connait point.

21. Afin qu’on ne dise pas parmi les nations : Où est leur Dieu ?

22 Et quand, lassés à force de crier et de pleurer, ils se turent,

23. Ozias se levant ayant le visage baigné de larmes, dit : Ayez bon courage, mes frères, et attendons encore pendant cinq jours la miséricorde du Seigneur.

24. Peut-être qu’il apaisera sa colère, et qu’il glorifiera son nom.

25. Si, ces cinq jours étant passés, il ne nous vient point de secours, nous ferons ce que vous avez proposé.



Origine et vertu de Judith. Elle apprend ce qu’Ozias avait dit. Elle mande les anciens, et leur en fait des reproches. Elle ranime leur courage. Ils lui disent de prier. Elle annonce qu’elle va sortir pour exécuter un dessein qu’elle médite.


1. Et il arriva lorsque Judith, veuve, eut appris ces choses, laquelle était fille de Mérari, fils d’Idox, fils de Joseph , fils d’Ozias, fils d’Élaï, fils de Jamnor, fils de Gédéon, fils de Raphaïm, fils d’Achitob, fils de Mclchia, fils d’Énan, fils de Nathanias, fils de Salathiel, fils de Siméon, fils de Ruben :

2. (Son mari fut Manassé, qui mourut au temps de la moisson des orges ;

3. Car il pressait ceux qui liaient les gerbes dans un champ ; l’ardeur du soleil lui donna sur la tête, et il mourut dans Béthulie , sa ville, et il fut enseveli avec ses pères.

4. Il y avait déjà trois ans et demi que Judith était restée veuve de lui.

5. Elle s’était fait au haut de sa maison une chambre secrète, où elle demeurait enfermée avec ses servantes.

6. Et ayant un cilice sur ses reins, elle jeûnait tous les jours de sa vie, hors les jours de sabbat, de la nouvelle lune, et des fêtes de la maison d’Israël.

7. Elle était parfaitement belle ; et son mari lui avait laissé de grandes richesses, un grand nombre de serviteurs, et des domaines où il y avait de nombreux troupeaux de bœufs et de moutons.

8. Elle était très-estimée de tout le monde, parce qu’elle avait une grande crainte du Seigneur ; et il n’y avait personne qui dît d’elle le moindre mal : )

9. Ayant donc appris qu’Ozias avait promis de livrer la ville dans cinq jours, elle envoya quérir Chabri et Charmi, anciens du peuple.

10. Et ils vinrent à elle, et elle leur dit : Comment donc Ozias a-t-il consenti de livrer la ville aux Assyriens, s’il ne vous venait du secours dans cinq jours ?

11. Et qui êtes-vous, pour tenter le Seigneur ?

12. Ce n’est pas là le moyen d’attirer sa miséricorde, mais plutôt d’exciter sa colère, et d’allumer sa fureur.

13. Vous avez prescrit à Dieu le terme de sa miséricorde ; et vous lui avez marqué un jour, selon qu’il vous a plu.

14. Mais parce que le Seigneur est patient, faisons pénitence de cette faute même, et implorons sa miséricorde avec beaucoup de larmes ;

15. Car Dieu ne menace point comme un homme, et il ne s’enflamme point de colère comme les enfants des hommes.

16. C’est pourquoi humilions nos âmes devant lui, et, pénétrés de l’esprit de l’humilité et dévoués à son service, demeurons dans un esprit d’abaissement.

17. Prions le Seigneur avec larmes de nous faire sentir en la manière qu’il lui plaira les effets de sa miséricorde, afin que comme l’orgueil de nos ennemis nous a remplis de trouble et de crainte, notre humilité aussi devienne pour nous un sujet de gloire ;

18. Car nous n’avons point suivi les péchés de nos pères qui ont abandonné leur Dieu, et qui ont adoré des dieux étrangers,

19. Et qui, en punition de ce crime, ont été abandonnés au glaive, au pillage, et à la confusion parmi leurs ennemis : mais pour nous, nous ne connaissons point d’autre Dieu que lui.

20. Attendons humblement sa consolation ; et il demandera notre sang aux afflictions de nos ennemis ; il humiliera toutes les nations qui s’élèvent contre nous, et le Seigneur notre Dieu les couvrira de honte.

21. Et maintenant, mes frères, comme vous êtes les anciens du peuple de Dieu, et que leur âme dépend de vous, parlez-leur d’une manière qui leur relève le cœur, en les faisant souvenir que nos pères ont été tentés pour éprouver s’ils servaient Dieu véritablement.

22. Ils doivent se souvenir comment Abraham notre père a été tenté, et qu’ayant été éprouvé par beaucoup de tribulations, il est devenu l’ami de Dieu.

