reuil de Laure », gracieux et vif petit animal, à qui sa maîtresse permet toutes sortes de privautés, enviées par le poète. Ah ! si celui-ci pouvait quelques instants seulement se métamorphoser en ce gracieux favori, comme il saurait tirer parti de la situation ! De gré ou de force il faudrait que sa maîtresse se résignât, nous dit-il, « à subir le sort de Léda » ! Ailleurs ce sont deux belles, point très cruelles, semble-t-il, qui se partagent, le cœur du jeune homme. La première, brune, ardente, coquette, rieuse, « lit la Pucelle de Voltaire, aime la toilette, la danse, la comédie » ; l’autre, blonde aux yeux bleus, adore la campagne et ne rêve que Bürger. Laquelle choisir ? L’heureux Adonis est perplexe. Soudain il s’avise d’une résolution très simple : il les choisira toutes deux.
Ce sont encore de petites pièces sur le vin, sur l’amour, des poésies de circonstance, composées à l’occasion de quelque anniversaire familial, avec toujours la même note mièvre, la même frivolité conventionnelle, simple jeu d’imagination, arrangement plus ou moins ingénieux de formules courantes et de réminiscences mythologiques.
Parmi ces enfantillages cependant, — outre deux poésies adressées à Bürger, — se trouvaient quelques sonnets dédiés à Guillaume Schlegel, qui trahissaient une inspiration plus personnelle, où le jeune homme affirmait avec foi sa vocation poétique et, non sans quelque désinvolture, offrait à son aîné alliance et amitié. « Et moi aussi je suis né sous le ciel d’Arcadie » ainsi débute le premier sonnet. Il se termine par cet appel chaleureux : « Viens, tends-moi la main fraternelle. La nature nous a marqués pour cette alliance et le même sol maternel nous a donné le jour. Voici longtemps que je me suis attaché à toi par l’amour, obéissant à mon meilleur génie. Donne-moi la main et un baiser de frère. » Frédéric Schlegel tirait de ces premiers essais un heureux horoscope pour le poète futur. « L’extrême inexpérience du langage et de la prosodie, de continuelles digressions en dehors du sujet, un développement démesuré et une surabon-