facable impression de ce monde où elle était appelée à vivre.
Le jour du bal arriva. Malgré le déplaisir de sa tante et l’insistance des couturières, mademoiselle de la Thieullaye était parvenue à garder dans sa toilette une rigoureuse simplicité. Ses cheveux, en dépit de la mode qui les voulait crêpés et bouclés, descendaient en bandeaux lisses de chaque côté de son front. Elle refusa obstinément d’animer ses joues pâles d’un peu de rouge, et ne voulut charger d’aucun collier ses épaules délicates. Au moment de monter en voiture, on s’aperçut qu’il manquait un bouquet de corsage. On passa chez la bouquetière en renom ; toutes ses corbeilles étaient vides ; la vicomtesse se mit en fureur, et, malgré les excuses de la marchande, qui rejetait la faute sur un garçon entré chez elle la veille, elle menaçait de lui retirer sa pratique, quand Nélida, qui, pendant ce colloque et dans l’espoir d’apaiser sa tante, avait cherché dans tous les coins quelques fleurs assez fraîches pour en faire un bouquet passable, aperçut au milieu d’un seau d’eau où l’on avait jeté pêle-mêle les plantes de rebut, un beau nénuphar qui penchait mélancoliquement hors du vase sa tête alanguie. Un souvenir depuis longtemps effacé surgit à cette vue dans sa mémoire. Elle se rappela l’étang d’Hespel, la barque sous le saule, le nid d’oiseaux, et