23. C’est ainsi qu’Isaac, que Jacob, que Moïse, et que tous ceux qui ont plu à Dieu, ont passé par plusieurs tribulations, et sont toujours demeurés fidèles.

24. Mais ceux qui n’ont pas reçu ces épreuves dans la crainte du Seigneur, qui ont témoigné leur impatience, et ont irrité le Seigneur par leurs reproches et par leurs murmures,

25. Ont été exterminés par l’ange exterminateur, et ont péri par les serpents.

26. C’est pourquoi ne témoignons point d’impatience dans ces maux que nous souffrons ;

27. Mais considérant que ces supplices mêmes sont moindres que nos péchés, croyons que ces fléaux dont Dieu nous châtie comme ses serviteurs nous sont envoyés pour nous corriger, et non pour nous perdre.

28. Ozias et les anciens lui répondirent : Tout ce que vous avez dit est véritable, et il n’y a rien à reprendre dans vos paroles.

29. Nous vous supplions donc de prier pour nous, parce que vous êtes une femme sainte, et craignant Dieu.

30. Judith leur répondit : Comme vous reconnaissez que ce que j’ai pu vous dire est de Dieu,

31. Éprouvez aussi si ce que j’ai résolu de faire vient de lui ; et priez-le d’affermir le dessein que j’ai.

32. Vous vous tiendrez cette nuit à la porte de la ville ; et je sortirai avec ma suivante ; et priez le Seigneur, afin que, comme vous avez dit, il regarde son peuple dans ces cinq jours.

33. Mais je ne veux point que vous recherchiez mon dessein ; et jusqu’à ce que je vous en instruise moi-même, qu’on ne fasse autre chose que prier le Seigneur notre Dieu pour moi.

34. Ozias, prince de Juda, lui répondit : Allez en paix ; et que le Seigneur soit avec vous, pour se venger de nos ennemis. Et, retournant, ils s’en allèrent.



Judith adresse à Dieu sa prière, et implore son secours pour l’exécution du dessein qu’elle médite.


1. Après qu’ils se furent retirés, Judith entra dans son oratoire ; et se revêtant d’un cilice, elle se mit de la cendre sur la tête ; et se prosternant devant le Seigneur, elle criait vers lui, disant :

2. Seigneur Dieu de mon père Siméon, qui lui avez mis l’épée entre les mains pour se venger des étrangers qui, transportés d’une passion impure, avaient violé une vierge, et l’avaient couverte de confusion, en lui faisant outrage ;

3. Vous qui avez livré leurs femmes en proie, qui avez rendu leurs filles captives, et qui avez donné toutes leurs dépouilles en partage à vos serviteurs qui ont brûlé de zèle pour vous ; assistez une veuve, je vous prie, Seigneur mon Dieu.

4. Car c’est vous qui avez fait les anciennes merveilles, et vous avez résolu les unes après les autres, et ce que vous avez voulu s’est fait.

5. Car toutes vos voies sont préparées, et vous avez établi vos jugements dans l’ordre de votre providence.

6. Regardez maintenant le camp des Assyriens, comme vous daignâtes un jour regarder le camp des Égyptiens, lorsque armés ils poursuivaient vos serviteurs, se fiant en leurs chariots, leur cavalerie, et la multitude de leurs soldats.

7. Mais vous ne fîtes que jeter un regard sur leur camp, et les ténèbres les fatiguèrent.

8. L’abîme retint leurs pieds, et les eaux les couvrirent.

9. Seigneur, que ceux-ci périssent de même, eux qui s’appuient sur leur grande multitude, et qui se glorifient dans leurs chariots, dans leurs dards, dans leurs boucliers, dans leurs flèches, et dans leurs lances,

10. Et qui ne savent pas que vous êtes notre Dieu, qui arrêtez les combats dès le commencement, et que votre nom est Jéhova.

11. Élevez votre bras, comme vous avez fait autrefois ; écrasez leur force par votre force ; que leur courage tombe devant votre colère, eux qui se promettent de violer votre sanctuaire, de déshonorer le tabernacle de votre nom, et de renverser avec leur épée la majesté de votre autel.

12. Faites, Seigneur, que son orgueil soit abattu de sa propre épée.

13. Qu’il soit pris par ses propres yeux, comme par un piège, en me regardant ; et frappez-le par l’agrément des paroles qui sortiront de ma bouche.

14. Donnez-moi assez de constance dans le cœur pour le mépriser, et assez de force pour le perdre.

15. Car ce sera un monument glorieux pour votre nom, qu’il périsse par la main d’une femme.

16. Car votre puissance, Seigneur, n’est point dans la multitude ; vous ne vous plaisez point dans la force des chevaux, et dès le commencement les superbes ne vous ont point plu ; mais vous avez toujours agréé les prières de ceux qui sont humbles et doux.

17. Dieu des cieux, créateur des eaux, maître de toute créature, exaucez-moi, malheureuse suppliante, qui présume de votre miséricorde.

18. Souvenez-vous, Seigneur, de votre alliance, mettez les paroles dans ma bouche, et fortifiez la résolution de mon cœur, afin que votre maison demeure toujours dans sa sainteté,

19. Et que toutes les nations connaissent que vous êtes Dieu, et qu’il n’y en a point d’autre que vous.



Judith se pare, et prend avec elle sa suivante. Elle sort, et va au camp des Assyriens. Elle y est arrêtée, et conduite à Holoferne, qui est épris de sa beauté.


1. Judith ayant cessé de crier au Seigneur, se leva du lieu où elle était prosternée contre terre devant le Seigneur ;

2. Et, ayant appelé sa suivante, elle descendit dans sa maison, ôta son cilice, et quitta ses habits de veuve ;

3. Elle se lava le corps, se l’oignit d’un parfum précieux, arrangea ses cheveux, et se mit une coiffure magnifique sur la tête, se revêtit des habits de sa joie, prit une chaussure très riche, des bracelets, des lis, des pendants d’oreilles, des bagues, se para enfin de tous ses ornements.

4. Dieu même lui donna encore un nouvel éclat, parce que tout cet ajustement n’avait pour principe aucun mauvais désir, mais la vertu ; ainsi le Seigneur augmenta encore sa beauté, afin qu’elle parût aux yeux de tous avec un lustre incomparable.

5. Elle donna à sa suivante à porter une outre de vin, un vase d’huile, de la farine, des figues sèches, du pain et du fromage, et partit ainsi.

6. Quand elles arrivèrent à la porte de la ville, elles trouvèrent Ozias et les anciens de la ville qui l’attendaient.

7. Ils furent étonnés en la voyant, et ils admirèrent beaucoup sa beauté.

8. Cependant ils la laissèrent passer sans lui faire aucune demande, disant : Que le Dieu de nos pères vous donne sa grâce, et qu’il affermisse par sa force toutes les résolutions de votre cœur, afin que Jérusalem soit glorifiée en vous, et que votre nom soit au nombre des saints et des justes.

9. Et ceux qui étaient présents répondirent tous d’une commune voix : Ainsi soit-il ! ainsi soit-il !

10. Cependant Judith priant Dieu, passa les portes, elle et sa suivante.

11. Or il arriva que vers le point du jour, comme elle descendait de la montagne, les coureurs des Assyriens la rencontrèrent, et l’arrêtèrent, en lui disant : D'où venez-vous, et où allez-vous ?

12. Elle répondit : Je suis une fille des Hébreux ; je me suis enfuie d’avec eux, ayant reconnu qu’ils vous seront livrés en pillage, parce qu’ils vous ont méprisés, et qu’ils n’ont pas voulu se rendre à vous volontairement, afin que vous leur fissiez miséricorde.

13. C’est pourquoi j’ai dit en moi-même : Je m’en irai vers le prince Holoferne, pour lui découvrir leurs secrets, et pour lui donner un moyen de les prendre sans qu’il tombe un seul homme de son armée.

14. Ayant entendu ces paroles, ils considéraient son visage ; et leurs yeux étaient tout surpris, tant ils admiraient sa beauté.

15. Et ils lui dirent : Vous avez sauvé votre vie, en prenant cette résolution de descendre vers notre prince.

16. Et vous devez vous assurer que lorsque vous paraîtrez devant lui, il vous traitera bien, et que vous lui gagnerez le cœur. Ils la menèrent donc à la tente d’Holoferne, et l’annoncèrent.

17. Quand elle fut entrée en la présence d’Holoferne, il fut aussitôt pris par ses yeux.

18. Ses officiers lui dirent : Qui mépriserait le peuple des Hébreux, qui ont des femmes si belles ? Ne méritent-elles pas bien que, pour les avoir, nous leur fassions la guerre ?

19. Et Judith voyant Holoferne assis sous son pavillon, qui était de pourpre en broderie d’or relevé d’émeraudes et de pierres précieuses,

20 Après avoir jeté les yeux sur son visage, elle se prosterna en terre, et l’adora ; et les gens d’Holoferne la relevèrent, par le commandement de leur maître.



Holoferne demande à Judith pourquoi elle a quitté son peuple pour venir vers lui. Elle lui répond en flattant ses espérances, et il lui fait de grandes promesses.


1. Alors Holoferne lui dit : Ayez bon courage ; bannissez de votre cœur toute crainte, parce que je n’ai jamais fait de mal à qui que ce soit qui a voulu servir le roi Nabuchodonosor.

2. Si votre peuple ne m’avait point méprisé, je n’aurais pas tourné mes armes contre lui.

3. Mais dites-moi d’où vient que vous les avez quittés, et que vous vous êtes résolue de venir vers nous ?

4. Judith lui répondit : Accueillez les paroles de votre servante, parce que, si vous suivez les avis que votre servante a à vous donner, Dieu achèvera d’accomplir à votre égard ce qu’il a résolu.

5. Vive Nabuchodonosor, roi de la terre, et sa puissance qui est en vous, pour châtier toutes les âmes qui se sont égarées ; car non seulement vous lui asservissez les hommes, mais les bêtes mêmes des champs lui sont assujetties.

6. La sagesse de votre esprit est célèbre dans toutes les nations ; tout le monde publie que vous êtes le seul dont la puissance et la capacité éclatent dans tout son royaume ; et on ne parle dans tous les pays que de votre habileté dans la guerre.

7. On sait aussi ce qu’a dit Achior, et on n’ignore pas de quelle manière vous avez commandé qu’il fût traité.

8. Car il est certain que notre Dieu est tellement irrité par les péchés de son peuple, qu’il lui a fait dire par ses prophètes, qu’il le livrerait à cause de ses péchés.

9. Et parce que les Israélites savent qu’ils ont offensé leur Dieu, la terreur de vos armes les a saisis.

10. Ils sont de plus désolés par la famine ; et ils sont déjà au nombre des morts par la soif dont ils sont brûlés.

11. Ils ont même résolu entre eux de tuer leurs bestiaux, pour boire leur sang :

12. Et ils ont résolu de dépenser en froment, en vin, et en huile, les choses saintes auxquelles Dieu a défendu de toucher ; ils veulent consommer ainsi des choses auxquelles il ne leur est pas même permis de porter la main. Puis donc qu’ils se conduisent de cette sorte, il est certain qu’ils seront livrés à la ruine.

13. Ce que moi, votre servante, connaissant, je me suis enfuie d’avec eux ; et le Seigneur m’a envoyée vous annoncer toutes ces choses.

14. Car moi, votre servante, j’adore Dieu, même à présent, auprès de vous ; et je sortirai, et je prierai le Seigneur,

15. Et il me dira quand il doit leur rendre la peine de leurs péchés ; et je viendrai vous le dire : je vous mènerai alors au milieu de Jérusalem, et vous aurez tout le peuple d’Israël comme des brebis qui sont sans pasteur, et il n’y aura pas un chien qui aboie contre vous,

16. Parce que tout ceci m’a été révélé par la providence de Dieu.

17. Et parce que Dieu est en colère contre eux, je suis envoyée vers vous pour vous annoncer ces choses.

18. Or tout ce discours plut à Holoferne et à ses gens ; ils admiraient la sagesse de Judith, et se disaient l’un à l’autre :

19. Il n’y a point dans toute la terre une femme semblable à celle-ci, soit pour l’air et la beauté du visage, ou pour la sagesse des paroles.

20. Et Holoferne lui dit : Dieu nous a favorisés, de vous envoyer devant votre nation, pour nous la livrer entre les mains.

21. Et parce que vos promesses sont très-avantageuses, si votre Dieu fait cela pour moi, il sera aussi mon Dieu ; vous serez grande dans la maison de Nabuchodonosor, et votre nom deviendra illustre dans toute la terre.



Judith refuse les mets de la table d’Holoferne, et lui promet que la provision qu’elle a apportée lui suffira. Elle sort du camp la nuit pour prier. Holoferne donne un festin où il fait venir Judith, et où il s’enivre.


1. Alors il commanda qu’on la fit entrer au lieu où étaient ses trésors, et qu’elle y demeurât ; et il ordonna ce qu’on lui donnerait de sa table.

2. Judith lui répondit : Je ne pourrai pas manger maintenant des choses que vous commandez qu’on me donne, de peur que le péché ne tombe sur moi ; mais je mangerai de ce que j’ai apporté avec moi.

3. Holoferne lui repartit : Si ce que vous avez apporté avec vous vient à vous manquer, que pourrons-nous vous faire ?

4. Judith lui répliqua : Je jure par votre salut, mon seigneur, qu’avant que votre servante ait consommé tout ce qu’elle a apporté, Dieu fera par ma main ce que j’ai imaginé. Et ses serviteurs la firent entrer dans la tente qu’il lui avait assignée.

5. Elle demanda, en y entrant, qu’on lui donnât la liberté de sortir la nuit, et avant le jour, pour aller faire sa prière, et invoquer le Seigneur.

6. Et Holoferne commanda aux huissiers de sa chambre de la laisser entrer et sortir, selon qu’elle le voudrait, durant trois jours, pour adorer son Dieu.

7. Elle sortait donc durant les nuits dans la vallée de Béthulie, et elle se plongeait dans une fontaine.

8. Et en remontant, elle priait le Seigneur Dieu d’Israël, afin qu’il la conduisît dans le dessein qu’elle avait prémédité pour la délivrance de son peuple.

9. Puis rentrant dans sa tente, elle y demeurait pure jusqu’à ce qu’elle prît sa nourriture vers le soir.

10. Et il arriva que quatre jours après Holoferne fit un festin à ceux de sa maison, et dit à Vagao, son eunuque : Allez, et persuadez à cette femme du peuple hébreu qu’elle consente d’elle-même à venir habiter avec moi.

11. Car les Assyriens croient qu’il est honteux à un homme qu’une femme se moque de lui, et qu’elle trouve moyen de se tirer d’avec lui sans consentir à ses désirs.

12. Alors Vagao entra chez Judith, et dit : Que cette bonne fille ne craigne point d’entrer chez mon seigneur, pour être honorée de lui, pour manger avec lui, pour boire du vin dans la joie.

13. Judith lui répondit : Qui suis-je, moi, pour m’opposer aux volontés de mon seigneur ?

14. Je ferai tout ce qu’il trouvera bon et qui lui paraîtra le meilleur ; car ce qui lui sera agréable sera aussi pour moi ce qu’il y a de mieux en toute ma vie.

15. Elle se leva ensuite, et elle se para de son vêtement ; et étant entrée dans la tente d’Holoferne, elle parut devant lui.

16. Holoferne en la voyant fut frappé au cœur, parce qu’il brûlait de passion pour elle.

17. Et il lui dit : Buvez maintenant, et mangez avec joie, parce que vous avez trouvé grâce devant moi.

18. Judith lui répliqua : Je boirai, mon seigneur, parce que mon âme reçoit aujourd’hui la plus grande gloire qu’elle ait reçue dans toute sa vie.

19. Elle prit ensuite ce que sa servante lui avait préparé, et elle mangea et but devant lui.

20. Et Holoferne fut transporté de joie auprès d’elle, et il but du vin plus qu’il n’en avait bu dans toute sa vie.



Judith, étant restée seule auprès d’Holoferne, lui tranche la tête, et sort avec la fille qui la servait. Elle arrive à Béthulie où elle est reçue avec beaucoup d’étonnement et d’applaudissements. On fait venir Achior qui reconnait la tête d’Holoferne.


1. Le soir étant venu, ses serviteurs se hâtèrent de se retirer chacun chez eux ; et Vagao ferma les portes de la chambre, et s’en alla.

2. Tous étaient appesantis par le vin ;

3. Et Judith était seule dans la chambre.

4. Or Holoferne était couché dans son lit, assoupi par l’excès du vin.

5. Et Judith commanda à sa servante de se tenir dehors devant la chambre, et d’y faire le guet.

6. Et pour elle, elle était devant le lit, priant avec larmes, et remuant les lèvres en silence,

7. Disant : Seigneur Dieu d’Israël, fortifiez-moi, et rendez-vous favorable en ce moment en ce que ma main va faire, afin que vous releviez, selon votre promesse, votre ville de Jérusalem, et que j’achève ce que j’ai cru pouvoir se faire par votre assistance.

8. Ayant parlé de la sorte, elle s’approcha de la colonne qui était au chevet de son lit, et délia sa dague qui y était attachée.

9. Puis l’ayant tirée du fourreau, elle prit Holoferne par les cheveux de sa tête, et dit : Seigneur Dieu, fortifiez-moi à cette heure.

10. Elle le frappa ensuite sur le cou par deux fois, lui coupa la tête ; et ayant détaché des colonnes le pavillon, elle fit rouler son corps sans tête.

11. Elle sortit peu après, et donna à sa servante la tête d’Holoferne, lui commandant de la mettre dans son sac.

12. Et elles sortirent toutes deux, selon leur coutume, comme pour aller prier ; et étant passées au-delà du camp, elles tournèrent le long de la vallée, et arrivèrent à la porte de la ville.

13. Alors Judith dit de loin aux gardes des murailles : Ouvrez les portes, parce que Dieu est avec nous, et qu’il a signalé sa puissance dans Israël.

14. Les gardes, ayant entendu sa voix, appelèrent les anciens de la ville ;

15. Et tous coururent à elle, depuis le plus petit jusqu’au plus grand, parce qu’ils n’espéraient plus qu’elle revînt.

16. Ils allumèrent des flambeaux, et s’assemblèrent tous autour d’elle ; et pour Judith, montant sur un lieu plus élevé, elle commanda qu’on fît silence. Et tous s’étant tus, elle dit :

17. Louez le Seigneur notre Dieu, qui n’a point abandonné ceux qui espéraient en lui :

18. Il a accompli par moi, sa servante, sa miséricorde qu’il avait promise à la maison d’Israël, et il a tué cette nuit par ma main l’ennemi de son peuple.

19. Et tirant de son sac la tête d’Holoferne, elle la leur montra, disant : Voici la tête d’Holoferne, général de l’armée des Assyriens ; et voici le pavillon sous lequel il était couché dans son ivresse, et où le Seigneur notre Dieu l’a frappé par la main d’une femme.

20. Et vive le Seigneur ! parce que son ange m’a gardée lorsque je suis sortie de cette ville, et tant que je suis demeurée là, et lorsque je suis revenue ici ; et le Seigneur n’a point permis que sa servante fût souillée ; mais il m’a fait revenir auprès de vous sans aucune tache de péché, réjouie en sa victoire, en mon salut, et en votre délivrance.

21. Rendez-lui tous des actions de grâces, parce qu’il est bon, parce que sa miséricorde s’étend dans tous les siècles.

22. Alors tous adorant le Seigneur dirent à Judith : Le Seigneur vous a bénie en sa force, car il a anéanti par vous nos ennemis.

23. Or Ozias, prince du peuple d’Israël, dit à Judith : Vous êtes bénie par le Seigneur, le Dieu très-haut, plus que toutes les femmes sur la terre.

24. Béni soit le Seigneur qui a créé le ciel et la terre, qui a conduit votre main pour frapper le chef de nos ennemis ;

25. Car il a rendu aujourd’hui votre nom si célèbre, que les hommes, se souvenant éternellement de la puissance du Seigneur, ne cesseront jamais de vous louer, parce que vous n’avez point craint d’exposer votre vie, en voyant l’extrême affliction où votre peuple se trouvait réduit ; mais vous vous êtes présentée devant notre Dieu pour empêcher sa ruine.

26. Et tout le peuple répondit : Ainsi soit-il ! ainsi soit-il !

27. On fit venir ensuite Achior, et Judith lui dit : Le Dieu d’Israël, à qui vous avez rendu ce témoignage, qu’il a le pouvoir de se venger de ses ennemis, a coupé lui-même cette nuit par ma main la tête du chef de tous les infidèles.

28. Et pour que vous soyez convaincu que cela est vrai, voici la tête d’Holoferne qui, dans l’insolence de son orgueil, méprisait le Dieu d’Israël, et qui menaçait de vous faire mourir, disant : Lorsque le peuple d’Israël sera vaincu, je ferai percer vos flancs par l’épée.

29. Achior voyant la tête d’Holoferne, saisi d’effroi, tomba le visage contre terre, et ses sens furent dans une grande agitation.

30. Étant ensuite revenu à lui, il se jeta aux pieds de Judith, et l’adora en lui disant :

31. Vous êtes bénie de votre Dieu dans tous les tabernacles de Jacob, parce que le Dieu d’Israël sera glorifié en vous, parmi tous les peuples qui entendront parler de votre nom.



Judith conseille aux Israélites de s’avancer vers les Assyriens. Achior embrasse la religion des Juifs. Les Israélites s’avancent vers les Assyriens, qui, s’apercevant de la mort d’Holoferne, sont saisis de trouble.


1. Alors Judith dit à tout le peuple : Écoutez-moi, mes frères ; suspendez cette tête au haut de nos murailles,

2. Et aussitôt que le soleil sera levé, que chacun prenne ses armes, et sortez tous avec grand bruit, non pour descendre jusqu’aux ennemis, mais comme vous disposant à les attaquer.

3. Alors il faudra nécessairement que les coureurs fuient, et s’en aillent éveiller leur général pour le combat.

4. Et lorsque leurs chefs auront couru à la tente d’Holoferne, et qu’ils n’y auront trouvé qu’un corps sans tête nageant dans son sang, la frayeur les saisira.

5. Et lorsque vous les verrez fuir, allez hardiment après eux, parce que le Seigneur les foulera sous vos pieds.

6. Alors Achior, voyant ce que la toute-puissance de Dieu avait fait en faveur d’Israël, abandonna le culte du paganisme, crut en Dieu, se circoncit, et fut incorporé au peuple d’Israël, lui et toute la suite de sa race jusqu’à ce jour.

7. Aussitôt donc que le jour parut, ceux de Béthulie suspendirent au haut de leurs murs la tête d’Holoferne ; et chacun ayant pris ses armes, ils sortirent tous, en faisant un grand bruit, et jetant de grands cris.

8. Les coureurs voyant cela, coururent à la tente d’Holoferne.

9. Ceux qui étaient dans la tente vinrent à la porte de sa chambre ; et ils tâchaient, en y faisant quelque bruit, d’interrompre son sommeil, afin qu’Holoferne fût plutôt éveillé par ce bruit confus qu’il entendrait, que par quelqu’un de ses gens.

10. Car nul n’osait ni frapper à la porte, ni entrer dans la chambre du général des Assyriens.

11. Mais les chefs, les capitaines et les principaux officiers de l’armée d’Assyrie étant venus à sa tente, dirent aux officiers de sa chambre :

12. Entrez, et éveillez-le, parce que ces rats sont sortis de leurs trous, et ont osé nous défier au combat.

13. Alors Vagao, étant entré dans sa chambre, se tint devant le rideau, et il frappa des mains, s’imaginant qu’il dormait avec Judith.

14. Mais prêtant l’oreille, et n’entendant aucun mouvement d’un homme qui dort, il s’approcha plus près du rideau, et le levant, il vit le corps mort d’Holoferne étendu par terre, sans tête, et tout couvert de son sang Aussitôt il jeta un grand cri, avec larmes, et déchira ses vêtements.

15. Puis étant allé à la tente de Judith, et ne l’ayant point trouvée, il sortit devant le peuple, et dit :

16. Une seule femme du peuple hébreu a mis la confusion dans la maison du roi Nabuchodonosor ; car voici Holoferne étendu par terre, et sa tête n’est plus avec son corps.

17. Les chefs de l’armée des Assyriens ayant entendu ces paroles, déchirèrent tous leurs vêtements ; ils furent surpris d’une crainte et d’une frayeur extrême, le trouble saisit leurs esprits ;

18. Et tout le camp retentit de cris effroyables.



La frayeur se répand dans le camp des Assyriens. Ils prennent la fuite. Les Israélites se jettent sur eux, les poursuivent, s’emparent de leurs dépouilles, et donnent a Judith celles d’Holoferne.


1. La nouvelle qu’Holoferne avait eu la tête coupée s’étant répandue dans toute l’armée, ils se trouvèrent tous consternés, sans savoir quel conseil prendre ; et poussés par la seule frayeur dont ils étaient saisis, ils ne pensaient qu’à chercher leur salut dans la fuite,

2. De sorte que nul ne parlait à son compagnon ; mais tous baissant la tête et quittant tout, se hâtaient d’échapper aux Hébreux, qu’ils entendaient venir pour fondre sur eux, les armes à la main ; et ils fuyaient çà et là par les chemins de la campagne et par les sentiers des collines.

3. Les Israélites les voyant donc fuir, les poursuivirent, et descendirent des montagnes, sonnant des trompettes, et jetant de grands cris après eux.

4. Et comme les Assyriens ne marchaient point en corps, chacun se hâtait de fuir où il pouvait : les Israélites au contraire les poursuivant tous ensemble et en bon ordre, taillaient en pièces tout ce qu’ils rencontraient.

5. Ozias envoya donc porter cette nouvelle dans toutes les villes et dans toutes les provinces d’Israël.

6. Ainsi chaque ville et chaque province ayant choisi les plus braves d’entre ses jeunes gens, leur fit prendre les armes, et les envoya après les Assyriens ; ils les poursuivirent jusqu’aux extrémités des confins de leur pays, passant au fil de l’épée tout ce qu’ils trouvaient.

7. Cependant ceux qui étaient restés à Béthulie entrèrent dans le camp des Assyriens, d’où ils emportèrent tout le butin que les Assyriens avaient laissé dans leur fuite, et ils en revinrent tout chargés.

8. Mais ceux qui après avoir battu et poursuivi les ennemis revinrent à Béthulie, emmenèrent avec eux tout ce qui avait été aux Assyriens, les troupeaux, les bestiaux, et toutes les richesses de leur bagage et de leur équipage, qui étaient sans nombre, en sorte que tous s’enrichirent, depuis le plus petit jusqu’au plus grand.

9. Or Joachim, grand-pontife, vint de Jérusalem à Béthulie, avec tous les anciens, pour voir Judith,

10. Laquelle sortit au-devant de lui. Et ils la bénirent tout d’une voix, en disant : Vous êtes la gloire de Jérusalem ; vous êtes la joie d’Israël, vous êtes l’honneur de notre peuple ;

11. Car vous avez agi avec un courage mâle ; et votre cœur s’est affermi, parce que vous avez aimé la chasteté, et qu’après votre mari, vous n’en avez point connu d’autre. C’est pour cela que la main du Seigneur vous a fortifiée, et que vous serez bénie éternellement.

12. Tout le peuple répondit : Ainsi soit-il ! ainsi soit-il !

13. Trente jours suffirent à peine au peuple d’Israël pour recueillir toutes les dépouilles des Assyriens.

14. Et tout ce qu’on put reconnaître qu’Holoferne avait possédé en or, en argent, en habillements, et pierreries, et en toutes sortes de meubles, fut donné à Judith par le peuple.

15. Et tous les hommes, les femmes, les jeunes filles et les jeunes gens, étaient dans des transports de joie qu’ils témoignaient par le son des harpes et des autres instruments de musique.



Cantique de Judith. Elle va à Jérusalem avec le peuple célébrer sa victoire. Elle revient à Béthulie, où elle meurt couverte de gloire et fort âgée.


1. Alors Judith chanta ce cantique au Seigneur, et dit :

2 Chantez à la gloire du Seigneur au son des tambours et au bruit des cymbales, chantez avec de saints accords un nouveau cantique ; glorifiez et invoquez son nom.

3. Le Seigneur met les armées en poudre ; Jéhova est son nom.

4. Il a mis son camp au milieu de son peuple, pour nous délivrer de la main de tous nos ennemis.

5. Assur est venu des montagnes, du côté de l’aquilon, avec une multitude et une force extraordinaire ; ses troupes sans nombre ont rempli les torrents, et sa cavalerie a couvert les vallées.

6. Il avait juré de brûler mes terres, de passer mes jeunes gens au fil de l’épée, de donner en proie mes petits enfants, et de rendre mes filles captives.

7. Mais le Seigneur tout-puissant l’a frappé ; il l’a livré entre les mains d’une femme, et il l’a percé.

8. Car ce ne sont point les jeunes hommes qui ont renversé celui qui était puissant parmi eux ; ce ne sont ni les fils des Titans qui l’ont frappé, ni les géants d’une hauteur démesurée qui se sont opposés à lui ; mais c’est Judith, fille de Mérari, qui l’a détruit par la beauté de son visage.

9. Car elle a quitté ses habits de veuve, et s’est parée de ses habits de joie, pour relever les espérances des enfants d’Israël.

10. Elle a mis sur son visage du parfum, elle a arrêté ses cheveux par une élégante coiffure, elle s’est parée d’une robe brillante pour le séduire.

11. L’éclat de sa chaussure l’a ébloui, sa beauté a captivé son âme ; et elle lui a coupé la tête avec sa propre dague.

12. Les Perses ont été épouvantés de sa constance ; et les Mèdes, de sa hardiesse.

13. Alors le camp des Assyriens a été rempli de hurlements, quand ont paru les miens, affaiblis et brûlant de soif.

14. Les fils des jeunes femmes les ont percés de coups et les ont tués, comme des enfants qui s’enfuient ; ils ont péri dans le combat en la présence du Seigneur mon Dieu.

15. Chantons un hymne au Seigneur ; chantons un hymne nouveau à la louange de notre Dieu.

16. Seigneur Adonaï, vous êtes grand, vous vous signalez par voire puissance, et nul ne peut vous surmonter.

17. Que toutes vos créatures vous obéissent, parce que vous avez parlé, et elles ont été faites ; vous avez envoyé votre esprit, et elles ont été créées ; et nul ne résiste à votre voix.

18. Les montagnes seront ébranlées avec les eaux jusqu’aux fondements ; les pierres se fondront comme la cire devant votre face.

19. Mais ceux qui vous craignent, Seigneur, seront grands devant vous en toutes choses.

20. Malheur à la nation qui s’élèvera contre mon peuple! car le Seigneur tout-puissant se vengera d’elle, et la visitera au jour du jugement.

21. Il répandra dans leur chair le feu et les vers, afin qu’ils brûlent et qu’ils souffrent éternellement.

22. Après cette victoire, tout le peuple vint à Jérusalem pour adorer le Seigneur ; et s’étant purifiés, ils lui offrirent tous leurs holocaustes, et leurs vœux, et leurs promesses.

23. Or Judith offrit, comme monument d’oubli, toutes les armes d’Holoferne, que le peuple lui avait données, et le pavillon de son lit, qu’elle avait emporté elle-même.

24. Tout le peuple fut dans la réjouissance à la vue des lieux saints ; et la joie de cette victoire fut célébrée avec Judith pendant trois mois.

25. Après ces jours, chacun retourna en sa maison ; et Judith devint célèbre dans Béthulie, et la personne la plus considérée de tout Israël.

26. Car la chasteté en elle était jointe au courage, tellement que depuis la mort de Manassé, son mari, elle ne connut point d’homme tout le reste de sa vie.

27. Les jours de fête, elle paraissait en public avec une grande gloire.

28. Et après avoir demeuré jusqu’à l’âge de cent cinq ans dans la maison de son mari, et avoir donné la liberté à sa suivante, elle mourut, et fut enterrée dans Béthulie avec son mari.

29. Et tout le peuple la pleura pendant sept jours.

30. Tant qu’elle vécut, et plusieurs années après sa mort, il ne se trouva personne qui troublât Israël.

31. Or le jour de cette victoire a été mis par les Hébreux au rang des saints jours ; et depuis ce temps-là jusqu’à aujourd’hui, il est honoré comme un jour de fête parmi les Juifs.


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